AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu l'arrêt du 20 novembre 2001 constatant l'interruption de l'instance du fait du décès de Charlotte X..., veuve Y..., survenu le 17 juillet 1999, et les actes de signification du mémoire ampliatif aux héritiers de celle-ci ;
Attendu qu'au mois d'octobre 1981, M. Jean-Yves Y... a repris le cabinet de géomètre-expert de son oncle, Jean Y..., décédé le 18 juin 1981 ; que, par acte du 21 octobre 1992, Charlotte X..., veuve de Jean Y..., a assigné M. Jean-Yves Y... en paiement d'une somme de 629 956 francs, représentant notamment les loyers dus pour les locaux professionnels, et en annulation d'une reconnaissance de dette de 800 000 francs souscrite devant notaire le 13 novembre 1991 ; que l'arrêt attaqué (Rennes, 10 novembre 1998), rendu après expertise, a déclaré de nul effet l'acte du 13 novembre 1991, condamné M. Jean-Yves Y... à payer à Charlotte X... la somme de 149 417 francs, avec les intérêts au taux légal, outre une indemnité d'occupation de 1 200 francs par mois à compter de juillet 1996, et débouté les parties de leurs autres demandes ;
Sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que M. Jean-Yves Y... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à payer à Charlotte X... diverses sommes au titre de l'occupation des locaux professionnels : 1 ) en lui faisant supporter la preuve de l'absence d'obligation au paiement d'indemnités d'occupation, de sorte que la cour d'appel aurait inversé la charge de la preuve ; 2 ) sans répondre à ses conclusions de nature à établir qu'un accord était intervenu entre les parties pour compenser l'occupation des locaux et qu'il n'était donc redevable d'aucune indemnité ;
Mais attendu que, dans ses dernières conclusions d'appel, M. Jean-Yves Y... avait reconnu qu'il y avait eu promesse d'une indemnité d'occupation acceptée par les deux parties ; qu'il n'est donc pas recevable à soutenir devant la Cour de Cassation un moyen contraire à ses propres écritures ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 1131 du Code civil ;
Attendu que la fausseté partielle de la cause n'entraîne pas l'annulation de l'obligation, mais sa réduction à la mesure de la fraction subsistante ;
Attendu que, pour déclarer nul en sa totalité l'acte du 13 novembre 1991, la cour d'appel énonce que Charlotte X... ne pouvait être débitrice de la somme portée à cet acte ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle s'était appropriée les conclusions de l'expert dont il résultait que la dette de Charlotte X... à l'égard de son neveu existait bien, même si elle s'avérait inférieure à la somme pour laquelle elle s'était engagée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux premières branches du premier moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ses dispositions relatives à l'indemnité d'occupation, l'arrêt rendu le 10 novembre 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille trois.