CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, en date du 23 avril 1999, qui, dans la procédure suivie contre Eric X... et Michel Y... des chefs de vol avec arme, tentative de meurtre et délit connexe, a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles L. 422-1 du Code des assurances, 2, 591, 593 et 706-11 du Code de procédure pénale :
" en ce que la cour d'assises a déclaré irrecevable la constitution de partie civile du Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions ;
" aux motifs que " si l'article 706-11 du Code de procédure pénale prévoit la subrogation du Fonds de garantie dans les droits de la victime pour obtenir de personnes responsables du dommage causé par l'infraction, le remboursement de l'indemnité ou de la provision versée par lui, c'est dans la limite du montant des réparations mises à la charge de celles-ci par la juridiction ; qu'il s'ensuit que l'action récursoire du Fonds de garantie est irrecevable quant aux demandes relatives au remboursement des sommes de 60 000 francs, et de 90 000 francs versées à Helyette A... et au jeune Yohan, respectivement épouse et fils de Benjamin Z... ; qu'en effet seul ce dernier s'est constitué partie civile (à titre personnel et non en qualité de représentant légal de son fils mineur Yohan) devant cette cour d'assises " ;
" alors, d'une part, que le Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions est subrogé dans les droits de la victime contre les personnes responsables du dommage causé par l'infraction ; qu'il peut exercer ses droits par voie de constitution de partie civile ; qu'en l'espèce, la cour d'assises a déclaré irrecevable la constitution de partie civile du Fonds au motif que les victimes qu'il avait indemnisées ne s'étaient pas elles-mêmes constituées parties civiles ; ce en quoi l'arrêt attaqué a rajouté à la loi une condition qu'elle ne contient pas ;
" alors, d'autre part, qu'en s'abstenant de rechercher si le préjudice indemnisé par le Fonds et pour lequel il était subrogé dans les droits des victimes, n'avait pas été causé par les infractions commises par les accusés condamnés, la cour d'assises a privé sa décision de base légale " ;
Vu les articles L. 422-1 du Code des assurances et 706-11 du Code de procédure pénale ;
Attendu que, d'une part, aux termes de l'article L. 422-1 du Code des assurances, le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions est subrogé dans les droits que possède la victime contre la personne responsable du dommage ;
Attendu que, d'autre part, l'article 706-11 du Code de procédure pénale dispose que le Fonds est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir, des personnes responsables du dommage causé par l'infraction ou tenues à un titre quelconque d'en assurer la réparation totale ou partielle, le remboursement de l'indemnité ou de la provision versée par lui, dans la limite du montant des réparations à la charge desdites personnes ; que le Fonds peut exercer ses droits par toutes voies utiles, y compris par voie de constitution de partie civile devant la juridiction répressive, et ce, même pour la première fois en cause d'appel ;
Attendu que, pour écarter les demandes de remboursement des sommes versées à la femme et au fils de Benjamin Z..., demandes présentées par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, l'arrêt attaqué, se borne à énoncer que seul Benjamin Z... s'est constitué partie civile à titre personnel ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la Cour a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 422-1 du Code des assurances, 375-2 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que le Fonds de garantie a été débouté de sa demande de remboursement de la provision versée à la victime, Benjamin Z..., en tant que sa demande était dirigée contre le coauteur du crime, Michel Y... ;
" aux motifs que " si la demande de remboursement de la provision de 20 000 francs versée à M. Benjamin Z... est justifiée et fondée, cette demande n'est recevable qu'à l'encontre de Maurice Eric X..., Michel Y... n'ayant pas été déclaré responsable du préjudice subi par Benjamin Z... et résultant de sa demande d'indemnisation " ;
" alors que les personnes condamnées pour un même crime sont tenues solidairement des dommages et intérêts ; que Michel Y... et Maurice Eric X... ont été l'un et l'autre condamnés pour le même crime de vol avec arme commis sur la personne de Benjamin Z... ; que la cour d'appel ne pouvait dès lors refuser de condamner Michel Y... à rembourser au Fonds de garantie subrogé à la victime la provision versée à cette dernière, sauf à constater que ladite provision n'aurait pas eu de rapport avec le crime perpétré " ;
Vu les article 203 et 375-2 du Code de procédure pénale ;
Attendu que la solidarité, édictée par l'article 375-2 du Code de procédure pénale entre les individus condamnés pour un même crime, s'applique également à ceux qui ont été déclarés coupables de différentes infractions rattachées entre elles par des liens d'indivisibilité ou de connexité ; qu'il en est ainsi lorsque, au cours de l'exécution d'un vol commis avec usage ou sous la menace d'armes, l'un des auteurs commet, même seul, une tentative de meurtre au moyen de l'une des armes employées ;
Attendu que, pour débouter le Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions de sa demande de remboursement de la provision versée à Benjamin Z..., dirigée contre Michel Y..., l'arrêt énonce que ce dernier, qui a été déclaré coupable de vol avec l'aide ou la menace d'une arme, mais non coupable de tentative de meurtre sur la personne de Benjamin Z..., n'a pas été reconnu responsable du préjudice subi par ce dernier ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel, a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est également encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, en date du 23 avril 1999, mais en ses seules dispositions ayant déclaré le Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions irrecevable en ses demandes de remboursement des sommes versées à Helyette A..., épouse Z..., et au représentant légal du mineur Yohan Z... ainsi qu'en celles ayant débouté ledit Fonds de ses demandes à l'égard de Michel Y..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant le tribunal civil de Toulon.