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10/02/2004 | FRANCE | N°et;01-45089;01-45090

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 février 2004, et et suivants


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° F 01-45.089 et H 01-45.090 ;

Attendu que, selon les deux arrêts attaqués (Papeete, 18 janvier 2001), MM. X... et Y... étaient recrutés chaque année depuis 1985 et 1987 pour la durée de l'année scolaire par le vice-recteur de la Polynésie française et mis à la disposition du territoire d'outre-mer pour exercer, dans un établissement public territorial d'enseignement, les fonctions de maître d'internat puis, en dernier lieu, de su

rveillant d'externat ; qu'ils ont demandé en 1999 devant le tribunal du travail ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° F 01-45.089 et H 01-45.090 ;

Attendu que, selon les deux arrêts attaqués (Papeete, 18 janvier 2001), MM. X... et Y... étaient recrutés chaque année depuis 1985 et 1987 pour la durée de l'année scolaire par le vice-recteur de la Polynésie française et mis à la disposition du territoire d'outre-mer pour exercer, dans un établissement public territorial d'enseignement, les fonctions de maître d'internat puis, en dernier lieu, de surveillant d'externat ; qu'ils ont demandé en 1999 devant le tribunal du travail la requalification de la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée ;

Sur le premier moyen commun aux pourvois :

Attendu que le territoire de la Polynésie française fait grief aux arrêts d'avoir jugé que les relations de travail établies avec MM. Y... et X... s'analysaient comme un contrat de travail, alors, selon le moyen :

1 ) que selon l'article 11 de la convention Etat-territoire du 31 mars 1988 sur l'éducation en Polynésie française, qui vaut pour tous les agents de l'Etat, titulaires ou contractuels, "les agents de l'Etat mis à la disposition du territoire et placés auprès du ministre de l'éducation du territoire restent soumis au statut général de la fonction publique de l'Etat et aux textes réglementaires pris pour son application ; que la cour d'appel constate que MM. Y... et X... ont, en application de cette convention "la qualité d'agent contractuel de l'Etat mis à la disposition du territoire" ; qu'en décidant néanmoins qu'ils ne peuvent "en aucun cas relever du statut de droit public", la cour d'appel a violé le texte susvisé et l'article 1er de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 relative aux principes généraux du droit du travail en Polynésie française ;

2 ) qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 relative aux principes généraux du droit du travail en Polynésie française, "la présente loi... ne s'applique pas aux personnes relevant d'un statut de droit public" ; que les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service public à caractère administratif sont des agents contractuels de droit publics ; que, par conséquent, en décidant que MM. Y... et X... étaient liés au territoire par un contrat de travail à durée indéterminée, tout en constatant que le territoire gérait le service public administratif de l'éducation auquel les intéressés participaient comme surveillants d'externat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Mais attendu, que selon l'article 1er la loi n° 86-845 du 17 juillet 1986 relative aux principes généraux de droit du travail et à l'organisation et au fonctionnement de l'inspection du travail et des tribunaux du travail en Polynésie française, ladite loi, d'une part, s'applique à tous les salariés exerçant leur activité sur le territoire et à toute personne physique ou morale qui emploie lesdits salariés mais, d'autre part et sauf disposition contraire, ne s'applique pas aux personnes relevant d'un statut de droit public ; qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi, que la réserve relative au statut de droit public ne concerne que des personnes régies par le titre premier du statut général des fonctionnaires de l'Etat et des collectivités territoriales ;

Et attendu que c'est à bon droit que la cour d'appel a décidé que les arrêtés du vice-recteur, en vertu desquels MM. Y... et X..., qui n'étaient ni fonctionnaires de l'Etat ni fonctionnaires du territoire de la Polynésie française, avaient été recrutés puis mis à la disposition du territoire et affectés par celui-ci dans un établissement public territorial d'enseignement, n'avaient pas eu pour effet de soumettre les intéressés à un statut de droit public au sens de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1986, en sorte que leurs relations de travail devaient s'analyser comme un contrat de travail régi par ladite loi et que les dispositions de la convention n° 88-003 du 31 mars 1988 sur l'éducation en Polynésie française, en ce qu'elles sont relatives à la carrière des agents de l'Etat, ne leur étaient pas applicables ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen commun aux pourvois :

Attendu qu'il est encore reproché aux arrêts d'avoir décidé que le territoire de la Polynésie française était l'employeur de MM. Y... et X..., alors, selon le moyen :

1 ) que lorsqu'un agent contractuel de l'Etat est mis à la disposition du territoire de la Polynésie française dans le cadre de la convention n° 88-003 conclue le 3 mars 1988 entre l'Etat et le territoire sur l'éducation en Polynésie française, l'Etat demeure l'employeur de cet agent dès lors que la convention du 3 mars 1988 prévoit que c'est lui qui le recrute, le rémunère et exerce le pouvoir disciplinaire ; que les articles 14 et 15 de la convention, qui prévoient qu'à l'expiration de la période de mise à la disposition, les agents se trouvent d'office remis à la disposition du territoire et qu'à tout moment le président du gouvernement du territoire peut, dans l'intérêt du service, prendre l'initiative de remettre un agent à la disposition du ministre de l'éducation nationale, sont incompatibles avec l'existence d'un contrat de travail avec le territoire en raison du caractère précaire de la mise à disposition ; que dès lors, en l'espèce, en considérant que c'était le territoire de la Polynésie française et non l'Etat qui était employeur de MM. Y... et X..., la cour d'appel a violé les articles 8, 9, 12, 14 et 15 de ladite convention, ensemble l'article 1134 du Code civil ;

2 ) qu'en toute hypothèse l'article 12 de la convention n° 88-003 du 31 mars 1988 prévoit que le pouvoir disciplinaire est exercé par l'Etat à l'égard de ses agents mis à la disposition du territoire de la Polynésie française ; que dès lors en se bornant à retenir que c'était le territoire qui exerçait sur MM. Y... et X... son pouvoir de direction, de surveillance, d'instruction et de commandement pour en déduire qu'il était leur employeur et non l'Etat qui était titulaire du pouvoir disciplinaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions du dit article, ensemble l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui était saisie de la seule question de la détermination de l'employeur de deux agents contractuels du service public territorial de l'enseignement qui n'étaient pas fonctionnaires, n'avait pas à se prononcer sur leur situation au regard du statut des agents de droit public ; d'où il suit que le moyen, qui se borne à invoquer des dispositions étrangères au litige et dont la cour d'appel n'avait pas à faire application, est inopérant ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne le territoire de la Polynésie Française, aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de MM. Y... et X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : et;01-45089;01-45090
Date de la décision : 10/02/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Code du travail d'Outre-mer - Tribunal du travail en Polynésie française - Compétence - Compétence matérielle - Personnes ne relevant pas d'un statut de droit public - Domaine d'application.

DEPARTEMENTS ET TERRITOIRES D'OUTRE-MER (y compris les collectivités territoriales) - Territoires - Polynésie française - Lois et règlements - Loi du 17 juillet 1986 - Domaine d'application - Exclusion - Personnes relevant d'un statut de droit public - Portée

DEPARTEMENTS ET TERRITOIRES D'OUTRE-MER (y compris les collectivités territoriales) - Territoires - Polynésie française - Lois et règlements - Loi du 17 juillet 1986 - Effets - Contrat de travail - Domaine d'application - Personnel non statutaire d'un service public administratif - Portée

SEPARATION DES POUVOIRS - Départements et territoires d'Outre-mer - Polynésie française - Contrat de travail - Personne relevant du droit public - Portée

SEPARATION DES POUVOIRS - Service public - Enseignement - Polynésie française - Loi du 17 juillet 1986 - Domaine d'application - Exclusion - Personnes relevant d'un statut de droit public - Portée

Selon l'article 1er de la loi no 86-845 du 17 juillet 1986 relative aux principes généraux de droit du travail et à l'organisation et au fonctionnement de l'inspection du travail et des tribunaux du travail en Polynésie française, ladite loi, d'une part, s'applique à tous les salariés exerçant leur activité sur le territoire et à toute personne physique ou morale qui emploie lesdits salariés mais, d'autre part et sauf disposition contraire, ne s'applique pas aux personnes relevant d'un statut de droit public. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi, que la réserve relative au statut de droit public ne concerne que des personnes régies par le titre premier du statut général des fonctionnaires de l'Etat et des collectivités territoriales. Il s'ensuit que c'est à bon droit qu'une cour d'appel décide que les arrêtés du vice-recteur en vertu desquels deux personnes, ni fonctionnaires de l'Etat ni fonctionnaires du territoire de la Polynésie française, avaient été recrutées puis mises à la disposition du territoire et affectées par celui-ci dans un établissement public territorial d'enseignement, n'avaient pas eu pour effet de soumettre les intéressés à un statut de droit public au sens de l'article 1er de la loi du 17 juillet 1986, en sorte que leurs relations de travail devaient s'analyser comme un contrat de travail régi par ladite loi et que les dispositions de la convention n° 88-003 du 31 mars 1988 sur l'Education en Polynésie française, en ce qu'elles sont relatives aux carrières des agents de l'Etat, ne leur étaient pas applicables.


Références :

Loi 85-845 du 17 juillet 1986 art. 1er

Décision attaquée : Cour d'appel de Papeete, 18 janvier 2001

A RAPPROCHER : Tribunal des Conflits, 2003-04-28, Bulletin 2003, Tribunal des Conflits, n° 10, p. 15 et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 fév. 2004, pourvoi n°et;01-45089;01-45090, Bull. civ. 2004 V N° 43 p. 41
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2004 V N° 43 p. 41

Composition du Tribunal
Président : M. Sargos.
Avocat général : M. Foerst.
Rapporteur ?: M. Chagny.
Avocat(s) : la SCP de Chaisemartin et Courjon, Me Blondel, la SCP Vincent et Ohl.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:ET
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