Vu leur connexité, joint les pourvois n°s 00-60.426 et 00-60.427 ;
Attendu qu'à la suite d'une réorganisation de ses services en directions régionales, la société Alcatel réseaux d'entreprise Ouest, faute d'être parvenue à un accord unanime avec les syndicats intéressés, a saisi le tribunal d'instance d'une demande de reconnaissance de la qualité d'établissement distinct à la direction régionale de Nantes en vue du renouvellement et de l'élection des délégués du personnel dans les limites de cette région et, par voie de conséquence, de reconnaissance de ce que les établissements retenus lors des précédentes élections n'avaient plus la qualité d'établissement distinct en application des articles L. 421-1 et L. 423-4 du Code du travail ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le syndicat CGT du personnel de la société Alcatel réseaux d'entreprise et M. X... font grief au jugement attaqué (tribunal d'instance de Nantes, 27 septembre 2000) de s'être déclaré territorialement compétent pour statuer sur la demande de la société ARE tendant à faire reconnaître la qualité d'établissement distinct pour l'organisation des élections des délégués du personnel de l'établissement de ladite société situé à Nantes, alors, selon le moyen, qu'en décidant qu'il importait peu que la région Ouest constituant le ressort géographique de cet établissement dépasse les limites de sa compétence territoriale, le seul fait que le siège soit dans le ressort dudit tribunal étant suffisant à lui donner compétence, le juge du fond a méconnu les conséquences de sa décision et l'exception d'incompétence qui était soulevée ; qu'en effet, les syndicats CGT n'ont jamais soutenu que le tribunal d'instance de Nantes n'avait pas compétence pour statuer sur la qualité d'établissement distinct d'un établissement ayant son siège à Nantes d'autant que cette qualité d'établissement distinct lui était déjà acquise ; qu'il n'est pas contesté que le tribunal de Nantes est compétent territorialement pour étendre le ressort géographique de l'établissement de Nantes ; qu'en revanche, le premier juge ne pouvait écarter l'exception d'incompétence concernant son pouvoir de juger la perte de qualité d'établissement distinct, d'établissements préexistants situés hors de son ressort de compétence ; seul le Tribunal du ressort du siège de l'établissement concerné par la perte de la qualité d'établissement distinct pouvait statuer sur celle-ci ; que, par ailleurs, la perte de qualité d'établissement distinct sollicitée par la société Alcatel résulte d'une réorganisation globale soumise à une négociation centrale et à une consultation centrale des organes représentatifs du personnel, une bonne administration de la justice devant conduire à retenir éventuellement comme compétent le tribunal d'instance de Colombes, siège de la société ARE ;
Mais attendu que la voie de la cassation n'étant ouverte que lorsque les autres sont fermées, le moyen dirigé contre le jugement qui rejette l'exception d'incompétence et statue en premier et dernier ressort sur le fond est irrecevable ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles L. 421-1, L. 423-4 du Code du du travail et 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour faire droit à la demande de la société ARE, le tribunal d'instance retient essentiellement qu'il résulte des facteurs particuliers propres au fonctionnement des services de l'entreprise que les salariés bénéficient dans la région Ouest de la présence d'un représentant de l'employeur utile pour répondre des réclamations éventuelles et que la notion de proximité évoquée par M. X..., représentant de la CGT, n'est pas, au regard de la jurisprudence, un critère déterminant ; que c'est la notion d'échelon utile, propre à répondre aux revendications des salariés, qui doit servir de référence au juge statuant sur la notion d'établissement distinct ; que la notion d'existence d'une collectivité de travail, qui n'est pas discutée en l'espèce, ajoutée à la présence manifeste d'un représentant de l'employeur habilité, au vu de la délégation de pouvoir, à trancher les réclamations des salariés, constituent les deux caractéristiques de la notion d'établissement distinct satisfaite en l'espèce par l'établissement régional Alcatel réseaux d'entreprise Ouest (direction régionale de Nantes) ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la reconnaissance d'un établissement distinct à Nantes n'entraînait pas en soi la disparition des autres établissements distincts de la région Ouest tels qu'ils avaient été reconnus précédemment en 1998, le tribunal d'instance, qui s'est borné à reconnaître les éléments caractérisant selon lui l'établissement distinct de Nantes sans expliquer en quoi les autres établissements préexistants avaient perdu leur autonomie, a privé sa décison de base légale légale ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 27 septembre 2000, entre les parties, par le tribunal d'instance de Nantes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Saint-Nazaire.