Sur le moyen unique :
Vu l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
Attendu que la faute de la victime n'exonère totalement le gardien de sa responsabilité que si elle constitue un cas de force majeure ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mlle X..., non voyante, qui se trouvait au bord du quai d'une gare, a perdu l'équilibre au passage d'un train et a chuté entre le quai et la rame ; qu'ayant été blessée, elle a assigné la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) et la caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise pour obtenir réparation de son dommage ;
Attendu que pour rejeter la demande de Mlle X... l'arrêt, qui a décidé que la victime ne rapportait pas la preuve des fautes qu'elle imputait à la SNCF, retient qu'il résulte des témoignages produits que Mlle X... était une habituée de la gare où l'accident a eu lieu, qu'elle s'est inconsidérément positionnée à l'extrême limite du quai qu'elle connaissait en fonction des sens dont elle disposait, qu'en dépit d'un premier avertissement donné verbalement par un agent de la SNCF, dont elle n'a pas tenu compte, s'étant maintenue dans une position hasardeuse, puis d'un second avertissement par un coup de klaxon du machiniste du train qui arrivait, elle n'a pas été en mesure, tant sa position était aventurée, de s'éloigner de la bordure du quai, chutant au contraire sous la rame à la suite de son déséquilibre dû à cette position à haut risque ; que cette faute caractérisée à la charge de la victime, imprévisible et irrésistible pour la SNCF, laquelle ne pouvait être déclarée responsable d'un dommage qu'elle ne pouvait empêcher, un convoi ferroviaire n'ayant pas la possibilité, en raison de son poids et de sa masse en mouvement, de s'arrêter sur place ou presque, exonérait la SNCF de la présomption de responsabilité pesant sur elle en application de l'article susmentionné ;
Qu'en statuant par de tels motifs, alors que le comportement de la victime ne présentait pas les caractères de la force majeure, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 octobre 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.