AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 octobre 2002), que Mme X... a assigné les époux Y..., ses voisins, en démolition d'un bâtiment avec terrasse que ceux-ci avaient construit sans son accord, courant 1978, contre le mur mitoyen séparant leurs propriétés contiguës ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande, alors, selon le moyen :
1 / que dès lors qu'un voisin applique ou appuie un ouvrage sur un mur mitoyen sans l'accord de l'autre voisin, ce dernier est en droit d'obtenir la destruction dudit ouvrage, sans avoir à justifier d'un préjudice ;
qu'il ressort de l'arrêt attaqué que les époux Y... avaient appuyé un ouvrage contre un mur mitoyen sans l'accord de Mme X... ; qu'en déboutant Mme X... de sa demande tendant à la destruction dudit ouvrage, motif pris de l'absence de nuisance, la cour d'appel a violé l'article 662 du Code civil ;
2 / qu'en jugeant que la construction édifiée par les époux Y... n'aurait pas été à l'origine de l'humidité constatée chez Mme X..., sans rechercher, bien qu'elle y fût invitée, si le relevé d'étanchéité au niveau du raccordement entre le mur mitoyen et l'ouvrage litigieux n'était "pas conforme" aux règles de l'art, en particulier au "DTU 43.3", la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 662 du Code civil ;
3 / qu'aux termes du rapport de M. Z..., architecte sapiteur, annexé au rapport d'expertise judiciaire de M. A..., l'humidité provenait d'un "phénomène de condensation entre deux parties du mur dont l'une, commune aux deux parties de construction, est chaude et l'autre, en plein air, est froide. La ligne de séparation présente un gradian de température favorisant la condensation à l'intérieur du mur" ; que le sapiteur mettait en exergue le rapport entre le phénomène de condensation et le réchauffement du mur mitoyen du fait de la construction litigieuse, ce dont il devait se déduire que cette construction était bien à l'origine du désordre ; qu'en retenant que "l'origine des désordres provenait d'un phénomène de condensation entre les deux parties du mur dont l'une était chaude et l'autre, en plein air, était froide", en omettant ainsi de préciser que, selon les observations de M. Z..., le mur mitoyen n'était chaud qu'à l'endroit de la construction litigieuse, pour en déduire que cette construction n'aurait causé aucune nuisance, la cour d'appel a dénaturé le rapport de M. Z..., annexé au rapport d'expertise judiciaire, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé, sans dénaturation, que le technicien commis avait retenu que la construction était conforme aux règles de l'urbanisme, qu'il n'avait pas été pratiqué d'enfoncement dans le mur mitoyen sur lequel seul un contre-mur s'appuyait, que les travaux n'avaient pas affecté la solidité du mur mitoyen et que la construction, qui s'appuyait à ce mur sur une longueur de 90 cm seulement, ne causait aucune nuisance à Mme X..., la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, en a souverainement déduit qu'il n'y avait pas lieu d'en ordonner la démolition ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne Mme X... à payer aux époux Y... la somme de 1 900 euros ; rejette la demande de Mme X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille quatre.