Sur le moyen unique :
Vu l'article 12 de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie, ensemble l'article 544 du Code civil ;
Attendu que la déclaration d'utilité publique d'une distribution d'énergie confère au concessionnaire, sous les conditions et réserves spécifiées, le droit d'établir à demeure des supports et ancrages pour conducteurs aériens d'électricité, soit à l'extérieur des murs ou façades donnant sur la voie publique soit sur les toits et terrasses des bâtiments, de faire passer les conducteurs d'électricité au-dessus des propriétés privées, d'établir à demeure des canalisations souterraines ; que l'exécution desdits travaux n'entraîne aucune dépossession ; que la pose d'appuis sur les murs ou façades ou sur les toits ou terrasses des bâtiments ne peut faire obstacle au droit du propriétaire de démolir, réparer ou surélever ; que la pose des canalisations ou supports dans un terrain ouvert et non bâti ne fait pas non plus obstacle au droit du propriétaire de se clore ou de bâtir ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 30 novembre 1999), que les époux X...et les époux Y... (consorts X...-Y...), qui avaient acquis des parcelles en vertu d'un acte notarié mentionnant l'existence d'une servitude constituée par le passage d'une ligne électrique dépendant du réseau de l'établissement public Electricité de France (EDF), y ont entrepris le creusement de deux étangs ; que, contraint de déplacer les poteaux supportant la ligne dont la stabilité était menacée par la mise en eau, EDF a assigné les propriétaires en paiement du coût de l'opération ;
Attendu que pour accueillir la demande, l'arrêt retient que l'article 12 de la loi du 15 juin 1906 concilie le droit pour le concessionnaire d'établir à demeure les supports des conducteurs d'électricité sur les immeubles bâtis ou non bâtis et le principe selon lequel le propriétaire de l'immeuble n'est pas dépossédé en l'absence d'expropriation, qu'il s'ensuit que si le propriétaire veut démolir, réparer ou surélever l'immeuble bâti ou clore et bâtir sur le terrain ouvert et non bâti, le concessionnaire doit modifier ou déplacer les ouvrages et supports des conducteurs à ses frais, qu'en revanche, si le propriétaire fait un acte non énuméré à l'article 12 ayant pour conséquence de remettre en cause l'établissement à demeure des supports et par la même l'existence de la servitude, il doit supporter les frais de remise en état ou de déplacement des supports, que tel est le cas en l'espèce puisque les consorts X...-Y..., en créant des étangs, ont procédé à des travaux d'excavation qui ne peuvent être considérés comme étant l'édification d'un bâtiment ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le droit conféré au concessionnaire bénéficiaire de la déclaration d'utilité publique ne peut faire obstacle au droit du propriétaire d'opérer des modifications de sa propriété conformes à son utilisation normale, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 novembre 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon.