AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Paris, 31 janvier 2001), Mme X... a été embauchée le 3 janvier 1994 en qualité de comptable par la société AG Le Poète, qui exploite un restaurant ; qu'ultérieurement, elle a exercé des fonctions de maître d'hôtel, ses tâches de comptabilité n'étant plus assumées qu'à titre accessoire ; qu'après avoir été licenciée, elle a saisi le conseil de prud'hommes pour obtenir le paiement notamment d'heures supplémentaires ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à verser à Mme X... une somme à titre d'heures supplémentaires et de congés payés afférents, alors, selon le moyen :
1 / que l'employeur peut exiger du salarié soumis au régime de l'équivalence d'horaire qu'il accomplisse, pendant les heures d'équivalence, des tâches accessoires à celles principalement exercées ;
qu'en l'espèce, la salariée, qui ne prétendait pas avoir dépassé le temps de présence, réclamait le paiement des heures d'équivalence à titre d'heures supplémentaires en invoquant une double activité de maître d'hôtel et de comptable ; que l'employeur s'y opposait en invoquant le caractère purement accessoire de l'activité de comptable invoquée ; qu'en relevant que les travaux de comptabilité qu'accomplissait la salariée n'étaient qu'accessoires à ses tâches de maître d'hôtel et en condamnant néanmoins l'employeur au paiement des heures d'équivalence à titre d'heures supplémentaires, la cour d'appel, qui n'a pas déduit de ses propres constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient, a violé l'article L. 212-4 du Code du travail, ensemble les dispositions de l'accord de l'industrie hôtelière du 2 mars 1988 ;
2 / qu'à supposer que l'employeur ne puisse, sans contrepartie financière, imposer au salarié d'accomplir des tâches accessoires à celles de l'activité principale pendant le temps d'équivalence, il ne saurait être débiteur d'heures supplémentaires majorées mais seulement d'heures évaluées au taux normal ; qu'en condamnant l'employeur au versement d'heures au taux majoré de 25 % au titre du temps d'équivalence passé à accomplir des tâches accessoires à celles exercées à titre principal et soumises au régime de l'équivalence d'horaire, la cour d'appel a violé l'article 212-4 du Code du travail, ensemble les dispositions de l'accord de l'industrie hôtelière du 2 mars 1988 ;
3 / qu'en tout état de cause, l'employeur faisait expressément valoir que les tâches de comptable, accomplies par Mme X... dans le cadre de l'activité de restauration de son employeur, comptait parmi celles soumises au régime de l'équivalence d'horaire au même titre que celles de maître d'hôtel ; qu'il en déduisait que la salariée ne pouvait prétendre à aucune heure supplémentaire dès lors qu'elle ne soutenait pas avoir dépassé 195 heures mensuelles de travail ;
qu'en laissant ce moyen sans réponse, la Cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
4 / qu'enfin la circonstance que la preuve des heures supplémentaires n'incombe spécialement à aucune des parties ne dispense pas le juge de viser et d'analyser les documents sur lesquels il se fonde pour retenir ou écarter l'existence d'heures supplémentaires ;
qu'en se bornant à se référer "aux éléments soumis à l'appréciation de la cour d'appel" pour faire droit à la demande de la salariée pour l'intégralité du montant sollicité par elle à titre d'heures supplémentaires, sans viser ni analyser le ou les documents ayant emporté sa conviction, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, que, répondant aux conclusions de l'employeur, la cour d'appel, qui a relevé que chaque jour la salariée effectuait, accessoirement à ses fonctions de maître d'hôtel, des travaux de comptabilité et qu'il n'était pas établi que cette double activité lui laissait des périodes d'inaction, a décidé, à bon droit, que cette activité accessoire ouvrait droit au paiement d'heures supplémentaires ;
Attendu, ensuite, que se référant aux éléments soumis à son appréciation par les parties et plus particulièrement aux propres écritures de l'employeur qui reconnaissait que les travaux accessoires représentaient environ deux heures de travail quotidien, la cour d'appel a, sans encourir le grief de la quatrième branche du moyen, déterminé la somme due à la salariée au titre des heures supplémentaires ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société AG Le Poete aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société AG Le Poète à payer à Mme X... la somme de 1 500 euros ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société AG Le Poète ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille trois.