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19/12/2002 | FRANCE | N°01-19052

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 décembre 2002, 01-19052


ARRÊT N° 2

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches réunies :

Attendu selon les juges du fond que Claire X..., épouse Y..., salariée de la société de travail temporaire Manpower France, a été victime, le 3 septembre 1997, à son travail, d'un malaise ; qu'elle est décédée le 14 septembre 1997 ; que la caisse primaire d'assurance maladie a notifié le 29 janvier 1998 à la société sa décision de prendre en charge l'accident et le décès au titre profess

ionnel ; que la société a formé un recours tendant à ce que cette décision lui soit déclarée...

ARRÊT N° 2

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches réunies :

Attendu selon les juges du fond que Claire X..., épouse Y..., salariée de la société de travail temporaire Manpower France, a été victime, le 3 septembre 1997, à son travail, d'un malaise ; qu'elle est décédée le 14 septembre 1997 ; que la caisse primaire d'assurance maladie a notifié le 29 janvier 1998 à la société sa décision de prendre en charge l'accident et le décès au titre professionnel ; que la société a formé un recours tendant à ce que cette décision lui soit déclarée inopposable ; que ce recours a été accueilli par la cour d'appel (Grenoble, 26 juin 2000) au motif que la Caisse n'avait pas pris sa décision dans le respect des règles destinées à assurer l'information de l'employeur ;

Attendu que la CPAM reproche à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :

1 / que les dispositions de l'article R.441-11 du Code de la sécurité sociale sont inapplicables en cas de reconnaissance implicite du caractère professionnel de l'accident par l'employeur ; qu'en l'espèce, la Caisse faisait justement valoir dans ses conclusions que la société Manpower avait indiqué lors de l'enquête qu'elle ne contestait pas l'accident, les faits s'étant passés sur le lieu du travail, ni émis de réserve lors du rapport d'enquête ce dont il résultait sa reconnaissance implicite de l'accident ; qu'en déclarant inopposable à la société Manpower la décision de prise en charge de l'accident du travail et du décès de Mme Y... pour méconnaissance des dispositions de l'article R.441-11 du Code de la sécurité sociale, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le comportement de l'employeur lors de l'enquête ne valait pas reconnaissance implicite de l'accident, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R.441-11 du Code de la sécurité sociale ;

2 / que l'article R.441-11 du Code de la sécurité sociale ne prévoit aucune sanction en cas d'inobservation de l'obligation d'information ; qu'il ne prévoit pas davantage que le défaut ou l'insuffisance d'information préalable de l'employeur relative à la procédure de reconnaissance de l'accident du travail soient sanctionnés par la nullité de ladite procédure ou l'inopposabilité à l'employeur de la décision de prise en charge ; qu'en déclarant néanmoins inopposable à la société Manpower la décision de prise en charge de l'accident du travail et du décès de Mme Y... pour méconnaissance par la Caisse de son obligation d'information, la cour d'appel a violé l'article R.441-11 du Code de la sécurité sociale ;

3 / que l'article R.441-11 du Code de la sécurité sociale ne précise pas quelle forme doit revêtir l'information qu'il met à la charge de la Caisse, préalablement à sa décision, sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de faire grief ; que la communication du dossier de la Caisse, prévue par l'article R.441-13 du Code de la sécurité sociale suppose une demande expresse de l'employeur antérieure à la décision de reconnaissance de la maladie professionnelle ; que les juges du fond ne pouvaient donc, pour apprécier le manquement éventuel de la Caisse à son obligation d'information de l'employeur, se fonder uniquement sur la communication tardive, par la Caisse, des éléments ayant servi de fondement à sa décision de prise en charge ; qu'en statuant ainsi sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'employeur n'était pas suffisamment informé de l'instruction de l'accident du travail de son salarié par l'enquête administrative menée au sein de l'entreprise par la Caisse au cours de laquelle il n'avait émis aucune réserve et avait pu faire connaître ses observations à l'enquêteur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R.441-11 du Code de la sécurité sociale ;

4 / que pour que l'absence ou l'insuffisance d'information préalable de la Caisse rendent sa décision de prise en charge de la maladie professionnelle inopposable à l'employeur, les juges du fond doivent constater que ce défaut d'information a causé un grief à l'employeur en l'empêchant de contester immédiatement le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie avant la notification du taux d'incapacité attribué à la victime ou du taux de cotisations accident du travail ; que pour déclarer inopposable à la société Manpower la décision de la Caisse admettant la prise en charge de l'accident et du décès de Mme Y..., la cour d'appel s'est bornée à constater que cette décision était susceptible de faire grief à la société ; qu'en statuant par ce motif hypothétique sans relever que le manquement de la Caisse aurait empêché l'employeur de contester immédiatement le caractère professionnel de l'accident avant la notification du taux de cotisations accident du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R.441-11 du Code de la sécurité sociale ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article R.441-11, alinéa 1er, du Code de la sécurité sociale que la caisse primaire d'assurance maladie, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision ;

Et attendu que la cour d'appel a relevé que la caisse primaire d'assurance maladie s'est bornée à aviser l'employeur de sa contestation initiale, puis de sa décision de prise en charge, et n'a communiqué que postérieurement à celle-ci les éléments qui l'avaient motivée ; qu'elle en a exactement déduit que la Caisse n'avait pas satisfait à son obligation d'information et que sa décision était inopposable à la société employeur ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Caisse primaire d'assurance maladie de Vienne aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la Caisse primaire d'assurance maladie de Vienne à payer à la société Manpower France la somme de 1 500 euros ; rejette la demande de la Caisse primaire d'assurance maladie de Vienne ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 01-19052
Date de la décision : 19/12/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Procédure - Procédure préliminaire - Appréciation du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie - Obligation préalable d'information de l'employeur par la caisse - Nécessité .

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Maladies professionnelles - Dispositions générales - Prestations - Attribution - Décision de la caisse - Opposabilité à l'employeur - Condition

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Prestations - Attribution - Décision de la caisse - Décision de refus - Décision postérieure de prise en charge - Information de l'employeur - Défaut - Portée

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Prestations - Attribution - Décision de la caisse - Obligations préalables de la caisse - Défaut - Portée

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Procédure - Procédure préliminaire - Appréciation du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie - Avis de clôture de l'enquête - Communication à l'employeur - Moment - Portée

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Procédure - Procédure préliminaire - Appréciation du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie - Eléments pris en compte - Communication à l'employeur - Défaut - Portée

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Procédure - Procédure préliminaire - Appréciation du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie - Respect du principe de contradiction - Nécessité

Il résulte de l'article R. 441-11, alinéa 1 du Code de la sécurité sociale, que la caisse primaire d'assurance maladie avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision (arrêts n°s 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7). Une cour d'appel qui a relevé que l'employeur n'ayant pas été appelé à participer à l'enquête administrative et que la CPAM s'était bornée à l'aviser de sa contestation initiale et de ses décisions de prise en charge et d'attribution de rente en a exactement déduit que la caisse n'avait pas satisfait à son obligation d'information, et que ses décisions étaient inopposables à l'employeur (arrêts n°s 1 et 2). Justifie légalement son arrêt la cour d'appel qui, ayant relevé que la caisse avait avisé l'employeur de son refus de prendre en charge la maladie professionnelle puis sans en informer celui-ci avait pris une décision en sens contraire, a décidé que cette prise en charge était inopposable à l'employeur (arrêt n° 3). Une cour d'appel qui a relevé que préalablement à sa décision de prise en charge la CPAM ne justifiait ni avoir adressé à l'employeur le double de la déclaration de maladie professionnelle ni lui avoir communiqué les éléments d'information justificatifs, et qui a déclaré la prise en charge inopposable à l'employeur, a légalement justifié son arrêt (arrêts n° 4 et 7). Encourt la cassation l'arrêt qui estime que la caisse avait rempli son obligation d'information alors qu'elle avait pris sa décision avant même d'envoyer à l'employeur un avis de clôture d'enquête l'informant qu'il pouvait prendre connaissance du dossier (arrêt n° 5). Est dès lors légalement justifé l'arrêt qui, ayant constaté que la caisse n'avait pas avisé l'employeur des éléments recueillis au cours de l'enquête et susceptibles de lui faire grief, déclare la décision de prise en charge inopposable à l'employeur (arrêt n° 6).


Références :

Code de la sécurité sociale R441-11 al. 1

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 26 juin 2000

A RAPPROCHER : Chambre sociale, 2001-06-14, Bulletin 2001, V, n° 223, p. 177 (cassation) et les arrêts cités ; Chambre sociale, 2001-12-20, Bulletin 2001, V, n° 398, p. 321 (cassation partielle sans renvoi) ; Chambre sociale, 2002-02-28, Bulletin 2002, V, n° 81, p. 74 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 déc. 2002, pourvoi n°01-19052, Bull. civ. 2002 V N° 403 p. 396
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2002 V N° 403 p. 396

Composition du Tribunal
Président : M. Sargos
Avocat général : M. Lyon-Caen.
Rapporteur ?: Plusieurs conseillers rapporteurs :M. Dupuis (arrêts n°s 1 et 2), M. Trédez (arrêts n°s 3, 4, 5, 6, 7).
Avocat(s) : la SCP Célice, Blancpain et Soltner (arrêts n°s 1, 4, 5), la SCP Nicolay et de la nouvelle (arrêt n° 3), la SCP Rouvière et Boutet (arrêts n°s 1, 3, 4, 7), la SCP Gatineau (arrêts n°s 2, 5 et 6), M. Blondel (arrêts n°s 2 et 7), la SCP Peignot et Garreau (arrêt n° 7).

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:01.19052
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