Sur le premier et le troisième moyens réunis ;
Vu l'article 4, alinéa 2, de l'ordonnance n° 86-1134 du 21 octobre 1986, alors en vigueur ;
Attendu qu'en application de ce texte, les sommes versées en vertu d'un accord d'intéressement ne peuvent se substituer à aucun élément du salaire en vigueur dans l'entreprise ;
Attendu que, le 21 novembre 1988, un accord salarial a été conclu entre la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de la Réunion (CRCAMR) et les organisations syndicales prévoyant le paiement par étapes, à partir de 1989, d'un demi-mois de salaire supplémentaire au personnel, payable au mois de septembre de chaque année ; que, par un avenant à cet accord conclu, le 17 septembre 1990, par les syndicats signataires de l'accord initial et l'employeur cette prime a été supprimée ; que, concomitamment, les mêmes organisations syndicales et l'employeur ont passé un accord d'intéressement aux résultats et à l'amélioration de la productivité pour une durée de trois ans à compter de l'exercice ouvert le 1er janvier 1990 ; que M. X..., salarié de la CRCAMR, soutenant qu'en violation des dispositions de l'ordonnance du 21 octobre 1986, l'accord d'intéressement s'était substitué à un élément de rémunération résultant de l'accord du 21 novembre 1988, a saisi la juridiction prud'homale en réclamant le paiement de rappel de salaire pour les années 1990 à 1995 au titre de l'accord du 21 novembre 1988 ;
Attendu que, pour rejeter la demande du salarié, la cour d'appel énonce qu'il est établi que la prime prévue par l'accord salarial du 21 novembre 1988 a été supprimée, que cette suppression est conforme aux dispositions de l'article L. 132-8 du Code du travail, que, dès lors, la prime ayant cessé de présenter un caractère obligatoire, l'accord d'intéressement ne réalisait pas une substitution prohibée ;
Attendu, cependant, qu'il résulte des constatations faites par la cour d'appel que l'accord d'intéressement a été conclu en même temps que celui supprimant la prime ; que cette simultanéité réalisait la substitution prohibée d'un accord d'intéressement à un élément de salaire ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 avril 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée.