AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que, le 17 février 1997, Cédric X..., âgé de 16 ans, qui pilotait un cyclomoteur, a chuté en tentant d'éviter un véhicule qui circulait en sens inverse, conduit par M. Y..., et a été heurté par ce dernier ; que gravement blessé, Cédric X..., représenté par sa mère, a assigné M. Y... et son assureur, la compagnie Mutuelle de Poitiers assurances, en présence de la Caisse primaire d'assurance maladie de la Charente-Maritime, en indemnisation de son préjudice ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande d'indemnisation alors, selon le moyen :
1 / que le cyclomotoriste, qui, après avoir perdu l'équilibre, tombe de sa motocyclette, a perdu la qualité de conducteur lorsqu'il est heurté, au sol, par un véhicule ; qu'il doit alors être indemnisé en qualité de piéton ; qu'en jugeant que M. X... avait conservé la qualité de conducteur de son véhicule après avoir constaté que la victime avait chuté sur la chaussée avant l'accident, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles 1, 3 et 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;
2 / qu'en se fondant sur la distance entre les traces de ripage du véhicule et le point de choc entre le corps de la victime et le véhicule de M. Y... pour estimer que "le heurt a suivi immédiatement la chute de la victime" et "qu'il convient de considérer qu'au moment du choc le jeune Cédric X... avait conservé sa qualité de conducteur", la cour d'appel a statué par motifs inopérants et privé sa décision de base légale au regard de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;
Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt retient qu'avant d'entrer en collision avec le véhicule de M. Y..., M. X... a chuté sur la chaussée, qu'il peut être présumé que cet événement s'est produit à l'endroit où prennent fin les traces de freinage laissées par le cyclomoteur, lequel a poursuivi sa course, que cet emplacement n'est distant que de 1,50 mètre, environ, qu'il apparaît donc que le heurt a suivi immédiatement la chute de la victime ; que sa chute sur le sol fait partie du processus de l'accident ;
Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu déduire que M. X... n'avait pas perdu sa qualité de conducteur ;
Mais sur le moyen unique, pris en ses troisième et quatrième branches :
Vu les articles 1 et 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;
Attendu que lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; qu'il appartient alors au juge d'apprécier souverainement si cette faute a pour effet de limiter l'indemnisation ou de l'exclure ;
Attendu que pour dire que la faute commise par M. X... est exclusive de son droit à indemnisation, l'arrêt, après avoir énoncé que ce dernier ne pourrait prétendre à une indemnisation qu'à la condition de démontrer une faute de M. Y..., retient que le conducteur du véhicule automobile n'a commis aucune faute, étant normalement situé dans son couloir de circulation et ayant tenté de serrer au maximum sur sa droite, autant que le lui permettait le profil de la chaussée et la présence d'un véhicule en stationnement ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la faute de la victime ayant contribué à la réalisation de son préjudice doit être appréciée en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur du véhicule impliqué dans l'accident, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la cinquième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 septembre 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne M. Y..., la Mutuelle de Poitiers assurances et la Caisse primaire d'assurance maldie de la Charente-Maritime aux dépens
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejtte la demande de la Mutuelle de Poitiers assurances ;
Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille trois.