Attendu que, par un acte du 3 mai 1990, établi par la SCP de notaires X...-Y...-Z... (la SCP), assurée par les Mutuelles du Mans assurances, la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de l'Aube et de la Haute-Marne (la banque) a consenti à la SCI C... un prêt de 12 500 000 francs en vue de la réalisation d'un projet immobilier ; que, dans cet acte, MM. A... et B..., représentés par M. D..., auquel ils avaient chacun donné procuration par actes sous seing privé, se sont portés cautions solidaires du remboursement du prêt dans la limite, chacun, de 60 % ; que la banque, n'ayant pas obtenu le règlement de sa créance à l'échéance, a engagé des mesures d'exécution ; que les cautions ont alors fait valoir l'irrégularité de leur engagement et appelé en intervention forcée la SCP ; que l'arrêt attaqué a accueilli leurs demandes et a condamné la SCP à indemniser la banque de son entier dommage ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré nuls les engagements de caution de MM. A... et B..., alors que, d'une part, en jugeant que les mandats de se rendre caution donnés par MM. A... et B... n'étaient pas authentiques et qu'ainsi l'article 1326 du Code civil leur était applicable, la cour d'appel aurait violé l'article 1317 du Code civil et l'article 8 du décret du 26 novembre 1971 ; et alors que, d'autre part, en jugeant que les mandats n'étaient pas authentiques bien qu'il résultât des termes clairs et précis de la mention qui y était portée qu'ils avaient été annexés à la minute de l'acte reçu par le notaire et signés par celui-ci, la cour d'appel aurait dénaturé ces actes et violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que la formalité de l'annexion à l'acte authentique de cautionnement de la procuration sous seing privé de se porter caution ne suffit pas à purger celle-ci de ses vices de forme, au regard de l'article 1326 du Code civil, en tant qu'il assure la protection de la caution ; que c'est donc à bon droit, et hors la dénaturation alléguée, que l'arrêt énonce que les procurations, simplement annexées à l'acte notarié, ne constituaient pas des actes authentiques, et que l'inobservation des prescriptions de l'article 1326 du Code civil rendait les actes de mandat irréguliers de sorte qu'ils ne pouvaient valoir que comme commencements de preuve par écrit ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;
Et, sur le deuxième moyen : (Publication sans intérêt) ;
Mais, sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que, pour condamner la SCP à réparer la totalité du dommage subi par la banque, l'arrêt énonce que MM. A... et B... avaient souscrit un engagement de caution solidaire et relève que la faute de la SCP avait privé la banque de toute possibilité de paiement de sa créance auprès de ces deux cautions qui étaient solvables et qui devaient la garantir chacune à hauteur de 60 % ;
Attendu, cependant, que seul est sujet à réparation le préjudice actuel, direct et certain ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la banque avait perdu toute possibilité d'obtenir, en tout ou en partie, le règlement de sa créance en exécution des autres sûretés qui avaient été souscrites pour garantir le paiement de celle-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la SCP à payer à la banque la somme de 30 076 403,61 francs, outre intérêts contractuels, et condamné les Mutuelles du Mans assurances à garantir la SCP des condamnations prononcées contre elle, l'arrêt rendu le 17 mars 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée.