AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 janvier 2002), que, par acte sous seing privé du 19 décembre 1985, les consorts X... ont donné à bail en renouvellement, pour une durée de 9 ans à compter du 1er octobre 1985, à M. Y..., aux droits duquel est venue la société Garance productions, différents locaux à usage commercial ; que, par acte du 20 juillet 1995, les bailleurs ont donné congé pour le 1er avril 1996 à la société Garance Productions avec offre de renouvellement moyennant un loyer déplafonné ; qu'aucun accord n'ayant pu intervenir entre les parties sur le prix du bail renouvelé, le juge des baux commerciaux a été saisi à l'initiative des bailleurs ;
Attendu que la société Garance Productions fait grief à l'arrêt de retenir le caractère monovalent des locaux et de fixer le nouveau loyer à une certaine somme alors, selon le moyen :
1 / que seuls les locaux, dits monovalents, construits en vue d'une seule utilisation peuvent, par dérogation, voir leur prix déplafonné et déterminé selon les usages observés dans la branche d'activité considérée ; que la monovalence s'apprécie au regard de la profession exercée et non au regard d'un secteur d'activité ou d'une catégorie socioprofessionnelle ; que ne sont pas monovalents les locaux qui peuvent recevoir de multiples affectations correspondant à l'exercice de métiers différents même s'ils concernent tous le même secteur d'activité ou appartiennent à la même catégorie socioprofessionnelle ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que les locaux litigieux étaient constitués d'une "grande surface plane avec des installations modulables et des sièges amovibles" destinée à recevoir "des activités différentes de spectacle (manifestations sportives, boxe, catch, tennis, patinage, tous autres spectacles de variété)" correspondant à autant d'activités de nature différente et à l'exercice de métiers dissemblables par des professionnels de spécialités distinctes ; qu'en jugeant cependant que ces locaux répondaient au critère de monovalence au prétexte que, bien que différentes, les activités accueillies dans les locaux litigieux concernaient toutes "le spectacle", la cour d'appel a violé l'article 23-8 du décret du 30 septembre 1953 ;
2 / que le pluralisme des commerces autorisés par le contrat de bail exclut le caractère monovalent des locaux ; qu'en l'espèce, le contrat de bail prévoyait que les locaux loués pourraient être utilisés pour "l'exploitation d'une salle de bal et de patinage ainsi que pour des manifestations sportives (boxe, catch, tennis) et aussi pour tous autres spectacles connexes de variété à ceux qui viennent d'être précisés" ;
qu'en affirmant néanmoins que, bien que la destination des lieux prévue au bail vise des activités différentes, les locaux avaient un caractère monovalent, la cour d'appel a violé l'article 23-8 du décret du 30 décembre 1953 ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les lieux ne pouvaient être transformés en vue d'une destination différente sans réalisation de travaux importants et coûteux, la cour d'appel a pu en déduire que, bien que la destination des lieux prévue au bail vise des activités différentes de spectacle telles que manifestations sportives, boxe, tennis, patinage et tous autres spectacles de variétés, il n'y avait pas lieu de faire de distinction entre les différentes branches de spectacle et que les locaux présentaient un caractère monovalent ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Garance productions aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Garance productions à payer aux consorts X... et Z... la somme de 1 900 euros et rejette la demande de la société Garance productions ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille trois.