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16/05/2000 | FRANCE | N°98-10489

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 mai 2000, 98-10489


Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu la loi des 16-24 août 1790 ;

Attendu que la société Triperie Joseph Steyer ayant été mise en redressement judiciaire le 2 novembre 1994, la société Air liquide a, par lettre du 25 novembre 1994, revendiqué auprès de l'administrateur judiciaire la propriété d'un tunnel de surgélation et de ses accessoires qu'elle aurait donné en location ; que le mandataire de justice s'étant opposé à cette revendication, la société Air liquide en a saisi le juge-commissaire le 7 septembre 1995 ; que, par ordonnance du 5 octo

bre 1995, celui-ci a rejeté la requête comme étant hors délai au regard de l'a...

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu la loi des 16-24 août 1790 ;

Attendu que la société Triperie Joseph Steyer ayant été mise en redressement judiciaire le 2 novembre 1994, la société Air liquide a, par lettre du 25 novembre 1994, revendiqué auprès de l'administrateur judiciaire la propriété d'un tunnel de surgélation et de ses accessoires qu'elle aurait donné en location ; que le mandataire de justice s'étant opposé à cette revendication, la société Air liquide en a saisi le juge-commissaire le 7 septembre 1995 ; que, par ordonnance du 5 octobre 1995, celui-ci a rejeté la requête comme étant hors délai au regard de l'article 85-1, alinéa 2, du décret du 27 décembre 1985 modifié ;

Attendu que pour confirmer le jugement annulant cette décision et déclarant recevable l'action en revendication formée par la société Air liquide, l'arrêt attaqué, après avoir énoncé que le régime de l'action en revendication de propriété est déterminé par les articles 115 et 121-1 de la loi du 25 janvier 1985, dont le premier institue un délai préfix pour l'exercice de cette action tandis que le second en organise les modalités en prévoyant d'abord une phase amiable devant le mandataire de justice et ensuite, en cas d'échec de la précédente, devant le juge-commissaire, sans fixer de délai pour saisir celui-ci ni renvoyer à un décret pour le faire, relève qu'en créant des conditions restrictives non prévues par la loi, l'article 85-1 du décret du 27 décembre 1985, qui a pour effet de déchoir le revendiquant de son droit de propriété, porte gravement atteinte au régime de la propriété dont l'article 34 de la Constitution réserve à la loi la détermination des principes fondamentaux ;

Attendu, cependant, que si les juridictions judiciaires peuvent, par exception à la règle générale, apprécier la validité d'un acte réglementaire sur le fondement duquel est intervenu l'acte contesté, c'est à la condition que ce règlement porte une atteinte grave à une liberté individuelle ou au droit de propriété ; que le décret du 21 octobre 1994, dont est issu l'article 85-1 ajouté au décret du 27 décembre 1985, à supposer même qu'il ait empiété sur le domaine réservé à la loi par l'article 34 de la Constitution, ne saurait être considéré comme portant gravement atteinte au droit de propriété dans la mesure où la forclusion qu'il institue en son alinéa 2 n'est que la conséquence de l'inaction du revendiquant informé du défaut d'acquiescement par le mandataire de justice à sa demande conformément à l'alinéa 1er ; d'où il suit qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 décembre 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Vu l'article 627 du nouveau Code de procédure civile ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déclare irrecevable comme tardive la demande en revendication de la société Air liquide.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 98-10489
Date de la décision : 16/05/2000
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Acte administratif - Appréciation de la légalité, de la régularité ou de la validité - Incompétence judiciaire - Redressement et liquidation judiciaires - Décret du 27 décembre 1985 - Article 85-1 .

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Marchandises livrées au débiteur - Action en revendication - Délai - Article 85-1 du décret du 27 décembre 1985 - Validité

Si les juridictions judiciaires peuvent, par exception à la règle générale, apprécier la validité d'un acte réglementaire sur le fondement duquel est intervenu l'acte contesté, c'est à la condition que ce règlement porte une atteinte grave à une liberté individuelle ou au droit de propriété. En l'état de la décision d'une cour d'appel déclarant recevable l'action en revendication exercée par le propriétaire de matériel industriel qu'il dit avoir donné en location à une entreprise avant sa mise en redressement judiciaire, ne saurait être considéré comme portant une telle atteinte le décret du 21 octobre 1994 dont est issu l'article 85-1 ajouté au décret du 27 décembre 1985 dans la mesure où, à supposer même qu'il ait empiété sur le domaine réservé à la loi par l'article 34 de la Constitution, la forclusion qu'il instaure en son alinéa 2, n'est, dans l'espèce, que la conséquence de l'inaction du revendiquant informé du défaut d'acquiescement par le mandataire de justice à sa demande conformément à l'alinéa 1er.


Références :

Décret 85-1388 du 27 décembre 1985 art. 85-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 02 décembre 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 mai. 2000, pourvoi n°98-10489, Bull. civ. 2000 I N° 146 p. 96
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2000 I N° 146 p. 96

Composition du Tribunal
Président : Premier président :M. Canivet, président.
Avocat général : Avocat général : M. Roehrich.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Bargue.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Vincent et Ohl, la SCP Baraduc et Duhamel.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:98.10489
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