La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/04/2002 | FRANCE | N°98-15193

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 03 avril 2002, 98-15193


Attendu, selon l'arrêt déféré (Lyon, 27 février 1998), que par acte sous seing privé du 22 février 1991, M. X... s'est porté caution solidaire des engagements de la société RAI (la société), dont il était le gérant, envers la Banque populaire de Lyon (la banque), à concurrence d'une somme de 250 000 francs ; que le compte courant de la société présentant un solde débiteur, la banque a informé la société, le 25 janvier 1993, de son intention de mettre fin aux facilités de caisse, lettre à laquelle la société a répondu le 16 février 1993, sous la signature de son gér

ant ; que, par la suite, la banque a escompté deux lettres de change revenue...

Attendu, selon l'arrêt déféré (Lyon, 27 février 1998), que par acte sous seing privé du 22 février 1991, M. X... s'est porté caution solidaire des engagements de la société RAI (la société), dont il était le gérant, envers la Banque populaire de Lyon (la banque), à concurrence d'une somme de 250 000 francs ; que le compte courant de la société présentant un solde débiteur, la banque a informé la société, le 25 janvier 1993, de son intention de mettre fin aux facilités de caisse, lettre à laquelle la société a répondu le 16 février 1993, sous la signature de son gérant ; que, par la suite, la banque a escompté deux lettres de change revenues impayées à leurs échéances ; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a assigné la caution en exécution de son engagement ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... reproche à l'arrêt de l'avoir condamné, en qualité de caution d'une société en liquidation judiciaire, à payer à la banque la somme de 250 000 francs et, pour ce faire, d'avoir écarté ses conclusions soutenant que la déclaration de créance était nulle pour n'avoir pas été faite par une personne habilitée à cet effet, alors, selon le moyen, que les copies d'actes, même certifiées conformes, lorsque le titre original subsiste, ne font foi que de ce qui est contenu au titre dont la représentation peut toujours être exigée ; qu'en déclarant que la délégation de pouvoir prétendument donnée à un préposé de la banque pour effectuer la déclaration de créance était établie par la production aux débats d'une copie de l'extrait d'un compte rendu de réunion du conseil d'administration certifié conforme par le secrétaire général de la banque, sans ordonner, comme elle y était pourtant invitée, la production de l'original de cette délégation, la cour d'appel a violé l'article 1334 du Code civil ;

Mais attendu que M. X... n'ayant pas contesté, dans ses conclusions d'appel, l'existence de l'original de la délégation de pouvoir ni précisé en quoi la copie ne serait pas conforme à l'original, la cour d'appel, qui a retenu qu'aucun élément objectif ne permettait de mettre en cause l'authenticité de la délibération du conseil d'administration qui avait donné l'autorisation à M. Y... d'effectuer les déclarations de créance, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. X... reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la banque une somme de 250 000 francs et, pour ce faire, d'avoir écarté ses conclusions soutenant que les deux lettres de change tirées par la débitrice, escomptées par la banque et impayées à leur échéance, étaient nulles pour ne pas mentionner le nom du bénéficiaire, alors, selon le moyen :

1° que la lettre de change doit, à peine de nullité, contenir notamment, outre la signature du tireur, le nom du bénéficiaire ; que le seul fait pour le tireur de signer l'effet au recto et au verso ne suffit pas, en l'absence de toute autre manifestation de volonté clairement exprimée sur le titre, de faire du tireur le bénéficiaire ; qu'en retenant que les titres litigieux portaient tant au recto qu'au verso le cachet accompagné de la signature du gérant de la société débitrice, dont il était constant qu'elle était le tireur, et que ces mentions suffisaient à l'identification du bénéficiaire, la cour d'appel a entaché sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article 110 du Code de commerce ;

2° que M. X... faisait valoir que la lettre de change d'un montant de 320 000 francs portait au recto non seulement la signature du tireur mais également la mention " BNP ", en sorte qu'il ne pouvait être déduit que le tireur en aurait été le bénéficiaire ; qu'en délaissant ces conclusions déterminantes, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif en méconnaissance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt, répondant par là même aux conclusions prétendument omises, retient que les effets de commerce litigieux portent tant au recto qu'au verso le cachet de la société RAI accompagné de la signature de son gérant et que ces mentions suffisent à l'identification du bénéficiaire des effets ; qu'ainsi, la cour d'appel a pu en déduire que l'indication du bénéficiaire sur les effets satisfaisait aux exigences des articles 110, 111 et 117 du Code de commerce, devenus les articles L. 511-1, L. 511-2 et L. 511-8 du même Code ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le troisième moyen, pris en ses cinq branches :

Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la banque la somme de 250 000 francs, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure, alors, selon le moyen :

1° qu'il avait fait valoir que la banque ne justifiait pas avoir donné une " ligne de caution " à la société débitrice qui n'en avait d'ailleurs nul besoin ; qu'en interprétant la lettre de la banque du 25 janvier 1993, qui indiquait réduire à 100 000 francs la ligne de caution, en ce sens qu'il se serait agi d'une caution donnée par le créancier au débiteur et non de celle donnée par M. X... au premier, sans répondre à ses conclusions selon lesquelles la banque n'avait jamais accordé sa caution à la société débitrice, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif en méconnaissance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

2° que le fait que la débitrice principale fût caution de ses propres dettes ne se conçoit pas, en sorte que si M. X... avait écrit la lettre du 16 février 1993 en qualité de dirigeant de la société débitrice en proposant des modalités de réduction du découvert de la personne morale, il l'avait également rédigée, comme déclaré à juste titre par les premiers juges, en son nom personnel en ce qu'il y indiquait ne pouvoir donner de caution sans facilité de caisse, l'engagement visé ne pouvant être que le sien propre ; qu'en affirmant que cette lettre n'aurait émané que du gérant de la société, la cour d'appel l'a dénaturée en violation de l'article 1134 du Code civil ;

3° qu'en indiquant dans son courrier du 16 février 1993 : " Nous ne pouvons vous donner de caution sans facilité de caisse ", M. X... avait ainsi clairement manifesté son intention de révoquer son engagement sans distinguer le solde débiteur du compte courant du montant d'effets escomptés et impayés à leur échéance ; qu'en déduisant de cette lettre que la révocation était seulement limitée au solde du compte courant et qu'il n'était pas établi que M. X... eût dénoncé le cautionnement général qu'il avait donné, la cour d'appel l'a dénaturée en violation de l'article 1134 du Code civil ;

4° que la créance portée en compte courant perd son individualité pour ne devenir qu'un article du compte, en sorte que le montant d'effets de commerce escomptés, impayés à leur échéance mais contrepassés, et ainsi porté au débit du compte courant devient partie intégrante de son solde débiteur ; que, dès lors qu'il était constant et reconnu par la banque qu'elle avait contrepassé les traites par elle escomptées et impayées à leur échéance, la révocation du cautionnement, à supposer même qu'elle eût été limitée au solde débiteur du compte courant, incluait bien le montant de ces effets qui avait été inscrit au débit du compte ; qu'en décidant que cette révocation ne concernait pas les titres escomptés par la banque et impayés à leur échéance, méconnaissant par là même la nature de la convention de compte courant, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 2015 du Code civil ;

5° que si le contrat à durée indéterminée peut être résilié unilatéralement et sans préavis, lorsque l'auteur de la résiliation a cependant précisé qu'elle prendrait effet sous certaines conditions, celles-ci doivent être respectées ; qu'ayant admis implicitement mais nécessairement que la révocation du cautionnement de M. X... devait prendre effet à la date à laquelle le compte courant de la société débitrice ne serait plus débiteur, le juge, dès lors qu'il a constaté qu'au 8 mars 1993, le compte courant de la société n'était plus débiteur, ne pouvait déclarer que les conditions stipulées n'avaient pas été remplies, par cela seul qu'ultérieurement il le serait redevenu ; qu'en se prononçant comme elle a fait, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 2015 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient, répondant par là même en les écartant aux conclusions invoquées, que dans les pratiques bancaires les plus habituelles, une ligne de caution désigne non pas les garanties personnelles apportées par des tiers aux obligations du client mais la garantie donnée par la banque au bénéfice de tiers ; qu'ainsi, la cour d'appel a satisfait aux exigences du texte cité à la première branche ;

Attendu, en second lieu, qu'après avoir relevé que le découvert dont bénéficiait la société n'avait pas été apuré dans le délai annoncé, le compte courant continuant à présenter des soldes débiteurs élevés, l'arrêt retient, dans l'exercice du pouvoir souverain d'interprétation, que les conditions mises par M. X... à la dénonciation de sa garantie dans la lettre du 16 février 1993 n'ont jamais été réalisées, puisque le compte a continué à fonctionner à découvert, sauf à une date isolée, et en déduit que cette lettre ne valait pas dénonciation du cautionnement ; qu'en l'état de ces seuls motifs, abstraction faite de ceux surabondants critiqués par les deuxième, troisième et quatrième branches, la cour d'appel a, sans dénaturation, légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Par ces motifs :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 98-15193
Date de la décision : 03/04/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

EFFET DE COMMERCE - Lettre de change - Mentions nécessaires - Bénéficiaire - Identification - Cachet de la société tireur - Condition suffisante .

EFFET DE COMMERCE - Lettre de change - Mentions nécessaires - Nom du bénéficiaire - Défaut - Cachet de la société tireur - Identification suffisante du bénéficiaire - Portée

A légalement justifié sa décision au regard des articles 110, 111 et 117 du Code de commerce devenus les articles L. 511-1, L. 511-2 et L. 511-8 du même Code la cour d'appel qui a écarté la nullité d'effets de commerce en raison du défaut de mention du nom du bénéficiaire après avoir relevé que ces effets portaient tant au recto qu'au verso le cachet de la société tireur accompagné de la signature de son gérant et que ces mentions suffisaient à l'indication du bénéficiaire.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 27 février 1998

A RAPPROCHER : Chambre commerciale, 1970-11-09, Bulletin 1970, IV, n° 297, p. 260 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 03 avr. 2002, pourvoi n°98-15193, Bull. civ. 2002 IV N° 65 p. 68
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2002 IV N° 65 p. 68

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Dumas .
Avocat général : Avocat général : M. Viricelle.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Graff.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, la SCP Coutard et Mayer.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:98.15193
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award