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10/07/2002 | FRANCE | N°00-40209

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 juillet 2002, 00-40209


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que Mme X..., salariée de la Société d'hygiène dermatologique de Vichy, aux droits de laquelle a succédé la Société des laboratoires industriels de Vichy (LIDV), s'est trouvée en arrêt de travail pour maladie en 1994 ; que, le 5 mars 1995, la salariée a été à nouveau en arrêt de travail, pour maladie à l'issue duquel le médecin du travail l'a déclarée, les 17 et 31 mars 1998, définitivement inapte à son poste de travail, sans possibilité de reclassement dans l'entreprise ; que l'employeur a licen

cié Mme X... pour inaptitude à l'emploi et impossibilité de reclassement ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que Mme X..., salariée de la Société d'hygiène dermatologique de Vichy, aux droits de laquelle a succédé la Société des laboratoires industriels de Vichy (LIDV), s'est trouvée en arrêt de travail pour maladie en 1994 ; que, le 5 mars 1995, la salariée a été à nouveau en arrêt de travail, pour maladie à l'issue duquel le médecin du travail l'a déclarée, les 17 et 31 mars 1998, définitivement inapte à son poste de travail, sans possibilité de reclassement dans l'entreprise ; que l'employeur a licencié Mme X... pour inaptitude à l'emploi et impossibilité de reclassement ; que la salariée a alors saisi la juridiction prud'homale en vue d'obtenir la condamnation de l'employeur au paiement de diverses indemnités ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt (Riom, 16 novembre 1999), de l'avoir condamné au paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse , alors, selon le moyen :
1 / qu'en se bornant à constater que la société LIDV faisait partie d'un groupe plus important comportant d'autres sociétés en France et en Europe dont il n'était pas établi qu'elles aient été contactées, sans rechercher si ces sociétés, compte tenu de leurs activités, de leur organisation et de leur lieu d'exploitation permettaient la permutation de tout ou partie du personnel, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 122-24-4 du Code du travail ;
2 / que la loi n'impose à l'employeur aucun formalisme particulier quant à la manière dont il doit satisfaire à son obligation de reclassement à l'intérieur du groupe ; que, dès lors, la cour d'appel, en imposant à la société de procéder à cette obligation par envoi postal ou par télécopie, a méconnu les dispositions de l'article L. 122-24-4 du Code du travail ;
3 / que la production par l'employeur de courriers datés et signés faisant état de l'absence de poste disponible dans le groupe suffit à démontrer qu'il a fait preuve de diligence dans la mise en oeuvre de son obligation de reclassement ; qu'il appartient, dès lors, à la salariée qui soutient que ces courriers auraient été établis après coup d'en rapporter la preuve ; que la cour d'appel, en statuant comme elle l'a fait, a renversé la charge de la preuve, violant ainsi les dispositions de l'article 1315 du Code civil ;
4 / que l'employeur, dans le cadre de son obligation de reclassement, est tenu de communiquer les éléments objectifs de nature à permettre d'assurer au mieux le reclassement du salarié ; que figure au nombre de ces éléments l'âge de la salariée et la durée de sa suspension ; que, dès lors, la cour d'appel, en décidant que la présentation du dossier de la salariée la défavorisait, a méconnu les dispositions de l'article 1134 du Code civil et de l'article L. 122-24-4 du Code du travail ;
5 / qu'il résulte de l'article R 241-56 du Code du travail que le médecin du travail ne peut communiquer le dossier médical d'un salarié qu'aux médecins régionaux du travail et de la main d'oeuvre ou, à la demande de l'intéressé, au médecin de son choix ; que, dès lors, en reprochant à l'employeur de ne pas avoir accompagné le dossier concernant le reclassement de la salariée, d'indications tirées de son dossier médical, la cour d'appel a violé l'article susvisé ainsi que l'article 9 du Code civil ;
6 / que le dossier de la salariée indiquait qu'elle avait occupé successivement les emplois d'esthéticienne, d'attachée de clientèle et de préparatrice de commande ; que, dès lors, la cour d'appel, en énonçant que ce dossier ne contenait pas de précisions suffisantes sur le profil de carrière de l'intéressée, a dénaturé ce document en violation de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que, s'il est exact qu'en vertu des articles 9 du Code civil, 4 et 96 du Code de déontologie des médecins issu du décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 et R 241-56 du Code du travail, le dossier médical d'un salarié, couvert par le secret médical qui s'impose au médecin qui le tient, ne peut en aucun cas être communiqué à son employeur qui ne ne peut, dès lors, se voir reprocher une absence de transmission d'informations tirées de ce dossier, le motif de la cour d'appel, critiqué par la cinquième branche du moyen suivant lequel la société aurait dû transmettre des informations tirées du dossier médical de Mme X... est surabondant dès lors que l'arrêt attaqué constate que l'employeur n'avait pas tenu les engagements pris devant les représentants du personnel de proposer à la salariée un poste adapté à ses capacités et qu'il appartenait à un groupe important de sociétés qui n'avaient pas été contactées en vue du reclassement de l'intéressée ;
qu'au vu de ces seuls motifs, la cour d'appel a pu décider, sans encourir les autres griefs du moyen, que l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur le deuxième moyen :
Attendu que l'employeur fait encore grief l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la salariée des dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1147 du Code civil, alors, selon le moyen :
1 / que l'article L. 122-24-4 du Code du travail prévoit que si le salarié n'a pas été reclassé dans l'entreprise à l'issue du délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise, ou s'il n'est pas licencié, l'employeur est tenu de verser à l'intéressé, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail ; que cette disposition exclut dès lors que l'employeur soit condamné à des dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1147 du Code civil en cas de méconnaissance de ses obligations ; que, dès lors, la cour d'appel, en statuant comme elle l'a fait, a méconnu les dispositions de l'article susvisé ;
2 / qu'en se bornant à constater que la salariée aurait dû être employée à un poste assis et sans manutention, ce qui ne correspondait pas aux spécifications de son emploi, sans rechercher quelles étaient les conditions effectives dans lesquelles la salariée effectuait ses tâches et alors de surcroît qu'elle avait relevé ne disposer d'aucune indication sur les conditions de travail exactes de la salariée au cours de la dernière période, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
3 / que la cour d'appel, qui a constaté que la salariée ne démontrait pas qu'il existait un lien de causalité entre l'aggravation de son état et le non-respect par l'employeur des prescriptions légales mais s'est toutefois reconnue en mesure d'évaluer le préjudice moral subi par la salariée, formule dont il résulte qu'elle a indemnisé un préjudice autre que moral, n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, violant ainsi l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté que l'employeur, malgré l'avis du médecin du travail du 20 décembre 1994, prescrivant pour la salariée un poste assis sans manutention, l'avait maintenue à son poste dans des conditions incompatibles avec son état de santé jusqu'au 5 mars 1995, date à laquelle elle s'est trouvée à nouveau en arrêt de travail ; qu'elle a pu décider que l'employeur avait commis une faute causant à l'intéressée un préjudice dont elle a souverainement apprécié le montant ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le troisième moyen, tel qu'il figure au mémoire reproduit en annexe :
Attendu que l'employeur fait enfin grief à l'arrêt de l'avoir condamné à rembourser à l'ASSEDIC les indemnités de chômage perçues par la salariée ;
Mais attendu que le moyen est inopérant, la cour d'appel s'étant bornée à faire application de l'article L. 122-14-4 du Code du travail ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Laboratoires industriels de Vichy aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de l'ASSEDIC de la région Auvergne ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00-40209
Date de la décision : 10/07/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL, REGLEMENTATION - Hygiène et sécurité - Médecine du travail - Documents médicaux - Communication - Bénéficiaires - Détermination - Portée .

PROFESSIONS MEDICALES ET PARAMEDICALES - Médecin du travail - Secret professionnel - Domaine d'application - Documents médicaux - Communication - Bénéficiaires - Détermination - Portée

PROTECTION DES DROITS DE LA PERSONNE - Respect de la vie privée - Atteinte - Révélation de faits couverts par le secret médical - Communication à l'employeur du dossier médical du salarié

SECRET PROFESSIONNEL - Secret médical - Violation - Applications diverses

En vertu des articles 9 du Code civil, 4 et 96 du Code de déontologie des médecins issu du décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 et R. 241-56 du Code du travail, le dossier médical d'un salarié, couvert par le secret médical qui s'impose au médecin qui le tient, ne peut en aucun cas être communiqué à son employeur. Il s'ensuit qu'un employeur ne peut se voir reprocher une absence de transmission d'informations tirées de ce dossier.


Références :

Code civil 9
Code de déontologie des médecins 4, 96
Code du travail R241-56
Décret 95-1000 du 06 septembre 1995

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 16 novembre 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 jui. 2002, pourvoi n°00-40209, Bull. civ. 2002 V N° 251 p. 245
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2002 V N° 251 p. 245

Composition du Tribunal
Président : M. Sargos .
Avocat général : M. Lyon-Caen.
Rapporteur ?: M. Liffran.
Avocat(s) : la SCP Waquet, Farge et Hazan, la SCP Boullez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:00.40209
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