AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt infirmatif attaqué (Besançon, 10 janvier 2001) que, victime de dommages corporels résultant d'une infraction, Mme X... a obtenu le 24 décembre 1991 d'une commission d'indemnisation des victimes d'infraction (CIVI) une indemnité de 620 000 francs comprenant la somme de 400 000 francs au titre de l'incapacité permanente partielle soumise à recours ; qu'ayant sollicité une indemnisation complémentaire en raison de l'aggravation de son état, le Fonds de garantie des victimes d'infraction (le Fonds de garantie), constatant que la victime percevait depuis le 25 mars 1991 une pension d'invalidité, notifiée à l'intéressée le 17 mai 1991, qui s'élevait en capital et arrérages échus à la somme de 328 158 francs, en a alors demandé le remboursement ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir dit qu'elle était redevable envers le Fonds de garantie de cette somme alors, selon le moyen :
1 / que le Fonds de garantie peut demander le remboursement total ou partiel de l'indemnité allouée lorsque la victime obtient, postérieurement au paiement de l'indemnité, du chef du même préjudice une des prestations ou indemnités visées à l'article 706-9 du Code de procédure pénale ; que l'arrêt qui constate qu'elle a reçu le 17 mai 1991 la notification d'une pension d'invalidité, soit avant la décision de la CIVI du 24 décembre 1991, ne pouvait dès lors faire droit à la demande de remboursement formée par le Fonds de garantie sans violer l'article 706-10 du Code de procédure pénale ;
2 / qu'en toute hypothèse la faculté accordée au Fonds de garantie de demander le remboursement de prestations ou indemnités obtenues par la victime après la décision de la CIVI ne peut être mise en oeuvre qu'à concurrence du montant des prestations et indemnités effectivement obtenues par la victime ; qu'elle soutenait notamment qu'elle n'avait en réalité perçu au titre de la pension d'invalidité versée par la CPAM qu'une partie du capital représentatif de la rente ; qu'en ordonnant néanmoins le remboursement d'une somme égale au montant total du capital représentatif de ladite rente, la cour d'appel a violé l'article 706-10 du Code de procédure pénale ;
3 / qu'elle avait soutenu dans ses conclusions d'appel qu'elle n'avait pas perçu le montant du capital représentatif de la rente qui lui était attribué par la CPAM et que le versement des arrérages de la rente était subordonné à une condition de ressources mensuelles devant être inférieures à 23 000 francs de sorte qu'il en résultait une incertitude sur la perception effective de cette rente ; qu'en s'abstenant de rechercher si elle avait vocation, compte tenu de son niveau de ressources actuel et de ses ressources prévisibles, à percevoir l'intégralité de la pension versée par la CPAM, la cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de base légale au regard de l'article 706-10 du Code de procédure pénale ;
Mais attendu que, selon le droit commun de la responsabilité civile, la réparation d'un préjudice doit être intégrale, sans perte ni profit ; qu'il résulte des articles 706-9 et 706-10 du Code de procédure pénale d'une part, qu'en application du premier, la Commission doit tenir compte dans le montant des sommes allouées à la victime des prestations versées par les organismes gérant un régime obligatoire de sécurité sociale dont elle a connaissance, d'autre part, selon le second, que le versement postérieur à la décision de la Commission, du chef du même préjudice, de l'une des prestations ou indemnités visées à l'article 706-9 du même Code autorise le Fonds de garantie à en demander le remboursement ;
Attendu qu'en décidant que, la victime n'ayant pas informé la CIVI malgré l'obligation qui lui en était faite par l'article R. 50-9 du Code précité, il convenait de considérer la connaissance du versement de la pension d'invalidité par le Fonds de garantie et la CIVI au moment de la seconde procédure, la cour d'appel, sans être tenue de répondre à de simples allégations, a, en retenant que le remboursement des arrérages perçus et du capital représentatif devait venir en déduction de la somme allouée par le Fonds de garantie au titre de l'IPP, fait l'exacte application du principe et des textes précités ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande du Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et autres infractions ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille deux.