La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/10/2001 | FRANCE | N°00-87320

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 octobre 2001, 00-87320


CASSATION sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Ignacio,
- la société Le Monde, civilement responsable,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 2 novembre 2000, qui, dans la procédure suivie contre le premier pour diffamation publique envers un particulier, a statué sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 29 et 32, alinéa 1er, de la loi du 29 juillet 1991, 591 et 593 du Code procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de

motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué, informant partie...

CASSATION sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Ignacio,
- la société Le Monde, civilement responsable,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 2 novembre 2000, qui, dans la procédure suivie contre le premier pour diffamation publique envers un particulier, a statué sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 29 et 32, alinéa 1er, de la loi du 29 juillet 1991, 591 et 593 du Code procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué, informant partiellement la décision des premiers juges, a retenu l'existence d'une diffamation publique commise à l'encontre de Sam Y... ;
" aux motifs que l'article fait grief à Sam Y... d'avoir collaboré avec les Khmers rouges au sein de deux instances politiques mises en place dans le cadre du rétablissement de l'indépendance nationale et de la démocratie ; que Sam Y..., qui nie avoir participé à ces instances, estime le mot collaboré diffamatoire à son égard ; que le tribunal a interprété ce verbe comme signifiant coopéré et n'y a pas vu de signification péjorative ; que, toutefois, la partie civile observe à juste titre que Le Monde diplomatique est essentiellement destiné à un public français que l'on peut qualifier d'averti, qui souhaite avoir des informations complètes et des analyses approfondies dans le domaine de la vie politique internationale ; que, s'agissant du Cambodge, dont la population a subi un martyre sous un régime totalitaire, le mot collaboré évoque fatalement, chez le lecteur du Monde diplomatique, des événements de la Seconde Guerre mondiale et revêt une charge symbolique très forte ; qu'aux yeux de la Cour, en indiquant que Sam Y... a collaboré avec les Khmers rouges au sein de deux instances politiques, le journaliste laisse entendre qu'au-delà d'un souci de réconciliation nationale Sam Y... est en réalité un partisan des Khmers rouges, partage leur engagement et soutient leur action ; que cette allégation, compte tenu de l'opprobre jeté sur le mouvement khmer rouge à la suite de la révélation du génocide, présente un caractère diffamatoire ;
" alors que, s'agissant d'un article consacré à la question de la réconciliation nationale au Cambodge, la Cour, ayant elle-même relevé que l'imputation faite à la partie civile d'avoir collaboré avec les Khmers rouges concernait leur participation commune à deux instances politiques mises en place pour le rétablissement de l'indépendance nationale et de la démocratie et donc postérieurement au drame du génocide, ne pouvait, dès lors, sans dénaturer le sens et la portée de cet article, considérer que le terme collaboré évoquait fatalement chez le lecteur, qu'elle qualifie a fortiori d'averti, la collaboration telle qu'elle avait pu exister en France au cours de la Seconde Guerre mondiale et suggérait que Sam Y... ait pu être un partisan des Khmers rouges dont il aurait partagé leur engagement et soutenu leur action " ;
Vu les articles 29 et 32 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu qu'il appartient à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle sur le point de savoir si, dans les propos retenus dans la prévention, se retrouvent les éléments légaux de la diffamation publique tels qu'ils sont définis par les articles 29 et 32 de la loi précitée ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Sam Y... a fait citer directement devant le tribunal correctionnel, Ignacio X..., directeur de publication du journal Le Monde diplomatique ainsi que la société civilement responsable, du chef de diffamation publique envers un particulier, à raison de la publication d'un article " des Khmers rouges encombrants et convoités " ;
Attendu que, pour infirmer le jugement ayant débouté la partie civile de ses demandes, les juges du second degré relèvent que l'article en cause, qui s'adresse à un public de lecteurs avertis, fait notamment grief à Sam Y... d'avoir collaboré avec les Khmers rouges au sein de deux instances politiques mises en place dans le cadre du rétablissement de l'indépendance nationale et de la démocratie ; que les juges retiennent que le journaliste laisse entendre qu'au-delà du souci de réconciliation nationale Sam Y... est en réalité un partisan des Khmers rouges, partage leur engagement et soutient leur action ; qu'ils en déduisent que cette allégation, compte tenu de l'opprobre jeté sur le mouvement khmer rouge à la suite de la révélation du génocide, présente un caractère diffamatoire ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi alors que l'imputation faite à la partie civile d'avoir collaboré avec les Khmers rouges, dans des instances visant à la réconciliation nationale au Cambodge, ne portait pas atteinte à son honneur ou à sa considération, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens proposés :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions, l'arrêt précité de la cour d'appel de Paris, en date du 2 novembre 2000 ;
Et attendu qu'il ne reste rien à juger ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 00-87320
Date de la décision : 16/10/2001
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PRESSE - Diffamation - Atteinte à l'honneur ou à la considération - Contrôle de la Cour de cassation.

Il appartient à la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur le point de savoir si, dans les propos retenus dans la prévention, se retrouvent les éléments légaux de la diffamation publique tels qu'ils sont définis par les articles 29 et 32 de la loi du 29 juillet 1881. Ainsi, ne portent pas atteinte à l'honneur et à la considération des propos qui imputent à un dirigeant politique d'avoir collaboré avec les Khmers rouges au sein d'instances mises en place en vue d'une réconciliation nationale au Cambodge. .


Références :

Loi du 29 juillet 1881 art. 12, art. 29

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 novembre 2000


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 16 oct. 2001, pourvoi n°00-87320, Bull. crim. criminel 2001 N° 210 p. 674
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2001 N° 210 p. 674

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Cotte
Avocat général : Avocat général : Mme Commaret.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Karsenty.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Piwnica et Molinié.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:00.87320
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award