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16/10/2001 | FRANCE | N°00-83543

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 octobre 2001, 00-83543


CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X..., épouse Y..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 16 mars 2000, qui, dans l'information suivie contre Z... du chef de viol, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction constatant l'extinction de l'action publique.
LA COUR,
Vu l'article 575, alinéa 2, 3° du Code de procédure pénale ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 80, 81, 86 et 593 du Code de procédure pénale, 11

3-6, 113-7, 113-8 du Code pénal, 692 du Code de procédure pénale, défaut de m...

CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X..., épouse Y..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 16 mars 2000, qui, dans l'information suivie contre Z... du chef de viol, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction constatant l'extinction de l'action publique.
LA COUR,
Vu l'article 575, alinéa 2, 3° du Code de procédure pénale ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 80, 81, 86 et 593 du Code de procédure pénale, 113-6, 113-7, 113-8 du Code pénal, 692 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de refus d'informer du magistrat instructeur, ayant déclaré prescrite l'action publique engagée à l'encontre de Z..., à raison de faits commis par ce dernier aux Etats-Unis en 1977 et pour lesquels il a été condamné par les juridictions de l'Ohio, sans que sa peine ait été exécutée en raison de sa fuite ;
" aux motifs que le juge d'instruction tient des dispositions de l'article 82 du Code de procédure pénale le pouvoir de ne pas suivre les réquisitions du Parquet quel qu'en soit l'objet ; qu'à la date de la dénonciation officielle des faits à la France, le 4 octobre 1990, la prescription de l'action publique de 10 ans était acquise depuis le 25 avril 1990, date de l'arrêt de la cour suprême rejetant le recours de Z..., la décision du juge Hanna du 31 mars 1981, décernant mandat d'arrêt contre lui et ordonnant l'exécution de la peine, constituant un acte d'exécution ; que la fuite à l'étranger de Z... ne constituait pas un obstacle de droit mettant le Parquet dans l'impossibilité de poursuivre l'action publique ;
" alors, d'une part, que le juge d'instruction ne peut prendre de décision de refus d'informer que lorsqu'il est saisi sur le réquisitoire pris au vu d'une plainte avec constitution de partie civile ; qu'en l'occurrence la chambre d'accusation a violé l'article 86 du Code de procédure pénale ;
" alors, d'autre part, que les actes de poursuite ou d'instruction effectués par les autorités judiciaires étrangères sont interruptifs de prescription en France ; que constitue un acte interruptif une décision judiciaire par laquelle le juge étranger de première instance, saisi à nouveau en vertu des règles applicables dans son pays après épuisement des voies de recours portant exclusivement sur la culpabilité, se prononce à nouveau sur la peine infligée au coupable et en ordonne l'exécution ; que la partie civile faisait valoir dans son mémoire, régulièrement déposé, que dans l'Etat de l'Ohio les recours ne portent que sur la culpabilité ou sur le droit et que le juge de première instance, à qui le dossier est renvoyé après exercice de ces recours, conserve la possibilité de modifier la peine qu'il avait, à l'origine, prononcée de façon provisoire ; qu'ainsi, la décision du juge Hanna du 31 mars 1981 ne se bornait pas à ordonner l'exécution de la peine, mais fixait celle-ci de façon définitive et avait donc le caractère d'un acte interruptif de prescription ; qu'en s'abstenant de répondre à cette articulation essentielle du mémoire et d'examiner les certificats de coutumes délivrés par les autorités américaines et versés au dossier, attestant des pouvoirs du juge de première instance en pareille hypothèse, la chambre d'accusation a privé sa décision de toute base légale ;
" alors, par ailleurs et en toute hypothèse, qu'à supposer que la décision du 31 mars 1981 eût pour seul objet d'ordonner l'exécution de la peine préalablement prononcée et de lever ainsi l'effet suspensif de cette peine, cette décision avait un effet interruptif de l'action publique ;
" alors, enfin, que la prescription de l'action publique ne court que du jour où l'autorité de poursuite est en mesure de connaître les faits et de prendre une décision sur l'opportunité de poursuivre ; que si, en matière de crime, la poursuite en France des infractions commises à l'étranger n'est pas légalement subordonnée à la dénonciation des faits par l'autorité étrangère, il n'en demeure pas moins que le Parquet français, avant la dénonciation des faits par les autorités américaines le 4 octobre 1990, n'avait aucun moyen de connaître les faits commis aux Etats-Unis sur une américaine ; que la prescription n'a donc pu courir qu'à compter de cette date " ;
Et sur le moyen complémentaire, pris de la violation des articles 80, 81, 86, 7 et 593 du Code de procédure pénale, 113-6, 113-7, 113-8 du Code pénal, 692 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de refus d'informer du magistrat instructeur, ayant déclaré prescrite l'action publique engagée à l'encontre de Z..., à raison de faits commis par ce dernier aux Etats-Unis en 1977 pour lesquels il a été condamné par les juridictions de l'Ohio, sans que sa peine ait été exécutée en raison de sa fuite ;
" aux motifs que la décision du juge Hanna du 31 mars 1981 décernant mandat d'arrêt contre Z..., l'exécution de la peine préalablement prononcée étant ordonnée, constitue, au même titre que l'ordre d'arrestation délivré le 13 juillet 1981, un acte d'exécution ;
" alors, d'une part, que, faute de s'être interrogée sur l'exacte portée en droit de l'Etat de l'Ohio, de la confirmation de la peine par l'acte du 31 mars 1981, et de l'étendue des pouvoirs du juge lors de cette confirmation, la chambre d'accusation n'a pas donné de base légale à sa décision ;
" alors, d'autre part, que l'ordre d'arrestation du 13 juillet 1981 sollicitait la comparution de Z... pour répondre aux accusations de vol aggravé et viol ; qu'il s'agissait donc d'un acte interruptif de l'action publique ;
" alors, enfin et en toute hypothèse, que, dans l'hypothèse où un Etat étranger, dont les juridictions ont condamné un individu pour un crime et n'ont pu faire exécuter la peine prononcée à son encontre, demande aux autorités françaises, l'individu s'étant réfugié sur le territoire français et n'étant pas extradable en raison de la nationalité française, de le poursuivre à raison des mêmes faits, les actes d'exécution de la peine tentés par les autorités étrangères doivent être, au regard de la prescription de l'action publique en France, considérés comme interruptifs de cette prescription " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu les articles 113-6 et 113-9 du Code pénal ;
Attendu qu'il résulte de ces textes qu'un Français, définitivement jugé à l'étranger pour un crime commis hors du territoire de la République, peut être poursuivi en France pour les mêmes faits si la peine prononcée par la juridiction étrangère n'est pas prescrite ;
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Z..., poursuivi pour un viol commis dans l'Etat d'Ohio le 21 décembre 1977 sur la personne de X..., épouse Y..., a été reconnu coupable par une décision des autorités judiciaires américaines devenue définitive le 25 avril 1980 par le rejet du recours de l'intéressé qui a pris la fuite alors qu'il exécutait sa peine ; que, le 31 mars 1981, le juge de l'État de l'Ohio a décerné contre lui mandat d'arrêt ;
Attendu qu'ayant appris que Z... s'était réfugié en France et serait de nationalité française, les autorités judiciaires des Etats-Unis ont dénoncé les faits aux autorités françaises ; que le procureur de la République, après avoir vérifié la nationalité de l'intéressé, a requis, le 8 janvier 1999, l'ouverture d'une information ;
Attendu que, par ordonnance du 31 mars 1999, le juge d'instruction a constaté l'extinction de l'action publique en raison de la prescription décennale ;
Attendu que, pour confirmer cette décision, la chambre d'accusation retient qu'aucun acte interruptif de prescription n'est intervenu entre la condamnation, devenue définitive le 25 avril 1980, et la dénonciation officielle des faits à la France, le 4 octobre 1990 ;
Mais, attendu qu'en prononçant ainsi alors que la prescription de la peine n'était pas acquise lors de la dénonciation des faits, la chambre d'accusation a méconnu les textes susvisés et le principe sus-énoncé ;
Que, dès lors, la cassation est encourue,
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 16 mars 2000, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris autrement composée.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 00-83543
Date de la décision : 16/10/2001
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CRIMES ET DELITS COMMIS A L'ETRANGER - Crime - Condamnation prononcée à l'étranger - Action publique - Prescription (non).

ACTION PUBLIQUE - Extinction - Interruption - Infraction commise par un Français à l'étranger - Condamnation à l'étranger

LOIS ET REGLEMENTS - Application dans l'espace - Infraction commise hors du territoire de la République - Crime commis par un Français - Condamnation prononcée à l'étranger - Action publique - Prescription (non)

Un Français, définitivement jugé à l'étranger pour un crime commis hors du territoire de la République et qui a pris la fuite avant d'exécuter sa peine, peut être poursuivi en France pour les mêmes faits si la peine prononcée n'est pas prescrite. Encourt la censure la chambre d'accusation qui, après avoir constaté que la personne poursuivie avait été définitivement condamnée à l'étranger et s'était évadée en cours de peine, a refusé d'informer au motif que les faits ont été dénoncés aux autorités françaises après le délai de prescription de l'action publique, alors qu'il lui appartenait de rechercher si la prescription de la peine était acquise. (1).


Références :

Code pénal 113-6, 113-9

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (chambre d'accusation), 16 mars 2000

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1985-05-28, Bulletin criminel 1985, n° 201 (1°), p. 511 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1997-10-21, Bulletin criminel 1997, n° 344, p. 1141 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1998-01-27, Bulletin criminel 1998, n° 39, p. 81 (cassation sans renvoi).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 16 oct. 2001, pourvoi n°00-83543, Bull. crim. criminel 2001 N° 209 p. 671
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2001 N° 209 p. 671

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Cotte
Avocat général : Avocat général : Mme Commaret.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Anzani.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:00.83543
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