Attendu que le litige concerne les conditions d'utilisation des phonogrammes pour la sonorisation de vidéomusiques, réalisées par adaptation sur les images, du son d'un phonogramme préexistant ; que les musiciens interprètes et leurs représentants (le Syndicat national des artistes musiciens de France X... et la société civile de perception et de distribution des droits des artistes-interprètes de la musique et de la danse SPEDIDAM) soutiennent que la réalisation de ces vidéogrammes, qui constituent des utilisations secondaires de l'interprétation, exige leur autorisation, cependant que les producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes et leurs représentants (en l'occurrence la société Sony Music Entertainment, le Syndicat national de l'édition phonographique SNEP et la Société civile pour l'exercice des droits des producteurs phonographiques (SCPP) ainsi que les sociétés de télévision qui les diffusent (Canal +, Métropole télévision M 6) font valoir que l'autorisation donnée lors de l'enregistrement sous la forme de la signature de la feuille de présence par les musiciens de studio vaut selon un accord du 1er mars 1969, suivis d'autres accords dans le même sens cession aux producteurs des droits sur l'interprétation, autorisant toute exploitation secondaire, sous réserve de rémunération complémentaire ;
Attendu que l'arrêt attaqué (Paris, 20 février 1998), après avoir écarté le moyen tiré d'une clause de conciliation préalable contenue dans le " protocole d'accord " du 1er mars 1969 et le moyen fondé sur un abus de procédure de la part du X... et de la SPEDIDAM, en position dominante, décide que la reproduction de l'interprétation des musiciens sous la forme de vidéogrammes sans leur consentement est illicite, et accorde des dommages-intérêts à la SPEDIDAM et au X..., avec publication de la décision ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir écarté la clause de conciliation par des motifs inopérants et en violation de la force obligatoire des contrats ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a retenu par une interprétation souveraine de la volonté des parties lors de la signature de la convention que l'inobservation de la clause prévoyant un préalable de conciliation avant toute procédure ne constituait pas une fin de non-recevoir à l'action en justice, ce qui impliquait que ce préalable n'était pas obligatoire, a ainsi légalement justifié sa décision sur ce point ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est soutenu que l'action du X... et de la SPEDIDAM constituerait un abus de procédure par détournement de sa finalité, cette procédure étant destinée à imposer, par un abus de position dominante, un système de gestion collective des autorisations données par les artistes-interprètes afin de peser sur les négociations en cours ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé que le X... et la SPEDIDAM étaient des organismes représentatifs de la profession des artistes-interprètes, et que le litige posait une question mettant en jeu l'intérêt individuel des musiciens et l'intérêt collectif de la profession, que ces organismes avaient pour mission de défendre, de sorte que leur action ne procédait d'aucun abus ;
Que l'arrêt attaqué est ainsi légalement justifié, sur ce point encore ;
Sur le troisième moyen, pris en ses diverses branches :
Attendu que le pourvoi reproche à la cour d'appel d'avoir jugé illicite la reproduction des phonogrammes pour la réalisation de vidéogrammes, à défaut d'autorisation des artistes-interprètes, qu'il est fait grief à la décision attaquée, d'abord, d'avoir méconnu les articles L.762-1 et L. 762-2 du Code du travail, qui régissent l'autorisation de l'interprète, ensuite, d'avoir décidé que l'autorisation donnée pour l'enregistrement du phonogramme ne valait pas pour une vidéomusique, alors que les interprètes concernés étaient absents de la procédure et sans répondre aux moyens faisant valoir que la signature de la feuille de présence emportait l'autorisation litigieuse, enfin, de ne pas s'être expliquée sur les accords des 17 avril 1959, 17 juillet 1979, 12 décembre 1975 et 18 décembre 1984, desquels il résultait que l'autorisation donnée lors de l'enregistrement valait pour toute utilisation secondaire des interprétations ;
Mais attendu que la cour d'appel a justement énoncé qu'en vertu de l'article L. 212-3 du Code de la propriété intellectuelle, et malgré le renvoi fait aux articles L. 762-1 et L. 762-2 du Code du travail, l'existence d'un contrat de travail n'emportant pas dérogation à la jouissance des droits de propriété intellectuelle, l'autorisation de l'artiste-interprète était exigée pour chaque utilisation de sa prestation ; qu'ayant souverainement retenu que l'autorisation donnée lors de l'enregistrement était expressément limitée à la reproduction sous la forme de phonogramme publié à des fins de commerce, les juges du second degré, qui ont souverainement apprécié la commune intention des parties quant à la portée de l'autorisation donnée par les interprètes dans les divers accords professionnels invoqués, ont exactement déduit de leurs énonciations que la réalisation d'un vidéogramme à partir d'un phonogramme était soumise à l'autorisation des artistes-interprètes ; que la cour d'appel a ainsi, sans encourir les griefs des pourvois, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.