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08/07/2004 | FRANCE | N°03-30210

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 08 juillet 2004, 03-30210


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X... a, en sa qualité de conjoint survivant de Monique Y..., salariée d'une étude notariale décédée le 16 juillet 1998, sollicité sur le fondement de l'article 141 (anciennement 119) du Traité instituant la Communauté européenne qui prohibe toutes discriminations entre travailleurs des deux sexes, et de l'article 113 du décret n° 90-1215 du 20 décembre 1990 pris en application de la loi du 12 juillet 1937 instituant la Caisse de retraite et de prévoyanc

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AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X... a, en sa qualité de conjoint survivant de Monique Y..., salariée d'une étude notariale décédée le 16 juillet 1998, sollicité sur le fondement de l'article 141 (anciennement 119) du Traité instituant la Communauté européenne qui prohibe toutes discriminations entre travailleurs des deux sexes, et de l'article 113 du décret n° 90-1215 du 20 décembre 1990 pris en application de la loi du 12 juillet 1937 instituant la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN), qui alloue une pension de réversion à la conjointe survivante d'un employé titulaire d'une pension de vieillesse, le bénéfice de cette prestation ; que celle-ci lui ayant été refusée, l'arrêt attaqué (Caen, 31 janvier 2001) a accueilli cette demande avec effet au 1er août 1998 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la CRPCEN fait grief à la cour d'appel d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen, que chaque état membre assure l'application du principe de l'égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et féminins pour un même travail ou un travail de même valeur ; qu'on entend par rémunération le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum, et tous autres avantages payés directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au travailleur en raison de l'emploi de ce dernier ; que ce principe ne trouve à s'appliquer en matière de pension de réversion que si la pension a la nature juridique d'une rémunération ; que n'a pas une telle nature, la pension versée par un organisme gérant un régime spécial de sécurité sociale créé par la loi en dehors de toute concertation entre employeurs et salariés, auquel l'adhésion est imposée par la loi, qui est autonome et auquel sont affiliés non pas seulement une catégorie particulière de travailleurs, mais une vaste catégorie socio-professionnelle ; que la CRPCEN gère un régime spécial de sécurité sociale créé par la loi, en dehors de toute concertation entre employeurs et salariés, auquel l'adhésion est obligatoire, qui est autonome et auquel sont affiliés l'ensemble des clercs et employés de notaires qui constituent une vaste catégorie socio-professionnelle ; que les pensions de réversion qu'elle verse n'ont dès lors pas la nature juridique d'une rémunération, de sorte que le principe de l'égalité des rémunérations ne trouve pas à s'appliquer à de telles pensions ; qu'en décidant néammoins le contraire, la cour d'appel a violé l'article 141 du Traité instituant la Communauté européenne, ensemble les articles 1er 2 de la loi du 12 juillet 1937 instituant une caisse de retraite et d'asssistance des clercs de notaires, et les articles 117 et 121 du décret n° 90-1215 du 20 décembre 1990 portant application de la loi du 12 juillet 1937 instituant une caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires et modifiant certaines dispositions relatives à cette caisse ;

Mais attendu que la possibilité d'invoquer l'article 141 du Traité instituant la Communauté européenne, devant le juge national, ne peut être subordonnée au point de savoir si l'inégalité de traitement invoquée trouve son fondement dans une disposition législative, réglementaire ou dans un éventuel accord collectif ; que le fait qu'un régime professionnel de sécurité sociale soit caractérisé par une affiliation obligatoire et que les prestations versées par lui se substituent partiellement ou totalement aux prestations versées par un régime légal de sécurité sociale ne font pas obstacle à l'application de l'article 2 de la directive n° 86/378 du 24 juillet 1986 modifiée par la directive n° 96/97 du 20 décembre 1996 ;

Attendu qu'est seul déterminant le critère tiré de la constatation que la prestation litigieuse trouve son origine dans l'affiliation du conjoint du survivant à un régime visant une catégorie particulière de travailleurs, salariés ou indépendants, réunis dans le cadre d'une entreprise ou d'un groupement d'entreprises, d'une branche économique ou d'un secteur professionnel ou interprofessionnel ;

D'où il suit qu'en retenant que le régime de pension des clercs et employés de notaires (qui concerne les salariés d'un secteur professionnel déterminé) était un régime professionnel de sécurité sociale au sens du droit communautaire auquel s'appliquait directement l'article 141 du Traité instituant la Communauté européenne, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Et sur le second moyen :

Attendu que la CRPCEN fait en outre grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen, que l'application du principe de non discrimination ne s'applique aux pensions de réversion des régimes professionnels qu'à compter du 17 mai 1990 ; que, dès lors, la pension de réversion allouée sur le fondement de ce principe ne peut couvrir que les périodes d'emploi postérieures à cette date ; qu'en décidant néammoins que M. X... pouvait prétendre à la même pension de réversion que les veuves, dès lors que son épouse était décédée après le 17 mai 1990, la cour d'appel a violé l'article 141 du Traité instituant la Communauté européenne ;

Mais attendu que la CRPCEN n'a pas soutenu devant les juges du fond que la pension de réversion ne devait être calculée que sur les salaires perçus par Monique Y... à compter du 17 mai 1990 ;

que le moyen nouveau, mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires à payer à M. X... la somme de 2 200 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 03-30210
Date de la décision : 08/07/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, REGIMES SPECIAUX - Clercs et employés de notaires - Régime de retraite - Pension - Pension de réversion - Attribution - Condition.

SECURITE SOCIALE, ASSURANCES SOCIALES - Pension - Pension de réversion - Bénéficiaires - Conjoint survivant - Condition

COMMUNAUTE EUROPEENNE - Sécurité sociale - Assurances sociales - Vieillesse - Pension de réversion - Attribution - Non discrimination d'après le sexe du conjoint - Domaine d'application - Régime professionnel - Définition

Pour l'application du principe de non-discrimination entre travailleurs des deux sexes édicté par l'article 141 (anciennement 119) du Traité instituant la Communauté européenne, aux pensions de réversion, est seul déterminant le critère tiré de la constatation que la prestation litigieuse trouve son origine dans l'affiliation du conjoint du survivant à un régime professionnel visant une catégorie particulière de travailleurs, salariés ou indépendants, réunis dans le cadre d'une entreprise ou d'un groupement d'entreprises, d'une branche économique ou d'un secteur professionnel ou interprofessionnel, tel le régime géré par la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN).


Références :

Traité instituant la communauté européenne art. 141

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 31 janvier 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 08 jui. 2004, pourvoi n°03-30210, Bull. civ. 2004 II N° 397 p. 334
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2004 II N° 397 p. 334

Composition du Tribunal
Président : M. Ancel.
Avocat général : Mme Barrairon.
Rapporteur ?: Mme Duvernier.
Avocat(s) : la SCP Richard, Me Foussard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:03.30210
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