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10/07/2002 | FRANCE | N°02-83669

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 juillet 2002, 02-83669


REJET du pourvoi formé par :
- X... Michel,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bourges, en date du 16 avril 2002, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises du Cher sous l'accusation de viols et agressions sexuelles aggravés.
LA COUR,
Vu le mémoire produit :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, préliminaire, 181, 186, 204 et suivants du Code de procédure pénale, ensemble violation des principes généraux du d

roit :
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu par...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Michel,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bourges, en date du 16 avril 2002, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises du Cher sous l'accusation de viols et agressions sexuelles aggravés.
LA COUR,
Vu le mémoire produit :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, préliminaire, 181, 186, 204 et suivants du Code de procédure pénale, ensemble violation des principes généraux du droit :
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu partiel et de mise en accusation déférée "sauf à retenir à l'encontre de Michel X... des circonstances aggravantes de minorité de la victime et de personne ayant autorité pour les crimes de viols commis respectivement sur les personnes de Martial Y... et de Bruno Z... et à requalifier en délits d'agressions sexuelles aggravées les tentatives reprochées par ladite ordonnance à l'encontre de David A... et de Jérémy B..." ;
" alors qu'il résulte des principes généraux du droit que la chambre de l'instruction, statuant sur le seul appel du mis en examen d'une ordonnance de non-lieu partiel et de mise en accusation rendue par le juge d'instruction, ne peut aggraver le sort de l'appelant " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, saisie du seul appel de Michel X... contre l'ordonnance du juge d'instruction l'ayant renvoyé devant la cour d'assises sous l'accusation de viols, tentatives d'agressions sexuelles par personne ayant autorité, agressions sexuelles et agressions sexuelles sur mineurs de quinze ans, la chambre de l'instruction, après avoir fait procéder à un supplément d'information, a confirmé l'ordonnance entreprise en retenant pour les crimes de viols les circonstances d'autorité sur l'une des victimes et de minorité de l'autre victime et en requalifiant en délits consommés les tentatives d'agressions sexuelles par personne ayant autorité ;
Attendu qu'en statuant ainsi, les juges du second degré n'ont méconnu aucun des textes visés au moyen ;
Qu'en effet, les chambres de l'instruction sont investies du pouvoir de modifier et de compléter les qualifications données aux faits par le juge d'instruction ;
Qu'ainsi le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 116, 171, 175, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler la mise en examen supplétive de Michel X... en date du 26 octobre 2001 et les actes subséquents ;
" aux motifs que Michel X... fait valoir que la procédure conduite dans le cadre du supplément d'information serait nulle dès lors que le juge d'instruction ne lui aurait pas notifié à l'occasion de sa mise en examen supplétive ses droits de formuler des demandes d'actes ou des requêtes en annulation mais qu'il est de principe que l'observation des formalités prescrites par l'article 116 du Code de procédure pénale ne s'impose qu'à l'occasion de la première comparution devant le juge d'instruction et que Michel X... ne pouvait ignorer les droits qui lui avaient été régulièrement notifiés le 14 janvier 2000 à l'occasion de sa première comparution ;
" alors que, lorsqu'une mise en examen supplétive intervient, comme en l'espèce, à la suite d'un supplément d'information ordonné par la chambre de l'instruction statuant sur appel d'une ordonnance de non-lieu partiel et de mise en accusation, c'est-à-dire postérieurement à l'avis adressé au mis en examen en application de l'article 175, alinéa 2, du Code de procédure pénale, le magistrat instructeur doit impérativement notifier à nouveau au mis en examen les droits qu'il tient de l'article 116 du Code de procédure pénale et que dès lors, en refusant de prononcer l'annulation de la mise en examen supplétive susvisée, la chambre de l'instruction a fait, des textes susvisés, une application de toute évidence erronée " ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 80, 81, 171, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler la mise en examen supplétive de Michel X... en date du 26 octobre 2001 et des actes subséquents ;
" aux motifs que Michel X... fait valoir que le magistrat instructeur a excédé le cadre de sa saisine ; mais que le fait que Michel X... ait été mis en examen supplétivement pour des actes commis à partir de 1982 ne saurait pour autant entraîner la nullité de cette mise en examen qui demeure valable pour la période ayant commencé à courir à la date où le jeune Martial Y... a atteint l'âge de treize ans, soit le 17 décembre 1985 ;
" 1° alors que le juge d'instruction ne peut informer qu'en vertu d'un réquisitoire du procureur de la République ; que dans son mémoire régulièrement déposé, Michel X... faisait valoir qu'il résultait des pièces visées par le réquisitoire introductif qu'en ce qui concerne les faits de viols supposés commis par lui sur la personne de Martial Y..., ils ne pouvaient concerner que la période 1988/1989 et que, par conséquent, en le mettant supplétivement en examen le 26 octobre 2001 du chef de viols sur ce mineur commis courant 1982 à 1986, le magistrat instructeur avait excédé sa saisine et que la chambre de l'instruction, qui par les motifs susvisés reconnaissait expressément le bien-fondé de cette argumentation, ne pouvait, sans excès de pouvoir, refuser d'annuler la mise en examen supplétive susvisée ;
" 2° alors que sont nuls, par voie de conséquence, les actes d'instruction qui procèdent d'actes dont l'annulation a été prononcée dans la même procédure ; qu'il en résulte que lorsque la chambre de l'instruction constate la nullité, fût-elle partielle, d'un acte de la procédure, elle a l'obligation de rechercher s'il existe dans le dossier des actes qui procèdent de l'acte annulé et de les annuler par voie de conséquence et qu'en omettant d'y procéder, la chambre de l'instruction a méconnu le principe susvisé " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'en refusant, par les motifs reproduits aux moyens, d'annuler la mise en examen supplétive de Michel X... ordonnée en exécution d'un supplément d'information, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-22, 222-23 et 222-24 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué, a prononcé la mise en accusation de Michel X... du chef de viols par personne ayant autorité sur la personne de Bruno Z... ;
" alors que le crime de viol suppose l'usage, par son auteur, de violence, menace, contrainte ou surprise ; que cet élément constitutif du crime ne saurait se confondre avec la circonstance aggravante d'autorité et qu'en déduisant dès lors l'existence de la contrainte, déniée par la prétendue victime elle-même, du lien d'autorité hiérarchique entre celle-ci et Michel X..., la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale " ;
Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-22 et 222-27 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la mise en accusation de Michel X... du chef d'agressions sexuelles sur la personne de Sébastien C... :
" alors que le délit d'agressions sexuelles suppose l'usage par son auteur de violence, menace, contrainte ou surprise ; que cet élément, qui suppose une action positive et consciente blâmable de l'auteur des faits, n'est pas caractérisé par la seule constatation du déséquilibre entre la corpulence de celui-ci et celle de la victime prétendue et qu'en faisant exclusivement état dans sa décision, pour caractériser l'élément de contrainte, d'un tel déséquilibre entre la corpulence de Michel X... et celle de Sébastien C..., la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation des articles 332 de l'ancien Code pénal, 222-22, 222-23 et 222-24 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la mise en accusation de X... du chef de viols sur la personne de Y..., mineur de 15 ans ;
" alors que le crime de viol suppose l'usage par son auteur de violence, menace, contrainte ou surprise ; que l'insistance de l'auteur des actes de pénétration à obtenir les faveurs de la victime prétendue ne saurait être assimilée ni à la violence, ni à la menace, ni à la contrainte, ni à la surprise et que la chambre de l'instruction qui constatait expressément dans sa décision que Martial Y... avait reconnu "s'être laissé faire et que si Michel X... se montrait insistant, il ne l'avait jamais menacé", ne pouvait, sans méconnaître la nature des éléments constitutifs précité du crime de viol, prononcer la mise en accusation de Michel X... du chef susvisé " ;
Sur le septième moyen de cassation, pris de la violation des articles 332 de l'ancien Code pénal, 121-3, 222-22, 222-23 et 222-27 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que la chambre de l'instruction a prononcé la mise en accusation de Michel X... des chefs de viols aggravés et agressions sexuelles dont certaines aggravées ;
" aux motifs, d'une part, que comme l'a fait judicieusement remarqué le magistrat instructeur dans son ordonnance frappée d'appel, il apparaît que Michel X... a mis en oeuvre un stratagème répétitif de nature à surprendre le consentement des victimes pour abuser progressivement d'elles dès leur plus jeune âge et, par surprise, les conduire à subir progressivement ses exigences jusqu'à, pour certaines d'entre elles, des actes de pénétration sexuelle ; que nonobstant l'âge précoce des premiers abus imposés aux victimes, Michel X... gagnait leur confiance par l'instauration de relations avec leurs pareils de même que des relations de fausse camaraderie ; que, sauf à inciter les individus désireux de satisfactions sexuelles pédophiles à initier des relations avec des victimes les plus jeunes en âge, donc les plus maniables et à les orienter progressivement vers les pratiques sexuelles complètes souhaitées, le consentement des victimes pré-adolescentes ou adolescentes invoqué par Michel X... ne saurait lui valoir exonération tant il était vicié par ses approches, ses initiations et ses abus antérieurs qui constituaient de véritables conditionnements ;
" au motif, d'autre part, que les passages à l'acte de Michel X... répondent à des scenarii inconscients ou lui-même et ses victimes étaient investis d'une dimension paternelle, maternelle, narcissique ou fraternelle ;
" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la mise en accusation de Michel X... du chef de viols sur la personne de Martial Y..., mineur de quinze ans ;
" 1° alors que les infractions de viols et d'agressions sexuelles supposent l'usage, par l'auteur des faits, de violence, contrainte, menace ou surprise et qu'une prétendue politique de conditionnement progressive des victimes par l'instauration de rapports de camaraderie avec celle-ci et de relations avec leur parents, ne caractérise pas un tel usage ;
" 2° alors que la chambre de l'instruction ne pouvait, sans se contredire, faire état dans sa décision d'une prétendue politique de conditionnement concertée des victimes pour constater, à l'inverse, que les passages à l'acte de Michel X... répondaient à des scenarii inconscients, les deux notions étant nécessairement exclusives l'une de l'autre ;
" 3° alors qu'il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre ou que la notion de "scenarii inconscients" est exclusive par elle-même de toute intention criminelle ou délictuelle " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les motifs de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction, après avoir exposé les faits et répondu comme elle le devait aux articulations essentielles du mémoire dont elle était saisie, a relevé l'existence de charges qu'elle a estimé suffisantes contre Michel X... pour ordonner son renvoi devant la cour d'assises sous l'accusation de viols et agressions sexuelles aggravés ;
Qu'en effet, les juridictions d'instruction apprécient souverainement si les faits retenus à la charge de la personne mise en examen sont constitutifs d'une infraction, la Cour de cassation n'ayant d'autre pouvoir que de vérifier si, à supposer ces faits établis, la qualification justifie la saisine de la juridiction de jugement ;
Que, dès lors, les moyens ne peuvent qu'être écartés ;
Et attendu que la procédure est régulière et que les faits, objet principal de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-83669
Date de la décision : 10/07/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - Pouvoirs - Etendue - Ordonnance de mise en accusation - Appel de la seule personne mise en examen - Possibilité de retenir de nouvelles circonstances aggravantes et de requalifier les faits après supplément d'information.

INSTRUCTION - Ordonnances - Appel - Appel de la personne mise en examen - Ordonnance de mise en accusation - Possibilité de retenir de nouvelles circonstances aggravantes et de requalifier les faits après supplément d'information - Chambre de l'instruction - Pouvoirs - Etendue

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - Pouvoirs - Qualification - Qualification donnée aux faits par le ministère public ou le juge d'instruction - Modification

Les chambres de l'instruction sont investies du pouvoir de modifier et de compléter les qualifications données aux faits par le juge d'instruction. A justifié sa décision la chambre de l'instruction qui, saisie du seul appel du mis en examen contre l'ordonnance de mise en accusation a, après supplément d'information, retenu contre ce dernier pour les crimes de viols les circonstances d'autorité sur l'une des victimes et de minorité sur l'autre victime et requalifié en délits consommés les tentatives d'agressions sexuelles. (1).


Références :

Code de procédure pénale 181, 186, 204

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges (chambre de l'instruction), 16 avril 2002

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : criminel 1985-10-02, Bulletin criminel 1985, n° 291 (1), p. 750 (cassation) ;

Chambre criminelle, 1990-01-09, Bulletin criminel 1990, n° 15, p. 36 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 jui. 2002, pourvoi n°02-83669, Bull. crim. criminel 2002 N° 149 p. 543
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2002 N° 149 p. 543

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Cotte
Avocat général : Avocat général : Mme Commaret.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Ponroy.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Piwnica et Molinié.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:02.83669
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