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10/04/2002 | FRANCE | N°00-14941

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 10 avril 2002, 00-14941


Sur le premier moyen :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Caen, 7 mars 2000), que M. X... exploitant 174 hectares disposant de quotas betteraviers, a pris à bail en 1974, 47 hectares appartenant à M. Y... ; que la production correspondant aux quotas consentis était livrée à la société Générale sucrerie, devenue la société Saint-Louis sucre ; que M. Y... a, à compter du 29 septembre 1992, repris les terres qu'il avait données à bail pour les exploiter personnellement ; qu'il a demandé à la commission mixte de la sucrerie de Cagny de procéder à une répartition des quotas entr

e les exploitations de M. X... et celle qu'il reprenait ; que M. X... s...

Sur le premier moyen :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Caen, 7 mars 2000), que M. X... exploitant 174 hectares disposant de quotas betteraviers, a pris à bail en 1974, 47 hectares appartenant à M. Y... ; que la production correspondant aux quotas consentis était livrée à la société Générale sucrerie, devenue la société Saint-Louis sucre ; que M. Y... a, à compter du 29 septembre 1992, repris les terres qu'il avait données à bail pour les exploiter personnellement ; qu'il a demandé à la commission mixte de la sucrerie de Cagny de procéder à une répartition des quotas entre les exploitations de M. X... et celle qu'il reprenait ; que M. X... s'est opposé au transfert d'une partie de ses quotas à son ancien bailleur et l'a assigné ; que la société Saint-Louis sucre a, en raison du litige, consigné les sommes dues proportionnellement à la superficie concernée par le transfert en cause ; que M. X... l'a également assignée ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que les droits betteraviers seront répartis comme fixé par la commission mixte, alors, selon le moyen :
1° que si le règlement CEE n° 1009/67 du Conseil du 18 décembre 1967, puis le règlement CEE n° 1785/81 du Conseil du 30 juin 1981, ont bien prévu l'intervention d'accords interprofessionnels, s'agissant des rapports entre les fabricants de sucre et les producteurs de betteraves, il ne ressort pas de ces règlements qu'ils aient renvoyé à un accord interprofessionnel, s'agissant des rapports entre exploitants successifs (afférents à une reprise de terres consécutives à la venue d'un bail à échéance), distincts des rapports entre les fabricants de sucre et les producteurs de betteraves ; qu'en tant que l'arrêt s'est fondé sur les règlements en cause, pour admettre que l'article 12 des accords interprofessionnels avait été pris par une autorité compétente, les juges du fond ont violé ces règlements ;
2° que le règlement CEE n° 206/68 du 20 février 1968 et le règlement CEE n° 741/75 du Conseil du 18 mars 1975, relatifs aux seuls rapports entre les fabricants de sucre et les producteurs de betteraves n'ont pas davantage autorisé l'intervention d'un accord professionnel en ce qui concerne les rapports entre exploitants successifs (afférents à une reprise de terres consécutives à la venue à échéance d'un bail) ; qu'en tant qu'elle s'est fondée sur ces règlements, pour considérer comme licite l'article 12 des accords interprofessionnels, la cour d'appel a violé lesdits règlements ;
3° que si dans ces considérants, ainsi que dans son article 13, le règlement CEE n° 206/68 du Conseil du 20 février 1968 a permis que les accords interprofessionnels traitent des matières étrangères au règlement, c'est bien évidemment sous la condition qu'un texte prévoie l'intervention d'un accord interprofessionnel dans le domaine étranger au règlement ; qu'en tant qu'ils ont fondé la licéité de l'article 12 des accords interprofessionnels sur le règlement susvisé, les juges du fond l'ont de nouveau violé ;
4° que si l'article 2 du décret n° 69-308 du 3 avril 1969 a renvoyé aux dispositions de la loi n° 64-678 du 6 juillet 1964, sous réserve d'adaptation, pour que des accords interprofessionnels puissent être pris en exécution des règlements communautaires, le décret n° 69-308 du 3 avril 1969 ne confère pas la possibilité aux accords interprofessionnels de prendre parti sur des questions étrangères aux règlements communautaires ; qu'en tant qu'ils se sont fondés sur l'article 2 du décret n° 69-308 du 3 avril 1969 pour considérer l'article 12 des accords interprofessionnels comme licite, les juges du fond ont violé ce texte ;
5° que les articles 9 à 13 de la loi n° 64-678 du 6 juillet 1964 relatifs aux conventions de campagne aujourd'hui codifiés aux articles L. 631-12 à L. 631-18 du Code rural, n'autorisent pas davantage les accords interprofessionnels, pris en application des règlements communautaires, à régir les rapports entre exploitants successifs (afférents à une reprise de terres consécutives à la venue d'un bail à échéance) ; qu'en tant que l'arrêt s'est fondé sur ces textes pour considérer l'article 12 des accords interprofessionnels comme licite, il doit être regardé comme les ayant violés ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a exactement relevé qu'il résultait des articles 13 du règlement communautaire du Conseil du 20 février 1968 et 1er du règlement communautaire du Conseil du 18 mars 1975 que la répartition entre les vendeurs des quantités de betteraves que le fabricant décide d'acheter avant les ensemencements pour la fabrication de sucre dans les limites du quota de base était du ressort des accords professionnels ;
Attendu, d'autre part, que la cour d'appel qui a relevé que les dispositions de la loi du 6 juillet 1964 laissait aux accords interprofessionnels le soin de fixer les règles particulières à chaque produit et, par conséquent, à l'accord interprofessionnel betterave-sucre, les règles de répartition et de transfert des quotas betteraviers, en a exactement déduit que les dispositions de l'accord interprofessionnel en cause avaient été prises de manière régulière tant au regard du droit communautaire que du droit national ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que les droits betteraviers seront répartis comme fixé par la Commission mixte, alors, selon le moyen :
1° que le droit de production et de livraison d'une certaine quantité de betteraves, communément dénommé quota betteravier, est détenu par l'exploitant ; que M. X... poursuivant son exploitation, nonobstant la reprise de certaines terres par M. Y..., les quotas betteraviers devaient lui rester acquis ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé le règlement CEE n° 1009/67 du Conseil du 18 décembre 1967 et notamment ses articles 6 et 30, le règlement CEE n° 206/68 du Conseil du 20 février 1968 et notamment son article 13, le règlement CEE n° 3330/74 du Conseil du 19 décembre 1974, le règlement CEE n° 741/75 du Conseil du 18 mars 1975 et notamment son article 1er, le règlement CEE n° 1785/81 du conseil du 30 juin 1981, et notamment son article 7, ensemble l'article 544 du Code civil ;
2° qu'en tout cas, si même les quotas betteraviers sont attachés au sol, dès lors qu'un exploitant titulaire de quotas betteraviers prend à bail des terres qui en sont dépourvues, il doit conserver l'intégralité de ses quotas betteraviers à l'échéance du bail dès lors qu'il continue d'exploiter nonobstant la reprise ; qu'à cet égard également, l'arrêt attaqué a été rendu en violation du règlement CEE n° 1009/67 du Conseil du 18 décembre 1967 et notamment de ses articles 6 et 30, du règlement CEE n° 206/68 du Conseil du 20 février 1968 et notamment de son article 13, du règlement CEE n° 3330/74 du Conseil du 19 décembre 1974, du règlement CEE n° 741/75 du Conseil du 18 mars 1975 et notamment de son article 1er, du règlement CEE n° 1785/81 du Conseil du 30 juin 1981 et notamment de son article 7, ensemble de l'article 544 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel qui a exactement relevé que le quota betteravier était attaché à l'exploitation et non à l'exploitant, a, abstraction faite d'un motif surabondant, retenu que ce quota qui n'est pas individualisé à la parcelle, est attribué à une exploitation quel que soit le statut juridique des parcelles composant celle-ci, propriété ou location et quel que soit le quota dont elles pouvaient ou ne pouvaient être originairement porteuses ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que les droits betteraviers seront répartis comme fixé par la commission mixte, alors, selon le moyen,
1° que la question était soulevée de savoir si la perte par l'exploitant, par suite de la reprise des terres consécutive à l'échéance du bail, des quotas betteraviers dont il était titulaire lors de l'entrée dans les lieux, à raison de l'exploitation qu'il avait précédemment constituée et qu'il continuait à gérer, n'était pas contraire aux règles constitutionnelles garantissant le droit de propriété ; qu'en s'abstenant de répondre à cette question, comme ils y étaient invités, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;
2° que faute d'avoir recherché si la solution qu'ils retenaient n'était pas contraire au droit communautaire, en tant qu'il garantit le droit de propriété, les juges du fond, qui appliquaient une réglementation d'origine communautaire, ont privé leur décision de base légale au regard du principe de droit communautaire garantissant le droit de propriété ;
Mais attendu qu'ayant exactement retenu que l'obtention d'un quota betteravier était de nature incorporelle et suivait le sort de l'exploitation de telle sorte que le transfert de tout ou partie de l'exploitation entraînait nécessairement transfert des droits correspondants sans qu'il y ait atteinte au droit de propriété, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a, répondant aux conclusions, légalement justifié sa décision de ce chef ;
Par ces motifs :
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 00-14941
Date de la décision : 10/04/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

AGRICULTURE - Production agricole - Production saccharifère - Quotas betteraviers - Répartition - Exploitants successifs - Accords professionnels - Validité .

COMMUNAUTE EUROPEENNE - Agriculture - Production saccharifère - Quotas betteraviers - Répartition entre exploitants - Accords professionnels nationaux - Validité

La cour d'appel qui relève exactement qu'il résulte des articles 13 du règlement communautaire du Conseil du 20 février 1968 et 1er du règlement communautaire du Conseil du 18 mars 1975 que la répartition des quotas betteraviers est du ressort des accords professionnels auxquels les dispositions de la loi du 6 juillet 1964 laissent le soin de fixer les règles particulières à chaque produit, en déduit justement que les dispositions d'un accord professionnel réglant le sort des quotas entre exploitants successifs ont été prises de manière régulière tant au regard du droit communautaire que du droit national.


Références :

Loi 64-678 du 06 juillet 1964
Règlement CEE 206/68 du 20 février 1968 art. 13
Règlement CEE 741/75 du 18 mars 1975 art. 1

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 07 mars 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 10 avr. 2002, pourvoi n°00-14941, Bull. civ. 2002 III N° 83 p. 72
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2002 III N° 83 p. 72

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Weber .
Avocat général : Avocat général : M. Baechlin.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Peyrat.
Avocat(s) : Avocats : M. Foussard, la SCP Célice, Blancpain et Soltner, la SCP Peignot et Garreau.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:00.14941
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