AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1130 et 1134 du Code civil ;
Attendu que ne constitue pas un pacte sur succession future prohibé la convention qui fait naître au profit du bénéficiaire un droit actuel de créance qui s'exercera contre la succession du débiteur ;
Attendu que suivant deux actes du 17 septembre 1991, Pierre X... a prêté à M. Y... deux sommes de 200 000 francs, moyennant un intérêt de 15 % pour une durée de cinq ans ; que ces actes stipulaient que "dans le cas où M. Pierre X... décéderait durant le cours de ce prêt, la somme prêtée resterait acquise à M. Y..., M. X... entendant en faire don à ce dernier à titre d'héritage" ; que Pierre X... étant décédé le 27 décembre 1991, son légataire universel, M. Z..., a réclamé à M. Y... le remboursement des prêts ; que M. Y... s'y est opposé en soutenant qu'il était libéré de son obligation de remboursement dès lors que Pierre X... était décédé avant l'échéance des prêts ;
Attendu que pour qualifier les actes du 17 septembre 1991 de pactes sur succession future prohibés, l'arrêt attaqué, rendu après renvoi sur cassation (CIV. 1ère 24 février 1998, Bull. 1, n° 79) retient que la clause incluse aux actes de prêts attribue un droit privatif éventuel sur une partie de la succession non encore ouverte, qu'elle porte atteinte à la liberté de tester et ne confère pas un droit actuel de créance sur un bien déterminé ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la clause litigieuse attribuait à M. Y... le droit de ne pas rembourser les prêts sous la condition que le prêteur décède avant l'échéance de ceux-ci, d'où il résultait que ces actes constituaient non pas des pactes sur succession future mais des promesses post mortem, la cour d'appel a violé le premier des textes susvisés par fausse application et le second par refus d'application ;
Et attendu, en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, qu'il y a lieu à cassation sans renvoi dès lors qu'il peut être mis fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 septembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Rejette la demande de M. Z... en remboursement du prêt ;
Le condamne aux dépens des instances d'appel et de la présente instance ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille trois.