La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/05/2000 | FRANCE | N°99-84024

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 30 mai 2000, 99-84024


REJET du pourvoi formé par :
- X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D..., E.., F..., G..., H..., I..., J..., K..., L..., parties civiles,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 3 mai 1999, qui, sur leur plainte du chef de crime contre l'humanité contre personne non dénommée a confirmé l'ordonnance de refus d'informer du juge d'instruction.
LA COUR,
Vu l'article 575, alinéa 2,1°, du Code de procédure pénale ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 2

12-1 et 213-5 nouveau du Code pénal, de la convention internationale du 24 n...

REJET du pourvoi formé par :
- X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D..., E.., F..., G..., H..., I..., J..., K..., L..., parties civiles,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 3 mai 1999, qui, sur leur plainte du chef de crime contre l'humanité contre personne non dénommée a confirmé l'ordonnance de refus d'informer du juge d'instruction.
LA COUR,
Vu l'article 575, alinéa 2,1°, du Code de procédure pénale ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 212-1 et 213-5 nouveau du Code pénal, de la convention internationale du 24 novembre 1950 pour la prévention et la répression du crime de génocide approuvé par l'assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1948, 7.2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 15-2 du pacte international de New-York relatif aux droits civils et politiques, de l'article 1er du titre I, de la loi d'amnistie n° 68-697 du 31 juillet 1968, 575 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a dit n'y avoir lieu à informer sur la plainte avec constitution de partie civile déposée du chef de crime contre l'humanité à raison des crimes contre les personnes perpétués le 17 octobre 1961 à l'occasion d'une manifestation organisée à Paris par les populations musulmanes demeurant en France ;
" aux motifs qu'il convient d'examiner si les faits dénoncés, à les supposer établis, sont ou non couverts par l'amnistie ; que l'article 1er du titre Ier de la loi n° 68-697 du 31 juillet 1968 portant amnistie dispose que "sont amnistiés de plein droit toutes infractions commises en relation avec les événements d'Algérie" ; qu'il résulte de ces dispositions que la représentation nationale, après avoir édicté nombre d'amnisties partielles, a entendu soumettre à l'amnistie toutes les infractions sans exclusive eu égard tant à leur auteur qu'à leur nature ; que lors des débats devant l'Assemblée nationale, le Garde des Sceaux précisait notamment : "peu importe que les infractions commises aient été en relation directe ou indirecte avec les événements d'Algérie, suivant une distinction faite dans plusieurs textes antérieurs ; les unes et les autres sont effacées ; peu importe également la nature des infractions et la gravité des peines encourues ; l'amnistie s'applique en tout cas ; peu importe que les infractions aient donné lieu à condamnation ou non, les faits eux-mêmes sont amnistiés.." (JO 23 juillet 1968, p. 2468, débats Assemblée nationale) ; que le rapporteur de la commission des lois ajoutait... "l'amnistie est générale, car elle ne couvre pas les infractions limitativement énumérées, mais l'ensemble de ces infractions : contraventions, délits et crimes ; elle est générale, car elle s'applique également aux infractions commises avant et après le 3 juillet 1962..." (JO 23 juillet 1968, p. 2469, débats Assemblée nationale) ; qu'en cet état le législateur a fait bénéficier de l'amnistie tout fait criminel en relation avec les événements d'Algérie ; que l'on ne saurait, comme le soutiennent les parties civiles, décider que l'amnistie ne pouvait être appliquée malgré une loi claire et précise sans enfreindre la règle de la séparation des pouvoirs ; que dès lors n'étant point contestable que les faits dénoncés ont été commis en relation avec les événements d'Algérie, s'agissant de la répression d'une manifestation organisée par le FLN pour s'opposer à un couvre-feu ordonné par le préfet de police de Paris, il convient de constater que l'amnistie est acquise par l'effet de l'article 1er de la loi n° 68-697 du 31 juillet 1968 et au fond de confirmer l'ordonnance entreprise ;
" alors que l'incrimination par les articles 211-1 et 212-1 nouveaux du Code pénal des crimes contre l'humanité déclarés imprescriptibles par l'article 213-5 du même Code en ce qu'elle tend à la répression d'atteintes à un droit préexistant, la protection de l'humanité en tant que telle, permet la poursuite et le jugement des atteintes portées aux droits fondamentaux de la personne humaine quelle que soit la date de leur commission et s'oppose à ce que des dispositions de droit interne, telle une loi d'amnistie, puissent être considérées comme susceptibles de s'opposer à la répression de tels actes, d'autant que, les traités internationaux ayant une autorité supérieure aux dispositions de droit interne, la loi n° 68-697 du 31 juillet 1968 portant amnistie des infractions commises en relation avec les événements d'Algérie ne pouvait être interprétée comme amnistiant de tels faits sans contrevenir à la convention du 24 novembre 1950 pour la prévention et la répression du crime de génocide approuvé par l'assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1948 ratifié par la France et portant engagement des parties contractantes d'assurer une répression efficace des personnes s'étant rendues coupables de génocide, ce terme englobant selon les dispositions de l'article 2 de ladite convention notamment le meurtre et les atteintes graves à l'intégrité physique ou mentale des membres d'un groupe donné ; que dès lors, la chambre d'accusation qui, pour confirmer le refus d'informer, a considéré que le principe de la séparation des pouvoirs lui imposait de constater que les faits dénoncés par les parties civiles étaient amnistiés par application de l'article 1er du titre Ier de la loi n° 68-697 du 31 juillet 1968, a violé l'ensemble des principes ci-dessus rappelés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et de l'examen des pièces de la procédure que X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D..., E..., F..., G..., H..., I..., J..., K... et L... ont déposé plainte et se sont constitués parties civiles contre personne non dénommée, le 25 février 1995, devant le doyen des juges d'instruction de Paris du chef de crime contre l'humanité à raison des violences dont eux-mêmes ou certains membres de leur famille auraient été victimes à Paris le 17 octobre 1961 ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance du juge d'instruction refusant d'informer, la chambre d'accusation se prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi les juges du second degré, abstraction faite de motifs surabondants mais non déterminants, relatifs à la séparation des pouvoirs, ont justifié leur décision dès lors que les faits dénoncés n'entrent pas dans les prévisions des textes conventionnels et nationaux visés au moyen et que les seules qualifications de droit commun que ces faits pourraient revêtir entrent nécessairement dans le champ d'application de la loi n° 68-697 du 31 juillet 1968 portant amnistie des infractions commises en relation avec les événements d'Algérie ;
D'ou il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-84024
Date de la décision : 30/05/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHAMBRE D'ACCUSATION - Arrêts - Arrêt de refus d'informer - Conditions - Faits ne pouvant comporter une poursuite - Faits amnistiés.

AMNISTIE - Textes spéciaux - Loi du 31 juillet 1968 - Domaine d'application - Infractions commises en relation avec les événements d'Algérie

Les faits de violences commis en relation avec les événements d'Algérie dès lors qu'ils ne sont pas susceptibles de constituer un génocide ou un crime contre l'humanité peuvent seulement revêtir une qualification de droit commun et entrent en conséquence dans le champ d'application de la loi n° 68-697 du 31 juillet 1968 portant amnistie. (1).


Références :

Loi 68-697 du 31 juillet 1968

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (chambre d'accusation), 03 mai 1999

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1993-04-01, Bulletin criminel 1993, n° 143 (2°), p. 351 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 30 mai. 2000, pourvoi n°99-84024, Bull. crim. criminel 2000 N° 204 p. 600
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 204 p. 600

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. Lucas.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Chanet.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:99.84024
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award