Donne acte, d'une part à la Société civile de perception et de distribution des droits des artistes interprètes de la musique et de la danse (SPEDIDAM), au Syndicat national des artistes musiciens de France (SNAM), d'autre part au Syndicat national de l'édition phonographique (SNEP) de leurs interventions ;
Attendu que la société nationale de télévision France 2 (France 2) a incorporé dans le générique d'une émission, diffusée ensuite à dix reprises pendant l'été 1995, des extraits d'un phonogramme produit et publié à fins de commerce par la société Emi Records Ltd UK (la société Emi) ; que celle-ci, soutenant qu'il y avait eu reproduction puis diffusion non autorisées et préjudiciables, a assigné France 2 en réparation ; que l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 26 octobre 1999) a accueilli sa demande ;
Sur le premier moyen :
Attendu que France 2 fait grief à la cour d'appel d'avoir dit que l'incorporation litigieuse, en ce qu'elle avait été faite sans l'autorisation du producteur, violait l'article L. 213-1, alinéa 2, du Code de la propriété intellectuelle qui la prévoit, sans avoir répondu à ses conclusions soulignant que son adversaire n'avait pas qualité pour demander l'application de la loi du 3 juillet 1985 à un phonogramme fixé pour la première fois hors de France et avant l'entrée en vigueur dudit texte ;
Mais attendu que le moyen contredit les écritures d'appel par lesquelles France 2 avait conclu à la soumission du litige à ce même texte ; qu'il ne peut donc être accueilli ;
Sur les trois autres moyens, pris en leurs diverses branches :
Attendu qu'il est aussi reproché à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le deuxième moyen :
1° que l'incorporation d'un phonogramme du commerce sur la piste sonore d'un programme audiovisuel n'en réalise pas une reproduction mise à la disposition du public, mais constitue seulement un acte technique préalable et non détachable de la radiodiffusion de la séquence de son fixée par le producteur, lequel ne peut s'opposer à cette radiodiffusion des oeuvres des auteurs, sauf à violer les articles L. 211-1, L. 213-1 et L. 214-1 du Code de la propriété intellectuelle ;
2° qu'ainsi analysée elle doit, à peine de violation, donner lieu à la rémunération équitable prévue par le dernier de ces textes ;
Alors, selon le troisième moyen :
1° que ni l'article 12 de la Convention internationale sur la protection des artistes interprètes ou exécutants, des producteurs de phonogrammes et des organismes de radiodiffusion faite à Rome le 26 octobre 1961, ni l'article 8-2 de la directive du 19 novembre 1992, relative au droit de location et de prêt et à certains droits voisins du droit d'auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle, ne subordonnent à l'autorisation du producteur, seulement habilité à percevoir une rémunération équitable, la radiodiffusion d'un phonogramme publié à des fins de commerce ou sa reproduction sur la piste sonore d'un programme télévisé, et qu'en décidant au contraire que le paiement de cette rémunération n'excluait pas de requérir également l'autorisation préalable de producteur, la cour d'appel a violé, outre lesdits textes, l'article 55 de la Constitution ;
2° qu'elle aurait méconnu que la reproduction d'un phonogramme du commerce aux fins de sa radiodiffusion n'avait fait l'objet d'aucune réserve de la France au regard de la Convention de Rome et que cette dernière ne souffre de dérogations à ses dispositions protectrices des producteurs de phonogrammes que notifiées par les Etats signataires, violant ainsi ses articles 16, 21 et 31 ;
3° qu'elle aurait ignoré que c'est seulement dans l'intérêt commun des artistes interprètes que la Convention ou la directive précitées permettent aux législations nationales d'ajouter aux protections qu'elles prévoient, violant ainsi les articles 12 et 21 de la première, et 8-2 de la seconde ;
4° qu'elle aurait violé ces mêmes dispositions par son refus de rechercher si, en excluant du régime de la licence légale la diffusion d'un phonogramme reproduit sur la bande son d'une émission télévisée, faveur exclusive n'était pas faite aux seuls producteurs, ainsi rendus aptes, par leur puissance économique, à se rendre maîtres de l'utilisation secondaire des phonogrammes au détriment des artistes interprètes désormais privés du partage par moitié de la rémunération imposée par l'article L. 214-1 du Code de la propriété intellectuelle ;
Alors, selon le quatrième moyen :
1° qu'ayant retenu que l'incorporation d'un phonogramme sur la piste sonore d'un programme audiovisuel et sa diffusion échappaient aux utilisations couvertes par le principe de la rémunération prévue à l'article L. 214-1 du Code de la propriété intellectuelle, la cour d'appel a violé l'article 4 de la décision prise par la commission instituée par l'article L. 214-4 du même Code et fixant une rémunération due par les sociétés de télévision d'après le taux d'utilisation des phonogrammes par rapport à la totalité des programmes audiovisuels diffusés sans distinction tirée de leur mode d'utilisation ;
2° qu'en n'ayant pas recherché si les travaux parlementaires préparatoires à la loi du 3 juillet 1985 n'excluaient pas que celui qui utilise un phonogramme du commerce comme élément constitutif indissociable de l'image d'un programme audiovisuel ait à en répondre devant le producteur pour n'avoir pas obtenu son autorisation, et si ainsi n'était pas violé le droit de chacun, garanti par l'article 6.1 de la Convention européennes de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de pouvoir déterminer avec clarté les conditions dans lesquelles il peut être attrait devant un juge ;
Mais attendu, sur la première branche du deuxième moyen, que les juges du fond, ayant constaté que l'enregistrement litigieux avait été effectué par incorporation, dans le vidéogramme, du phonogramme commercial qui le contenait, ont exactement décidé que cette utilisation ne figurait pas au nombre des dérogations apportées par l'article L. 214-1 du Code de la propriété intellectuelle au principe d'autorisation du producteur posé par l'article L. 213-1 du même Code ; que le moyen n'est donc pas fondé ;
Attendu, sur la seconde branche du deuxième moyen, les troisième et quatrième branches du troisième moyen et la première branche du quatrième moyen, que la cour d'appel, qui s'est prononcée sur les droits de la société Emi en raison de la reproduction non autorisée de son phonogramme, n'a pas statué sur la situation faite aux artistes interprètes ou aux auteurs, dont elle n'était pas saisie ; que le moyen est donc inopérant ;
Attendu, encore, sur les deux premières branches du troisième moyen, que les textes internationaux visés ni ne tiennent en échec la faculté laissée aux législations nationales par la directive communautaire du 19 novembre 1992 de prévoir, pour les titulaires des droits voisins du droit d'auteur, des dispositions plus protectrices que celles de son article 8-2, ni n'éludent les articles 12 et 21 de la Convention de Rome, aux termes desquels les producteurs jouissent du droit exclusif et préalable d'autoriser la reproduction directe ou indirecte de leurs phonogrammes, sans que ses dispositions puissent par ailleurs porter atteinte à la protection dont ils pourraient bénéficier autrement ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu, enfin, sur la seconde branche du quatrième moyen, qu'ayant ainsi fait une exacte application des articles L. 213-1 et L. 214-1 du Code de la propriété intellectuelle, la cour d'appel ne saurait se voir reprocher de ne s'être pas livrée à une recherche qui relevait de sa liberté quant aux méthodes d'interprétation de la loi ; que le moyen est dépourvu de toute pertinence ;
Par ces motifs :
REJETTE le pourvoi.