AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint, en raison de leur connexité, les pourvois n° K 01-10.478 et n° C 01-10.747 ;
Attendu que la société Assurances générales de France (AGF) a indemnisé son assurée, l'Institution Saint-Irénée des Chartreux, de ses dommages consécutifs à l'incendie provoqué par deux anciens élèves et, exerçant son recours subrogatoire, a assigné ceux-ci, qui avaient été condamnés pénalement pour destruction et détérioration volontaires d'objets mobiliers et de biens immobiliers par l'effet de l'incendie et en bande organisée, en remboursement des indemnités versées au titre des dommages matériels, des pertes indirectes et des frais d'expertise ; que les responsables ont appelé en garantie leurs assureurs respectifs, la société GPA IARD et la société Mutuelle de l'Est-La Bresse assurances ; que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement qui avait condamné in solidum les responsables et leurs assureurs à payer aux AGF l'intégralité des sommes réclamées, en faisant courir les intérêts à compter des quittances subrogatives ;
Sur les premiers moyens réunis des pourvois de la société Mutuelle de l'Est-La Bresse assurances et de la société GPA IARD et sur le deuxième moyen du pourvoi de la société GPA IARD, pris en ses deux branches, tels qu'ils figurent aux mémoires en demande et sont reproduits en annexe au présent arrêt :
Attendu que la faute intentionnelle au sens de l'article L. 113-1 du Code des assurances, qui implique la volonté de créer le dommage tel qu'il est survenu, n'exclut de la garantie due par l'assureur à l'assuré, condamné pénalement, que le dommage que cet assuré a recherché en commettant l'infraction ; que la cour d'appel, après avoir souverainement apprécié, au vu du dossier pénal, que les auteurs n'avaient pas délibérément recherché les conséquences dommageables effectivement survenues, a, sans méconnaître le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil, exactement décidé, hors la dénaturation alléguée par la société GPA IARD de la clause subordonnant la prise en charge de l'assureur au caractère accidentel de l'événement à l'origine du dommage, que les assureurs étaient tenus à garantie ;
Que les moyens ne sont fondés en aucun de leurs griefs ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches, du pourvoi de la société Mutuelle de l'Est-La Bresse assurances, et sur le troisième moyen, pris en ses trois branches, du pourvoi de la société GPA IARD, réunis, tels qu'ils figurent au mémoire en demande et sont reproduits en annexe au présent arrêt :
Attendu, d'abord, qu'il ne ressort ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que la société GPA IARD et la société Mutuelle de l'Est-La Bresse assurances aient contesté, devant les juges du fond, le caractère exceptionnel des dommages au sens des contrats d'assurance ; qu'ensuite, la cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir souverain en confirmant, après avoir exactement rapporté les clauses relatives aux plafonds de garantie et aux dommages exceptionnels, l'interprétation favorable aux assurés faite par le premier juge de ces stipulations contractuelles dont, par motifs propres et adoptés, elle avait constaté l'ambiguïté ; qu'enfin, c'est par un motif erroné, mais surabondant, que la cour d'appel a estimé qu'une telle clause constituait une exclusion ;
Qu'il s'ensuit qu'en leurs différents griefs, les moyens ne peuvent être accueillis ;
Sur le quatrième moyen, pris en ses trois branches, du pourvoi de la société GPA-IARD, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe au présent arrêt :
Attendu que la société GPA IARD reproche à l'arrêt d'avoir, en en dénaturant les termes clairs et en méconnaissant l'objet du litige, déclaré inopposable aux assurés responsables du dommage, la convention de renonciation à recours relative aux indemnités versées au titre des pertes indirectes et des honoraires d'experts et souscrite par l'assureur de chose au bénéfice des assureurs de responsabilité ;
Mais attendu qu'en écartant l'application de la stipulation limitant le recours subrogatoire de l'assureur de choses contre l'assureur de responsabilité, stipulation qui ne pouvait nuire ni profiter à l'assuré lui-même auquel elle n'était pas opposable, faute par lui de l'avoir acceptée, la cour d'appel n'a ni méconnu l'objet du litige ni dénaturé cette stipulation ;
Mais sur le troisième moyen du pourvoi de la société Mutuelle de l'Est-La Bresse assurances, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe au présent arrêt :
Vu l'article 1153 du Code civil ;
Attendu que la personne tenue au paiement d'une somme envers une autre ne lui en doit les intérêts qu'après avoir été mise en demeure ;
Attendu qu'en décidant que les intérêts moratoires d'une somme versée suivant quittance subrogative et dont le remboursement était sollicité par le créancier subrogé courent à compter de la date de cette quittance, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que les intérêts légaux dûs par la société Mutuelle de l'Est-La Bresse assurances sur la somme de 14 154 318 francs (soit 2 157 811,80 euros) doivent courir à compter des dates des quittances subrogatives, l'arrêt rendu le 28 février 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
Dit que les intérêts légaux dûs par la société Mutuelle de l'Est-La Bresse assurances courent à compter de la mise en demeure ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Condamne la société GPA IARD et la société Mutuelle de l'Est-La Bresse assurances, chacune, aux dépens afférents à son propre pourvoi ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille trois.