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17/09/2003 | FRANCE | N°03-80524

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 septembre 2003, 03-80524


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-sept septembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller PONROY, les observations de la société civile professionnelle GATINEAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Marie-Christine,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du 18 décembre 2002, qui, pour recel de malf

aiteur, l'a condamnée à 18 mois d'emprisonnement dont 15 mois avec sursis et mise à l'...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-sept septembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller PONROY, les observations de la société civile professionnelle GATINEAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Marie-Christine,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du 18 décembre 2002, qui, pour recel de malfaiteur, l'a condamnée à 18 mois d'emprisonnement dont 15 mois avec sursis et mise à l'épreuve et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 122-4, 223-6, 434-6 du Code pénal, 591, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt a déclaré Marie-Christine X... coupable de recel de malfaiteur et l'a condamnée à 18 mois d'emprisonnement dont 15 mois avec sursis assorti d'un délai d'épreuve de 3 années ;

"aux motifs qu'à la suite d'un appel téléphonique de Jean-Claude Y..., Marie-Christine X..., infirmière, avait accepté qu'on lui amène depuis le Portugal Jean-Marc Z..., blessé par arme à feu et qui refusait de se faire hospitaliser ;

qu'après avoir tenté d'occulter la vérité, Sandrine A... avait fini par déclarer que Loïc B... et Franck C..., qui accompagnaient avec elle Jean-Marc Z..., lui avaient dit avoir "tout expliqué" à Jean-Claude Y... et que ce dernier lui avait également dit avoir "tout expliqué" à l'infirmière ; que si Jean-Claude Y... avait prétendu n'avoir obtenu de détails sur les faits commis par Jean-Marc Z... que plus tard, à l'occasion d'une communication avec la mère de Loïc B..., cette dernière n'avait pas confirmé ce fait ;

qu'à l'arrivée chez l'infirmière, Sandrine A... était montée avec elle et Jean-Marc Z... à l'étage et était redescendue en disant aux autres que ce dernier avait tout raconté à l'infirmière ; qu'en acceptant de recevoir chez elle puis d'héberger pendant 7 jours Jean-Marc Z..., elle avait, en connaissance de cause, fourni à l'auteur d'un crime, un logement, un lieu de retraite, des moyens de subsistance ou tout autre moyen de se soustraire aux recherches et à l'arrestation ; que si les infirmières avaient un devoir de secours et de soins à l'égard de toute personne malade, ce devoir n'allait pas jusqu'à prendre le risque de faire voyager sur des centaines de kilomètres un individu blessé et de l'héberger ensuite pendant une semaine à son domicile ; que l'action entreprise par Marie-Christine X... auprès du criminel pour aboutir à sa reddition avait été prise en considération dans le prononcé de la peine ;

"1 - alors que n'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit par la loi pénale ; qu'ayant constaté que le criminel, blessé par arme à feu et hostile à tout séjour en hôpital, était animé d'intentions suicidaires (arrêt page 6, alinéa 10 et page 7, alinéa 6), la cour d'appel aurait dû rechercher si, en le soignant et en l'hébergeant le temps qu'il retrouve ses esprits, la prévenue n'avait pas agi sur ordre de la loi incriminant l'omission de porter assistance à une personne en péril ;

"2 - alors qu'en tout état de cause, le recel de malfaiteur suppose un acte destiné à faire échapper le criminel aux poursuites ;

qu'ayant constaté que la prévenue avait, tout au contraire, oeuvré pour la reddition du criminel, la cour d'appel ne pouvait entrer en voie de condamnation contre elle du chef de recel de malfaiteur ;

"3 - alors que le recel de malfaiteur suppose encore la connaissance par le receleur de ce que la personne à laquelle il a prêté assistance avait commis un crime ; qu'en retenant qu'il résultait du témoignage indirect de Sandrine A... que Loïc B... et Franck C... avaient "tout expliqué" à Jean-Claude Y... qui lui-même avait "tout expliqué" à la prévenue, sans vérifier que Loïc B... et Franck C... avaient effectivement confirmé que leur explication avait été vraiment complète, la cour d'appel n'a pas suffisamment établi que la prévenue savait précisément que le blessé qui lui avait été amené avait commis un crime ;

"4 - alors qu'il résulte du procès-verbal de l'interrogatoire de Sandrine A... (D 184), que si elle avait dit aux autres que Jean-Marc Z... avait tout raconté à l'infirmière, elle avait en réalité seulement "déduit" du silence de cette dernière que Jean-Marc Z... lui avait tout raconté ; qu'en se fondant sur le témoignage de Sandrine A... pour dire que la prévenue avait eu connaissance du crime commis par Jean-Marc Z..., la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré la prévenue coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 434-6 du Code pénal, 2, 3, 591, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt a déclaré recevable l'action civile et condamné la prévenue à verser des dommages et intérêts aux parties civiles ;

"aux motifs que les parties civiles avaient vécu douloureusement et dans la crainte les journées précédant la reddition du meurtrier, sachant que ce dernier était en liberté et susceptible de nuire encore ; qu'ils avaient subi ainsi un préjudice moral incontestable en lien avec l'infraction de recel de malfaiteur dont s'était rendue coupable Marie-Christine X... ;

"alors que la répression du délit de recel de malfaiteur n'a d'autre but que la protection des intérêts publics ; qu'en déclarant recevable l'action civile, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen" ;

Attendu que, pour condamner Marie-Christine X..., solidairement avec les autres auteurs du délit de recel de malfaiteur, à payer des dommages-intérêts aux parents de la victime du meurtre, les juges du second degré énoncent que le préjudice moral qu'ils ont subi au cours de la période précédant la reddition du criminel, découle du délit de recel de malfaiteur commis par l'intéressée ;

Attendu qu'en cet état, la cour d'appel a justifié sa décision ;

Qu'en effet, l'article 434-6 du Code pénal a également pour but la protection des intérêts privés et autorise, par voie de conséquence, l'exercice de l'action civile dans les conditions prévues par les articles 2 et 3 du Code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Ponroy conseiller rapporteur, MM. Le Gall, Arnould, Mme Koering-Joulin, MM. Corneloup, Castagnède conseillers de la chambre, M. Sassoust, Mme Caron, M. Lemoine conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Di Guardia ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-80524
Date de la décision : 17/09/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Recevabilité - Atteinte à l'action de la justice - Entrave à la saisine de la justice - Recel de malfaiteurs.

ATTEINTE A L'ACTION EN JUSTICE - Entrave à la saisine de la justice - Recel de malfaiteurs - Action civile - Recevabilité

Si les dispositions de l'article 434-6 du Code pénal ont pour objet l'intérêt général et répriment le trouble causé à l'ordre public par une atteinte à l'action de la justice, elles ont aussi pour but la protection des intérêts privés. Dès lors, l'action civile née du délit peut être régulièrement exercée devant les juridictions répressives dans les conditions prévues par les articles 2 et 3 du Code de procédure pénale et la victime est en droit de demander réparation du dommage né de l'infraction (1).


Références :

Code de procédure pénale 2 et 3
Code pénal 434-6

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau (chambre correctionnelle), 18 décembre 2002

CONFER : (1°). (1) En sens contraire : Chambre criminelle, 1985-02-20, Bulletin criminel 1985, n° 83 (2°), p. 218 (rejet). CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1986-12-17, Bulletin criminel 1986, n° 376, p. 982 (rejet) ; Chambre criminelle, 1993-11-17, Bulletin criminel 1993, n° 347, p. 873 (rejet) ; Chambre criminelle, 1995-01-04, Bulletin criminel 1995, n° 4, p. 10 (rejet) ; Chambre criminelle, 2000-02-25, Bulletin criminel 2000, n° 78, p. 232 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 sep. 2003, pourvoi n°03-80524, Bull. crim. criminel 2003 N° 165 p. 664
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2003 N° 165 p. 664

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Di Guardia
Rapporteur ?: Mme Ponroy
Avocat(s) : la SCP Gatineau.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:03.80524
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