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24/09/2003 | FRANCE | N°02-83006

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 24 septembre 2003, 02-83006


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-quatre septembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SOULARD, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, de Me GUINARD, de Me LE PRADO et de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- L'ADMINISTRATION DES DOUAN

ES, partie poursuivante,

contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9ème ch...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-quatre septembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SOULARD, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, de Me GUINARD, de Me LE PRADO et de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- L'ADMINISTRATION DES DOUANES, partie poursuivante,

contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9ème chambre, en date du 22 mars 2002, qui l'a déboutée de ses demandes après relaxe de Loni X... et Léon Y... du chef d'importation sans déclaration de marchandises prohibées ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société Lema, alors dirigée par Loni X... puis par Léon Y... , a importé, en 1992 et 1993, des lecteurs de disques compacts en provenance de Chine ; que ces importations ont été effectuées par l'intermédiaire des sociétés Panalpina et Calberson International, commissionnaires en douane ;

qu'elles ont bénéficié d'une exemption de droits dans le cadre du système des préférences généralisées, sur présentation de certificats d'origine délivrés par les autorités chinoises ;

Attendu que l'administration des Douanes a fait citer Loni X... et Léon Y... devant le tribunal correctionnel du chef d'importations sans déclaration de marchandises prohibées au motif que les autorités chinoises avaient invalidé, en 1995, les certificats délivrés en 1992 et 1993 ; que la société Geodis Overseas France, venant aux droits de la société Calberson International, et la société Panalpina, ont été citées en qualité de "civilement responsables", la société Lema étant citée en qualité de "solidairement responsable" ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 520 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que la cour d'appel a déclaré nulle la citation délivrée à la société Geodis Calberson ;

"aux motifs que la société Geodis n'avait aucun lien de préposition avec aucune des personnes civiles ou morales poursuivies et qu'aucune citation n'a été délivrée à l'un quelconque de ses préposés qui aurait matériellement effectué une déclaration IM4 appuyée sur un certificat d'origine non applicable ; que Calberson International (visée dans la 2ème citation) et Calberson Overseas étaient deux sociétés distinctes ; que cette dernière avait acquis deux des fonds de commerce de Calberson International ;

que cette cession n'a pas emporté transfert sur l'acquéreur des dettes qui auraient pu naître à l'occasion de l'exploitation du fonds par Calberson International ; que la citation a visé une qualité erronée hors objet de la présente poursuite à l'encontre d'une société Geodis Overseas France venant aux droits de la société Calberson International ;

"alors que, le tribunal saisi d'une exception de nullité de la citation litigieuse n'avait pas statué sur cette exception ; que la cour d'appel devait annuler le jugement et évoquer ; qu'en se bornant à confirmer le jugement et à annuler la citation après l'avoir déclarée nulle, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Attendu que l'administration des Douanes, qui ne critique pas l'arrêt en ce qu'il a déclaré nulle la citation délivrée à la société Geodis Overseas France, sur laquelle les premiers juges avaient omis de se prononcer, ne saurait se faire un grief de ce que l'affaire n'a pas été évoquée au fond en application de l'article 520 du Code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 396, 426, 369, paragraphe 4, 377 bis du Code des douanes, 201-3 du Code des douanes communautaire, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé les prévenus des fins de la poursuite ;

"aux motifs que les autorités chinoises ont répondu à l'administration des Douanes que les 11 formulaires A avaient été établis par leur bureau, que les responsables chinois avaient prouvé que les marchandises avaient été fabriquées dans deux usines chinoises mais que la valeur du matériel non originaire de Chine dépassait 40 % du prix sortie-usine des produits finis, que les produits n'étaient donc pas d'origine chinoise ; qu'ultérieurement les mêmes autorités considéraient que les certificats devaient être annulés ; que, par une réponse globale sans distinction des certificats d'origine, le bureau d'inspection de Guangdong a conclu que les produits ne sont pas qualifiés d'origine chinoise et que le bureau de Shenzhen estimait que les certificats devraient être annulés ou suggérait que le certificat référencé ligne 13 devait être annulé ; que l'invalidation est confuse, voire contradictoire ; que les autorités chinoises n'ont pris aucune décision d'invalidation pour deux certificats d'origine ; que les observations faites sur la confusion résultant d'une réponse globale valent pour les 4 autres importations de LCD ; que la réponse globale des autorités chinoises affirmant l'existence d'une enquête auprès du fournisseur, RTC, d'où il résultait que le coût des pièces non originaires dépassait le seuil de 40 % ne permet pas d'induire une quelconque portée à la décision d'invalidation ; que le changement possible par le fabricant de composants insérés dans un même produit ayant la même référence interdit de procéder à une analogie interne ; que les documents émanant des autorités chinoises ne sauraient constituer la base de poursuites des délits douaniers reprochés aux prévenus : pour être conditionnels pour deux d'entre eux et ne constituer qu'une proposition s'adressant à un organe indéterminé, pour être, s'agissant du premier, confus, contradictoire avec les deux suivants et insuffisamment précis quant au critère du défaut d'origine chinoise ; que l'administration des Douanes n'établit pas que l'origine chinoise préférentielle est inexistante au motif que les coûts des composants non originaires dépassent le seuil de 40 % par rapport au prix départ usine du produit fini ;

"alors qu'une communication adressée aux autorités de l'Etat d'importation par les autorités de l'Etat d'exportation à l'issue d'un contrôle a posteriori d'un certificat d'origine, dans laquelle elles indiquent que le certificat doit être annulé, est à qualifier de "résultat de contrôle" ; qu'en l'espèce, les autorités chinoises ont indiqué que les certificats litigieux devaient être annulés ; qu'en les écartant pour relaxer les prévenus des fins de la poursuite aux motifs erronés qu'ils seraient confus, voire contradictoires, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Vu l'article 426, 3 , du Code des douanes, ensemble le règlement 693/88/CEE de la Commission, du 4 mars 1988 ;

Attendu que constitue le délit douanier d'importation sans déclaration de marchandises prohibées le fait de déclarer faussement l'origine des marchandises à l'aide de factures, certificats ou tous autres documents faux, inexacts, incomplets ou non applicables ; que, dans le cadre du système des préférences généralisées, les constatations des autorités du pays bénéficiaire relatives à l'origine des marchandises s'imposent à celles du pays d'importation ;

Attendu que, pour relaxer les prévenus et débouter l'administration des Douanes de ses demandes, la cour d'appel énonce que les déclarations d'invalidité des certificats communiquées par les autorités chinoises sont confuses et contradictoires puisqu'il est mentionné, dans certains cas, que les certificats "doivent être annulés" et, dans d'autres cas, qu'ils "devraient être annulés" ;

Que les juges ajoutent que lesdites autorités n'ont pas pu enquêter auprès de l'une des sociétés qui a fourni les appareils puisque celle-ci a disparu en 1993 ;

Qu'ils relèvent également que les autorités chinoises ont indiqué que les composants de lecteurs non originaires de Chine avaient une valeur supérieure à 40 % de celle du produit fini sans indiquer, pour chaque certificat d'origine, la valeur des composants non originaires par rapport au prix départ usine ;

Qu'ils constatent enfin que, pour les lecteurs des modèles 4230 et 3560, l'administration des Douanes s'est fondée sur un contrôle de régularité de deux certificats d'origine totalement étrangers à l'espèce ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, par des motifs mettant en cause l'appréciation des faits effectuée par les autorités chinoises, et alors qu'elle constatait elle-même que ces dernières avaient déclaré que l'ensemble des appareils litigieux avaient été fabriqués avec des composants d'origine tierce dont la valeur excédait 40% de celle du prix départ usine des produits finis et qu'ainsi ils ne pouvaient être "qualifiés comme d'origine chinoise", la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs,

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 22 mars 2002, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Soulard conseiller rapporteur, MM. Pibouleau, Challe, Roger, Dulin, Mmes Thin, Desgrange, MM. Rognon, Chanut, Mme Nocquet, M. Castagnède conseillers de la chambre, Mme de la Lance, M. Samuel conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Mouton ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-83006
Date de la décision : 24/09/2003
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

COMMUNAUTES EUROPEENNES - Douanes - Importation sans déclaration - Marchandises - Fausses déclarations - Fausse déclaration d'origine - Marchandises bénéficiant d'une préférence tarifaire - Certificat d'origine - Invalidation par les autorités du pays exportateur - Invalidation fondée sur des constatations de fait - Possibilité de remettre en cause ces constatations (non).

DOUANES - Importation sans déclaration - Marchandises - Fausses déclarations - Fausse déclaration d'origine - Marchandises bénéficiant d'une préférence tarifaire - Certificat d'origine - Invalidation par les autorités du pays exportateur - Invalidation fondée sur des constatations de fait - Possibilité de remettre en cause ces constatations (non)

Dans le cadre du système des préférences généralisées, les constatations relatives à l'origine des marchandises effectuées par les autorités du pays bénéficiaire s'imposent à celles du pays d'importation. Encourt, en conséquence, la censure, l'arrêt qui, pour relaxer un importateur poursuivi pour fausse déclaration d'origine à la suite de l'invalidation, par les autorités du pays exportateur, des certificats d'origine sous couvert desquels les marchandises avaient bénéficié du système des préférences généralisées, met en cause les constatations factuelles sur lesquelles cette invalidation est fondée (1).


Références :

Code des douanes 426.3°
Règlement 693/88/CEE du 04 mars 1988

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 22 mars 2002

CONFER : (1°). (1) Cf. Cour de justice des Communautés européennes, 1996-05-14, Faroe Seafood, Aff. C-153/94 et C-204/94, Rec., p. I-2465. CONFER : (1°). (1) A comparer: Chambre criminelle, 1996-06-20, Bulletin criminel 1996, n° 267, p. 803 (rejet) ; Chambre criminelle, 1996-10-03, Bulletin criminel 1996, n° 344, p. 1019 (cassation) ; Chambre criminelle, 2002-02-27, Bulletin criminel 2002, n° 49, p. 140 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 24 sep. 2003, pourvoi n°02-83006, Bull. crim. criminel 2003 N° 170 p. 675
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2003 N° 170 p. 675

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Mouton
Rapporteur ?: M. Soulard
Avocat(s) : la SCP Boré, Xavier et Boré, Me. Guinard, Me. Le Prado, la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.83006
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