AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches, après avertissement délivré aux parties :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 14 octobre 1999) que par jugement du 7 avril 1989, la société Carrelages Simons Le Cateau (société CSC) a été mise en liquidation judiciaire, M. X... étant désigné liquidateur ; qu'un jugement du 5 mai 1992 a condamné solidairement MM. Y..., Z..., A... et B..., pris en leur qualité de membres du directoire de la société CSC, au paiement des dettes sociales à concurrence de 2 500 000 francs ; que cette décision a été confirmée par arrêt du 9 novembre 1993 et le pourvoi en cassation contre cet arrêt rejeté le 9 janvier 1996 ; que les dirigeants condamnés avaient auparavant conclu avec le liquidateur une transaction aux termes de laquelle ils s'engageaient à régler immédiatement une somme de 1 250 000 francs, à titre forfaitaire et définitif, la liquidation s'estimant entièrement remplie de ses droits au titre du "comblement" de passif et les anciens dirigeants devant se désister de leur pourvoi en cassation ;
que la requête du liquidateur visant à l'homologation de cette transaction a été déclarée irrecevable, comme contraire aux principes de l'autorité de la chose jugée par jugement du 30 octobre 1995 ;
Attendu que les dirigeants font grief à l'arrêt rendu sur appel de ce jugement d' avoir dit n' y avoir lieu à homologation de la transaction, alors, selon le moyen :
1 / que si, lorsqu' une transaction est soumise à homologation, elle ne peut produire effet qu'à compter de celle-ci, sa validité n' en doit pas moins s'apprécier au moment de la signature de l'acte ; que le juge saisi d'une demande d'homologation doit donc rechercher l'existence de concessions réciproques, qui conditionne la validité d'une transaction, en fonction des prétentions des parties à la date de sa signature ; qu'en énonçant que l'existence de concessions réciproques devait être appréciée au jour de l'homologation, et qu'à cette date, du fait du rejet du pourvoi formé par les consorts Y... contre la décision les condamnant à supporter le passif social à hauteur de 2 500 000 francs, il n' y avait pas de concessions réciproques, la cour d'appel a violé les articles 2044 du Code civil et 158 de la loi du 25 janvier 1985 ;
2 / qu'en toute hypothèse, comme l'a elle-même constaté la cour d'appel, une transaction peut être valablement conclue sur l'exécution d'un jugement définitif ; qu' en l'espèce, les consorts Y... faisaient valoir, dans leurs conclusions d'appel, que la transaction prévoyait le règlement immédiat et définitif d'une somme de 1 250 000 francs, somme qui avait été versée entre les mains du liquidateur ; qu'ils soutenaient encore que leurs immeubles étaient tous hypothéqués, et que M. X... n'avait aucune chance d'obtenir le recouvrement forcé de la condamnation à 2 500 000 francs prononcée contre eux par la cour d'appel ; qu'en énonçant, pour refuser d'homologuer la transaction, que la décision de condamnation contre les consorts Y... était devenue définitive, sans rechercher si, du fait du versement immédiat de la somme de 1 250 000 francs attaché à cette transaction, celle-ci ne portait pas aussi sur l'exécution de la décision de condamnation des consorts Y..., en supprimant, moyennant le paiement d'une somme inférieure, toute difficulté d'exécution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2044 du Code civil et 158 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Mais attendu que les condamnations au paiement des dettes sociales prononcées en application de l'article L. 624-3 du Code de commerce ne peuvent faire l'objet d'une transaction ; que, par ce motif de pur droit substitué à ceux de l'arrêt, celui-ci se trouve justifié ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne MM. Y..., B..., Z... et A... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X..., ès qualités ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille trois.