AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le huit octobre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SOULARD, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- L'ADMINISTRATION DES DOUANES,
contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 15 novembre 2002, qui, dans la procédure suivie contre Pierre X... pour exportations sans déclaration de marchandises prohibées, a statué sur l'affectation du cautionnement versé par ce dernier ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen de cassation relevé d'office, pris de la violation de l'article 142, 1er alinéa, 2 , du Code de procédure pénale ;
Vu ledit article ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que, même si elle est destinée à garantir en premier lieu la réparation des dommages causés par l'infraction et les restitutions, la seconde partie du cautionnement peut être affectée au paiement des amendes ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Pierre X... , mis en examen des chefs d'abus de confiance, escroqueries et exportation sans déclaration de marchandises prohibées, a été placé sous contrôle judicaire avec obligation, notamment de verser un cautionnement de 400 000 francs, cette somme garantissant, à concurrence de 10 000 francs, la représentation de l'intéressé et I'exécution du jugement et, à concurrence de 390 000 francs, la réparation des dommages causés par l'infraction ;
Que, par arrêt devenu définitif, il a été déclaré coupable, notamment, de l'infraction douanière, et condamné, de ce chef, à une amende de 510 720 francs ;
Qu'à la suite de cette condamnation l'administration des Douanes a réclamé qu'une partie du cautionnement soit affectée au paiement de l'amende douanière ;
Attendu que, pour juger que l'administration des Douanes ne peut se prévaloir des droits accordés à la partie civile en ce qui concerne l'affectation du cautionnement, la cour d'appel retient que les amendes prononcées en matière douanière ont un caractère pénal, qui ne permet pas de leur appliquer les règles relatives aux condamnations civiles ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, aprés avoir relevé que les deux parties civiles constituées n'avaient pas été indemnisées mais n'avaient rien réclamé au Trésor Public, dépositaire du cautionnement, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen proposé pour l'administration des Douanes,
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Grenoble, en date du 15 novembre 2002 ;
DIT que le montant du cautionnement peut être affecté au paiement de l'amende douanière ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Grenoble et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Soulard conseiller rapporteur, MM. Pibouleau, Challe, Roger, Dulin, Mme Thin, Desgrange, MM. Rognon, Chanut, Mme Nocquet conseillers de la chambre, Mme de la Lance, M. Samuel conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Di Guardia ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;