REJET et CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'assises de la Lozère, en date du 13 janvier 2000, qui, pour meurtre et délits connexes, l'a condamné à 15 ans de réclusion criminelle et à 5 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 253 du Code de procédure pénale :
" en ce qu'a siégé comme assesseur à la cour d'assises, Mme Christine Castaing, juge au tribunal de grande instance de Mende ;
" alors que ne peut siéger à la cour d'assises un magistrat qui, en qualité de juge civil, a déjà porté une appréciation sur la culpabilité de l'accusé ; que Mme Castaing avait prononcé en sa qualité de juge aux affaires familiales par jugement du 13 janvier 1999 le divorce des époux X... Y..., aux torts exclusifs de X..., en retenant comme établi le grief que lui faisait son épouse de "commettre des infractions ayant entraîné son incarcération" ; que ce motif a entraîné de la part du juge du divorce une appréciation sur la participation directe et nécessaire de X..., Mme Castaing ne pouvait plus siéger comme assesseur à la cour d'assises ; que les arrêts rendus doivent être annulés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces communiquées par le demandeur que Mme Castaing, assesseur de la cour d'assises de la Lozère, appelée à juger X..., avait antérieurement, en sa qualité de juge aux affaires familiales, prononcé le divorce des époux X... Y... aux torts exclusifs du mari en retenant les griefs invoqués par son épouse ; que cette dernière reprochait à son conjoint sa violence et son agressivité à son égard ainsi que son désintérêt du foyer, " l'intéressé allant jusqu'à commettre des infractions ayant entraîné son incarcération " ;
Attendu que ce magistrat n'a porté, avant la comparution de l'accusé devant la cour d'assises, aucune appréciation sur sa culpabilité ou sur les faits constitutifs du crime et des délits connexes visés par l'arrêt de renvoi, dès lors que les griefs retenus par le juge aux affaires familiales ne sont pas fondés sur ces infractions ;
Qu'en cet état, la composition de la cour d'assises est régulière, tant au regard de l'article 253 du Code de procédure pénale que de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Mais, sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 371 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 2 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, violation des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt civil a octroyé un certain nombre de dommages-intérêts aux parties civiles constituées, dont des dommages-intérêts à Z... ;
" alors, d'une part que l'arrêt civil ne peut être rendu qu'après un débat contradictoire, impliquant que soient entendus le ministère public et l'accusé et sa défense ; qu'il ne résulte d'aucune disposition de l'arrêt civil qu'après audition des différentes parties civiles et de leurs avocats, ni le ministère public ni la défense et l'accusé aient eu la parole ; que les droits de la défense ont ainsi été violés ;
" alors, d'autre part que Z..., présenté comme tenancier du bar où se seraient produits les faits d'homicide et d'infractions à la législation sur les armes reprochés à l'accusé, n'a subi aucun préjudice direct résultant des infractions retenues ; qu'ainsi, les dommages-intérêts qui lui ont été alloués sont dépourvus de tout fondement légal " ;
Vu l'article 371 du Code de procédure pénale ;
Attendu que selon ce texte, après que la cour d'assises s'est prononcée sur l'action publique, la Cour, sans l'assistance du jury, statue sur les demandes en dommages-intérêts formées par la partie civile contre l'accusé, après que les parties et le ministère public ont été entendus ;
Attendu qu'il ne résulte d'aucune mention de l'arrêt civil que l'accusé ou son conseil ainsi que le ministère public aient été entendus en leurs observations, conclusions ou moyens de défense ;
Qu'il s'ensuit que le principe ci-dessus rappelé a été méconnu et que la violation de cette formalité substantielle, qui porte atteinte aux droits de la défense, entraîne la nullité de l'arrêt civil ;
Que, dès lors, la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
I. Sur le pourvoi contre l'arrêt pénal :
Le REJETTE ;
II. Sur le pourvoi contre l'arrêt civil :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'assises de la Lozère ;
RENVOIE la cause et les parties devant le tribunal civil de Rodez.