La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/06/2003 | FRANCE | N°00-42766

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 juin 2003, 00-42766


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu que Mme Véronique X... et M. Pascal Y..., Mmes Christine Z... et Christine A... ont été embauchés par le GIE Pari mutuel hippodrome, respectivement à compter de 1982, 1983 et 1995, en qualité de guichetiers dans le cadre de contrats à durée déterminée journaliers qui se sont succédé de façon intermittente ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale afin, notamment, de voir requalifier ces contrats de travail en contrats de travail à durÃ

©e indéterminée ;

Attendu que le GIE Pari mutuel hippodrome fait grief à l'arrêt...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu que Mme Véronique X... et M. Pascal Y..., Mmes Christine Z... et Christine A... ont été embauchés par le GIE Pari mutuel hippodrome, respectivement à compter de 1982, 1983 et 1995, en qualité de guichetiers dans le cadre de contrats à durée déterminée journaliers qui se sont succédé de façon intermittente ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale afin, notamment, de voir requalifier ces contrats de travail en contrats de travail à durée indéterminée ;

Attendu que le GIE Pari mutuel hippodrome fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 7 février 2000) d'avoir requalifié les contrats de travail à durée déterminée de ces salariés en contrats à durée indéterminée et de l'avoir condamné à leur régler une indemnité de requalification ainsi que des rappels de salaires, alors, selon le moyen :

1 / que la répétition de missions semblables même pendant plusieurs années est autorisée par l'article L. 122-3-10, alinéa 2, du Code du travail dans la mesure où il s'agit de contrats conclus successivement avec le même salarié au titre du 3 de l'article L. 122-1-1 du Code du travail, de sorte qu'en se fondant sur la persistance de renouvellement pendant plus de 15 ans pour caractériser la nature permanente de l'emploi occupé par chaque salarié, la cour d'appel a violé l'article susvisé dont elle a par ailleurs reconnu qu'il était applicable aux faits de l'espèce ;

2 / que pour caractériser la nature prétendument permanente de l'emploi occupé par un salarié, la cour d'appel qui se fonde sur le nombre de réunions par an et le nombre de guichetiers par réunion qui selon elle est au minimum d'une trentaine, sans s'expliquer sur les conclusions du Pari mutuel hippodrome qui faisait valoir que le calcul proposé par la partie adverse correspondait en réalité à une moyenne et ne tenait aucun compte des disparités pouvant exister entre les courses d'inégale importance, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 122-3-10, alinéa 2, et l'article L. 122-1-1,3 , du Code du travail ;

3 / qu'en subordonnant la validité des contrats à durée (in)déterminée à la condition qu'ils ne concernent pas le même emploi, en l'occurrence guichetier ou agent d'exploitation, et en imposant ainsi le principe de non permanence dans l'affectation de chaque vacataire, la cour d'appel ajoute en violation de l'article L. 122-1 du Code du travail une condition que ce texte ne comporte pas ;

4 / qu'au surplus, la cour d'appel qui relève elle-même que les conventions établies pour la période antérieure à décembre 1996 précisent que la vacation portait sur une course déterminée, un jour précis, en un endroit donné, mais qui refuse d'admettre que les prestations ainsi prévues correspondaient à un emploi à durée déterminée au seul prétexte qu'elles ne préciseraient pas si l'intéressé opérerait en tant que guichetier ou agent d'exploitation, ajoute aux dispositions des articles L. 122-3-1 et L. 122-1 une condition qui ne figure pas, s'agissant de contrats conclus dans un secteur d'activité où il est d'usage d'avoir recours à des contrats à durée déterminée, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés ;

5 / qu'à supposer que la relation de travail entre les parties antérieure à décembre 1996 ait été conclue dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, la cour d'appel se devait de s'expliquer sur le point de savoir si les contrats explicités conclus à compter de décembre 1996 n'avaient pas emporté novation du contrat à durée indéterminée en contrat à durée déterminée, la signature desdites conventions emportant nécessairement acceptation des nouvelles conditions de travail, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 1271 et suivants du Code civil ;

6 / que la requalification en contrat à durée indéterminée de la relation de travail n'avait pas pour effet, comme le soulignait l'employeur dans ses conclusions, d'octroyer à leur titulaire le bénéfice des avantages prévus par la convention collective, l'article 21 de celle-ci subordonnant lesdits avantages à la participation annuelle hors congés payés de 210 réunions diverses ou semi nocturnes, de sorte que l'arrêt attaqué qui attribue lesdits avantages à des salariés ne remplissant pas la condition "id loc", viole l'article 21 susvisé, ainsi que l'article L. 212-4 du Code du travail ;

7 / qu'une convention collective d'entreprise peut limiter son champ d'application et prévoir des modalités spécifiques quant aux salariés à temps partiel, de sorte que la cour d'appel qui estime que la convention collective a vocation à s'appliquer à l'ensemble du personnel et retient les dispositions de l'article 21 de la convention collective qui fixent le seuil des salariés qualifiés de permanence, c'est-à-dire à temps plein, pour calculer les différents rappels de salaires et indemnités pouvant revenir aux salariés, viole les dispositions de l'article L. 212-4-2, alinéa 9 du Code du travail ;

8 / que l'arrêt attaqué qui calcule les indemnités dues aux salariés conformément à leur demande et qui refuse en conséquence d'ordonner la restitution des primes de précarité qui avaient été versées sous l'empire de la qualification précédemment pratiquée par les parties aux contrats à durée déterminée, viole l'article L. 122-3-4 du Code du travail ;

Mais attendu, de première part, que l'activité du GIE Pari mutuel hippodrome qui consiste à assurer, pour les sociétés de courses de chevaux, la collecte et la gestion des paris dans les hippodromes, ne se rattache pas à l'un des secteurs d'activités, limitativement énumérés par l'article D. 121-2 du Code du travail, dans lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de cet emploi ;

Attendu, de deuxième part, qu'ayant constaté que l'engagement des salariés avait fait l'objet d'un renouvellement systématique pendant plusieurs années et que les tâches de guichetier qui leur étaient confiées étaient strictement identiques à chaque réunion hippique, la cour d'appel a pu décider qu'ils avaient été engagés pour occuper durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise ; qu'elle en a exactement déduit qu'il y avait lieu de requalifier ces contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée ;

Attendu, de troisième part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que le GIE Pari mutuel hippodrome ait soutenu devant les juges du fond le moyen tiré de la novation des contrats ;

Attendu, de quatrième part, que l'article L. 212-4-2 du Code du travail, devenu l'article L. 212-4-5 ne permet de prévoir que des modalités spécifiques d'application des droits conventionnels pour les salariés à temps partiel et qu'il ne peut avoir pour effet d'exclure les salariés à temps partiel du champ d'application d'une convention collective ; que l'article 21 de la convention collective d'entreprise du Pari mutuel hippodrome qui prévoit que la durée annuelle de travail du personnel d'exploitation présent depuis un an dans l'entreprise correspond à 210 réunions diurnes ou semi-nocturnes, n'a pas pour effet d'exclure les salariés à temps partiel du bénéfice de ladite convention collective ;

Et attendu, de cinquième part, que l'indemnité de précarité, qui compense pour le salarié la situation dans laquelle il est placé du fait de son contrat à durée déterminée, lorsqu'elle est perçue par celui-ci à l'issue du contrat, lui reste acquise nonobstant une requalification ultérieure de ce contrat en un contrat à durée indéterminée ;

D'où il suit que le moyen, pour partie nouveau et, mélangé de fait et de droit, irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le GIE Pari mutuel hippodrome aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne le GIE Pari mutuel hippodrome à payer à chacun des salariés la somme de 600 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00-42766
Date de la décision : 24/06/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° CONTRAT DE TRAVAIL - DUREE DETERMINEE - Cas de recours autorisés - Emploi pour lequel il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée - Constance de l'usage - Secteurs d'activité concernés - Exclusion - Applications diverses - Collecte et gestion des paris dans les hippodromes.

1° CONTRAT DE TRAVAIL - DUREE DETERMINEE - Cas de recours autorisés - Emploi pour lequel il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée - Constance de l'usage - Secteurs d'activité concernés - Définition par les textes - Portée.

1° L'activité d'un organisme de pari mutuel qui consiste à assurer pour des sociétés de courses de chevaux la collecte et la gestion des paris dans les hippodromes ne se rattache pas à l'un des secteurs d'activité, limitativement énumérés par l'article D. 121-2 du Code du travail, dans lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - DUREE DETERMINEE - Cas de recours interdits - Emploi durable lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise - Emploi durable - Critères - Détermination.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - DUREE DETERMINEE - Qualification donnée au contrat - Demande de requalification - Office du juge.

2° Dès lors qu'elle a constaté que les contrats à durée déterminée des salariés avaient fait l'objet d'un renouvellement systématique pendant plusieurs années et que les tâches de guichetier qui leur étaient confiées étaient strictement identiques à chaque réunion hippique, la cour d'appel a pu décider que ces salariés avaient été engagés par un organisme de pari mutuel pour occuper durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise et elle en a exactement déduit que ces contrats à durée déterminée devaient être requalifiés en contrats à durée indéterminée.

3° TRAVAIL REGLEMENTATION - Durée du travail - Travail à temps partiel - Egalité des droits - Dérogation conventionnelle - Limites.

3° STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions collectives - Conventions diverses - Pari mutuel hippodrome - Article 21 - Durée annuelle du travail du personnel d'exploitation - Domaine d'application.

3° L'article L. 212-4-2 du Code du travail, devenu l'article L. 212-4-5, ne permet de prévoir que des modalités spécifiques d'application des droits conventionnels pour les salariés à temps partiel et ne peut avoir pour effet d'exclure cette catégorie de salariés du champ d'application de la convention collective. Ne contrevient pas aux exigences de ce texte, l'article 21 de la convention collective d'entreprise d'un organisme de pari mutuel dont les dispositions qui prévoient que la durée annuelle de travail du personnel d'exploitation présent depuis un an dans l'entreprise correspond à deux cent dix réunions hippiques diurnes ou semi-nocturnes n'ont pas pour effet d'exclure les salariés à temps partiel du bénéfice de cette convention collective.

4° CONTRAT DE TRAVAIL - DUREE DETERMINEE - Expiration - Indemnisation - Indemnité de fin de contrat - Paiement - Portée.

4° L'indemnité de précarité, qui compense pour le salarié la situation dans laquelle il est placé du fait de son contrat à durée déterminée, lorsqu'elle est perçue par celui-ci à l'issue du contrat, lui reste acquise nonobstant une requalification ultérieure de ce contrat en un contrat à durée indéterminée.


Références :

1° :
3° :
Code du travail D121-22
Code du travail L212-4-2 devenu L212-4-5

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 février 2000

A RAPPROCHER : (3°). Chambre sociale, 2002-05-07, Bulletin 2002, V, no 157, p. 159 (cassation partielle), et les arrêts cités. A RAPPROCHER : (4°). Chambre sociale, 2001-05-09, Bulletin 2001, V, no 153, p. 121 (cassation partielle sans renvoi)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 jui. 2003, pourvoi n°00-42766, Bull. civ. 2003 V N° 203 p. 202
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2003 V N° 203 p. 202

Composition du Tribunal
Président : M. Sargos.
Avocat général : M. Legoux.
Rapporteur ?: M. Poisot.
Avocat(s) : la SCP Célice, Blancpain et Soltner, la SCP Masse-Dessen et Thouvenin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:00.42766
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award