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23/03/2001 | FRANCE | N°98-19018

France | France, Cour de cassation, Assemblee pleniere, 23 mars 2001, 98-19018


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 2 juillet 1998), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 11 décembre 1996, Bull. 1996, III, n° 238, p. 155), que par acte du 21 février 1900, M. Y... a vendu la partie centrale d'un terrain lui appartenant et l'a grevé de deux zones non aedificandi sur une distance de deux mètres à partir des lignes divisoires intérieures Est et Ouest ; que M. Z..., devenu propriétaire de ce lot, a édifié une construction de la ligne divisoire Est à la ligne divisoire Ouest ; que M. A..., propriétaire du lot contigu, situé à l'est de celui de M.

Z..., a, par acte du 11 mars 1991, assigné M. Z... en démolition...

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 2 juillet 1998), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 11 décembre 1996, Bull. 1996, III, n° 238, p. 155), que par acte du 21 février 1900, M. Y... a vendu la partie centrale d'un terrain lui appartenant et l'a grevé de deux zones non aedificandi sur une distance de deux mètres à partir des lignes divisoires intérieures Est et Ouest ; que M. Z..., devenu propriétaire de ce lot, a édifié une construction de la ligne divisoire Est à la ligne divisoire Ouest ; que M. A..., propriétaire du lot contigu, situé à l'est de celui de M. Z..., a, par acte du 11 mars 1991, assigné M. Z... en démolition des ouvrages édifiés sur les zones non aedificandi Est et Ouest, sous peine d'astreinte ; que M. Z... a invoqué l'extinction de la servitude du fait d'un acte contraire, consistant dans l'édification d'un garage sur la zone non aedificandi Ouest, avant 1960 ; que M. A... étant décédé en cours d'instance, celle-ci a été reprise par Mme A..., MM. Pierre-Marie et Yves-Marie A... (les consorts A...) ; que le Tribunal a accueilli la demande des consorts A... ; que M. Z... a fait appel du jugement ; que par arrêt du 13 décembre 1994, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a confirmé le jugement ; qu'après cassation de cet arrêt, devant la cour d'appel de renvoi, les consorts A... ont seulement demandé la démolition des ouvrages édifiés sur la zone non aedificandi Est ; que M. Z... a demandé la condamnation des consorts A... à lui restituer la somme qu'il leur avait réglée en exécution de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. Z... reproche à l'arrêt de lui avoir ordonné de démolir les ouvrages édifiés sur la zone non aedificandi, en limite divisoire Est, sous peine d'une astreinte de 1 000 francs par jour de retard à compter de la signification de cette décision, alors, selon le moyen :

1° que, si l'héritage pour lequel la servitude a été établie vient à être divisé, la servitude reste due pour chaque portion, sans néanmoins que la condition du fonds assujetti soit aggravée ; que dès lors, l'existence d'une construction, pendant trente ans, sur la zone non aedificandi entraînait l'extinction de la servitude dans son ensemble ; qu'en refusant néanmoins de constater l'extinction de la servitude, motif pris de ce que la construction invoquée par M. Z... avait été édifiée à l'Ouest, et que la propriété des consorts A... était située à l'est, les juges du fond ont violé les articles 700, 706 et 707 du Code civil ;

2° que, dès lors que l'absence d'aggravation postule que la servitude puisse s'éteindre à raison de l'édification d'une construction sur un point de la zone non aedificandi, il importe peu qu'un autre point de cette zone soit matériellement distinct de l'assiette de la construction ; qu'en se fondant sur un motif inopérant, les juges du fond ont de nouveau violé les articles 700, 706 et 707 du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt constate que M. Y... avait divisé son fonds en trois parcelles antérieurement à la création de l'interdiction de construire le long des lignes divisoires entre la parcelle centrale et les parcelles voisines ; que, dès lors, le moyen pris de la violation des articles 700 et suivants du Code civil qui postule que la servitude préexiste à la division de l'héritage, n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que M. Z... fait encore le même reproche à l'arrêt, alors, selon le moyen, que l'arrêt comporte une contradiction entre son dispositif et ses motifs ; qu'en effet, si dans son dispositif, l'arrêt fixe l'astreinte à 1 000 francs par jour de retard, les motifs fixent cette même astreinte à 500 francs par jour de retard ;

Mais attendu que la contradiction dénoncée entre le dispositif et les motifs de l'arrêt résulte d'une erreur matérielle qui peut, selon l'article 462 du nouveau Code de procédure civile, être réparée par la Cour de Cassation à laquelle est déféré cet arrêt dont la rectification sera ci-après ordonnée ;

Et sur le troisième moyen :

Attendu que M. Z... reproche enfin à l'arrêt d'avoir refusé d'accueillir sa demande en restitution de la somme qu'il a réglée aux consorts A... en exécution de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, alors, selon le moyen, que dès lors que l'arrêt du 13 décembre 1994, qui portait condamnation à astreinte, avait fait l'objet d'une cassation en toutes ses dispositions, les juges du fond se devaient de condamner les consorts A... à restituer le montant des sommes qui avaient pu être acquittées en exécution de cette astreinte ; qu'en refusant de faire droit à la demande formée par M. Z... en ce sens, les juges du fond ont violé les articles 623 et 625 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt n'a pas statué sur ce chef de demande ; que l'omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du nouveau Code de procédure civile, le moyen n'est pas recevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Dit que dans les motifs de l'arrêt, le mot " à " figurant à la 19e ligne de la page 8 dans la phrase " élever le montant de l'astreinte à 500 francs par jour de retard " est remplacé par le mot " de ".

MOYENS ANNEXE

Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils pour M. Z....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:

L'arrêt attaqué encourt la censure en ce qu'il a confirmé le jugement en tant qu'il a ordonné à M. Z... de démolir les ouvrages édifiés sur la zone non aedificandi en limite divisoire Est, décidé que cette démolition devrait avoir lieu dans les trois mois à compter de la signification de l'arrêt sous peine d'une astreinte de 1 000 francs par jour de retard, alloué aux consorts A... une indemnité de 20 000 francs, et rejeté la demande de dommages et intérêts formée par M. Z... ;

AUX MOTIFS QUE, selon le titre de propriété de M. Z..., ce dernier est tenu d'une servitude non aedificandi de 2 mètres dans les limites Est et Ouest ; que le litige introduit par la famille A... ne porte que sur la limite Est ; que la propriété de M. Z... est bornée à l'ouest par les propriétés des consorts X... qui ne sont pas en la cause ; qu'ainsi, le jugement déféré, en tant qu'il a ordonné la démolition des ouvrages situés en ouest, doit être réformé ; qu'en revanche, il est établi et non contesté qu'il n'y a eu aucune construction avant la construction litigieuse, à l'est de la parcelle de M. Z... ; que le garage édifié en 1960 a été édifié le long de la ligne Ouest ; que si cette construction, datant de plus de trente ans, a pu éteindre, pour non-usage trentenaire, la servitude le long de la limite Ouest, elle n'a pu en revanche entraîner l'extinction de la servitude s'étendant le long de la limite Est ; qu'il s'agit en effet d'une servitude portant sur deux zones totalement distinctes et qui frappent le terrain Z... de forme rectangulaire sur ses deux longueurs et qu'il est donc matériellement possible que l'une des servitudes le long d'une limite soit éteinte et pas l'autre ; qu'il convient de confirmer le jugement en tant qu'il a ordonné la démolition des ouvrages situés le long de la limite Est ; que toutefois, compte tenu de la mauvaise volonté de M. Z..., il convient d'élever le montant de l'astreinte à 500 francs par jour de retard ;

ALORS QUE, premièrement, si l'héritage pour lequel la servitude a été établie vient à être divisé, la servitude reste due pour chaque portion, sans néanmoins que la condition du fonds assujetti soit aggravée ; que dès lors, l'existence d'une construction, pendant trente ans, sur la zone non aedificandi entraînait l'extinction de la servitude dans son ensemble ; qu'en refusant néanmoins de constater l'extinction de la servitude, motif pris de ce que la construction invoquée par M. Z... avait été édifiée à l'ouest, et que la propriété des consorts A... était située à l'est, les juges du fond ont violé les articles 700, 706 et 707 du Code civil ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, dès lors que l'absence d'aggravation postule que la servitude puisse s'éteindre à raison de l'édification d'une construction sur un point de la zone non aedificandi, il importe peu qu'un autre point de cette zone soit matériellement distinct de l'assiette de la construction ; qu'en se fondant sur un motif inopérant, les juges du fond ont de nouveau violé les articles 700, 706 et 707 du Code civil ;

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:

L'arrêt attaqué encourt la censure en ce qu'il a confirmé le jugement entrepris en tant qu'il a ordonné à M. Z... de démolir les ouvrages construits en limite divisoire Est et dit que cette démolition devrait intervenir dans les trois mois à compter de la signification de l'arrêt, sous peine d'une astreinte de 1 000 francs par jour de retard ;

AUX MOTIFS QUE, pour tenir compte de la mauvaise volonté de M. Z..., il convient d'élever à 500 francs par jour de retard le montant de l'astreinte ;

ALORS QUE l'arrêt attaqué comporte une contradiction entre son dispositif et ses motifs ; qu'en effet, si, dans son dispositif, l'arrêt fixe l'astreinte à 1 000 francs par jour de retard, les motifs fixent cette même astreinte à 500 francs par jour de retard.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:

L'arrêt attaqué encourt la censure en ce qu'il a refusé de condamner les consorts A... à restituer à M. Z... une somme de 42 000 francs que celui-ci avait acquittée, au titre de l'astreinte, dont l'arrêt du 13 décembre 1994, qui a été cassé, avait été assortie ;

AU MOTIF QUE le jugement doit être confirmé en tant qu'il a enjoint M. Z... de démolir la construction située en est et que cette injonction doit être assortie d'une astreinte pour le cas où la construction ne serait pas démolie dans le délai de trois mois à compter de la signification de l'arrêt ;

ALORS QUE dès lors que l'arrêt du 13 décembre 1994, qui portait condamnation à astreinte, avait fait l'objet d'une cassation en toutes ses dispositions, les juges du fond se devaient de condamner les consorts A... à restituer le montant des sommes qui avaient pu être acquittées en exécution de cette astreinte ; qu'en refusant de faire droit à la demande formée par M. Z... en ce sens, les juges du fond ont violé les articles 623 et 625 du nouveau Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Assemblee pleniere
Numéro d'arrêt : 98-19018
Date de la décision : 23/03/2001
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

SERVITUDE - Servitudes diverses - Servitude non aedificandi - Division du fonds - Division antérieure à la constitution de la servitude - Portée .

SERVITUDE - Servitudes diverses - Servitude non aedificandi - Extinction - Division du fonds - Division antérieure à la constitution de la servitude (non)

Lorsque le propriétaire d'un fonds l'a divisé en trois parcelles antérieurement à la création de l'interdiction de construire le long des lignes divisoires entre la parcelle centrale et les parcelles voisines, les dispositions de l'article 700 du Code civil qui supposent que la servitude préexiste à la division de l'héritage, ne sont pas applicables.


Références :

Code civil 700

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 02 juillet 1998

A RAPPROCHER : Chambre civile 3, 1996-12-11, Bulletin 1996, III, n° 238, p. 155 (cassation), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Ass. Plén., 23 mar. 2001, pourvoi n°98-19018, Bull. civ. 2001 A. P. N° 7 p. 13
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2001 A. P. N° 7 p. 13

Composition du Tribunal
Président : Premier président :M. Canivet.
Avocat général : Avocat général : M. Joinet.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Vigneron, assistée de Mme Bilger-Paucot, auditeur.
Avocat(s) : Avocats : M. Foussard, la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2001:98.19018
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