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10/05/2000 | FRANCE | N°00-80865

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 mai 2000, 00-80865


REJET du pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Montpellier, en date du 4 janvier 2000, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, a rejeté sa demande d'annulation de pièces de la procédure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 13 mars 2000, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 63-1, 171, 485, 567 et 593 du Co

de de procédure pénale, 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'...

REJET du pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Montpellier, en date du 4 janvier 2000, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, a rejeté sa demande d'annulation de pièces de la procédure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 13 mars 2000, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 63-1, 171, 485, 567 et 593 du Code de procédure pénale, 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
" en ce que la chambre d'accusation rejette la requête en nullité de la garde à vue et des actes ultérieurs de poursuites et d'instruction ;
" aux motifs que, selon l'article 63-1 du Code de procédure, pénale, l'officier de police judiciaire a le devoir de notifier les droits attachés au placement en garde à vue dès que la personne retenue se trouve en état d'en être informée ; que tout retard injustifié dans la mise en oeuvre de cette obligation porterait atteinte aux intérêts de la personne concernée ; que seules des circonstances exceptionnelles et insurmontables, tenant par exemple à un état qui empêcherait l'individu gardé à vue de comprendre la portée des droits notifiés et de les exercer utilement, peuvent justifier un retard dans la notification de ces droits ; qu'il appartient à l'officier de police judiciaire, en charge de la garde à vue d'une personne, d'apprécier, in concreto, si celle-ci est ou non en mesure de comprendre le sens et la portée des droits notifiés en application des dispositions des articles 631 et suivants du Code de procédure pénale ; que seule une erreur manifeste d'appréciation de l'officier de police judiciaire serait susceptible d'entacher la validité d'une notification qu'il aurait, alors, effectuée à tort, et au préjudice de la personne intéressée ; que tel n'est pas le cas en l'espèce ; qu'en effet, c'est en conscience et à bon droit que l'officier de police judiciaire Y..., lieutenant de police, ayant considéré que X... était manifestement "en état de répondre à ses questions malgré son taux d'alcoolémie", l'a placé en garde à vue le 21 septembre 1998 à 19 heures 30, faisant partir la garde à vue de l'heure de l'interpellation 16 heures 20 et lui a notifié ses droits ; que, si le taux d'alcoolémie, qui sera révélé ultérieurement par la prise de sang, paraît élevé (2,22 grammes pour mille), pour une personne non habituée à des excès éthyliques, il n'était pas forcément susceptible d'altérer de façon évidente le comportement d'une personne régulièrement habituée à de très fortes absorptions d'alcool ; que ni la fiche A ni la fiche B ne permettaient de penser que X... était sous l'empire d'un état alcoolique important, voire en état d'ivresse, situations qui auraient entraîné son placement en cellule dite de "dégrisement" ; qu'alors que la dernière absorption d'alcool se situait à environ 14 heures 15 et les faits poursuivis à environ 16 heures 30, X... avait pu conduire et manoeuvrer, sans anicroche, son véhicule automobile ; qu'il suffit de se reporter au début du procès-verbal d'audition de X... pour y lire : "il est vrai que j'ai consommé du pastis aujourd'hui, mais je me sens capable de répondre à vos questions" ; que X... a signé ce procès-verbal, comme celui de la notification de ses droits ; que, de plus, dans le procès-verbal de déroulement et de fin de garde à vue, X... a reconnu qu'il avait été informé de ses droits et n'a formulé aucune réserve, tenant notamment à son état d'ébriété (...) (v. arrêt attaqué, p. 5 et 6) ;
" alors que, d'une part, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué (v. p. 6, 1er alinéa, in fine) que le lieutenant de police Y... "l'a placé (X....) en garde à vue le 21 septembre 1998 à 19 heures 30, faisant partir la garde à vue de l'heure de l'interpellation 16 heures 20 et lui a notifié ses droits" ; que, d'autre part, il ressort du procès-verbal (D 5, en p. 2) dressé par le lieutenant de police Y... "le 21 septembre 1998 à 16 heures 45", soit quelques minutes après le début de la garde à vue et près de 3 heures avant la notification de ses droits, que X... a été immédiatement entendu en ses "premières explications", selon lesquelles "il semble que celui-ci ait volontairement poussé à l'eau la personne décédée à la suite d'une dispute" ; qu'enfin, il ressort de la fiche "C" de "la recherche de l'état alcoolique" (D 15), qu'à "18 heures 00", soit plus d'une heure et demie après le début de la garde à vue et les "premières explications" de X..., que le sang analysé (de ce dernier) renferme une teneur en alcool de 2,22 grammes pour mille ; qu'ainsi, alors qu'il se trouvait sous l'emprise d'une forte alcoolémie et avant que ses droits ne lui aient été notifiés, X... a fourni au premier enquêteur des premières explications susceptibles de se révéler contraires aux intérêts de sa défense, en ce qu'elles pouvaient ultérieurement être regardées par le juge pénal comme l'aveu d'un acte délibéré d'atteinte à la vie d'autrui, de nature à influer sur le règlement de la procédure d'instruction et sur la conviction de la juridiction de jugement ; que, dès lors, en refusant d'annuler la mesure de placement en garde à vue, aux motifs inopérants que l'officier de police avait agi "en conscience" et que X... avait déclaré se sentir "capable de répondre" aux questions sans avoir "formulé aucune réserve" lors de la notification de ses droits, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés ;
" alors que, au surplus, d'une part, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué (v. p. 6, 1er alinéa, in fine) que le lieutenant de police Y... "l'a placé (X....) en garde à vue le 21 septembre 1998 à 19 heures 30, faisant partir la garde à vue de l'heure de l'interpellation - 16 heures 20 - et lui a notifié ses droits" ; que, d'autre part, il ressort de la fiche "C" de "la recherche de l'état alcoolique" (D15), qu'à "18 heures 00", soit plus d'une heure et demie après le début de la garde à vue de X..., que "le sang analysé (de ce dernier) renferme une teneur en alcool de 2,22 grammes pour mille" ; qu'enfin, il ressort du procès-verbal de placement en garde à vue et de notification des droits (D 19), dressé le 21 septembre 1999, à 19 heures 30, par le lieutenant de police Y..., que ce dernier avait connaissance de l'important "taux d'alcoolémie" décelé une heure et demie plus tôt à l'analyse du sang de X... ; qu'ainsi, il est légitime de soutenir que la conscience professionnelle, indiscutée, de l'officier de police judiciaire, aurait dû être animée d'un doute raisonnable, quant à l'aptitude du gardé à vue à comprendre la nature et l'étendue de ses droits ; que, dès lors, en refusant d'annuler la garde à vue, aux motifs inopérants que l'officier de police avait agi "en conscience" et que X... avait déclaré se sentir "capable de répondre" aux questions sans avoir "formulé aucune réserve" lors de la notification de ses droits, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que X... a, le 21 septembre 1999, à 16 heures 20, été interpellé, en flagrant délit, pour des faits de violences ; qu'après avoir constaté que l'haleine de l'intéressé, dont les explications étaient embrouillées, sentait l'alcool, les policiers l'ont conduit au centre hospitalier, où un prélèvement sanguin a été opéré à 17 heures 30, avant de le ramener au commissariat ; qu'après un temps de repos, X... a, à 19 heures 30, été placé en garde à vue par un officier de police judiciaire avec effet rétroactif à compter de 16 heures 20 ; que, dans le même temps, il a reçu notification de ses droits avant d'être entendu à compter de 19 heures 50 ;
Attendu que X..., mis en examen du chef de violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, a régulièrement présenté à la chambre d'accusation une requête en annulation de pièces, en faisant valoir que, malgré son état d'ébriété, il avait été placé en garde à vue et qu'il s'était vu, immédiatement, notifier ses droits sans attendre son dégrisement ;
Attendu que, pour rejeter cette requête, les juges retiennent que l'officier de police judiciaire a constaté, lors du placement en garde à vue, que X... était manifestement en état de répondre à ses interpellations ; qu'ils précisent que l'intéressé a confirmé, lors de son audition, qu'il se sentait capable de répondre aux questions qui lui étaient posées ; qu'ils ajoutent que X... a signé le procès-verbal d'audition comme celui de la notification de ses droits ;
Attendu qu'en cet état, la chambre d'accusation a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 00-80865
Date de la décision : 10/05/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

GARDE A VUE - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Moment - Moment où la personne se trouve en état d'en être informée.

CRIMES ET DELITS FLAGRANTS - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Moment - Moment où la personne se trouve en état d'en être informée

DROITS DE LA DEFENSE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Moment - Moment où la personne se trouve en état d'en être informée

OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Moment - Moment où la personne se trouve en état d'en être informée - Etat d'ébriété

Selon l'article 63-1 du Code de procédure pénale l'officier de police judiciaire ou, sous son contrôle, l'agent de police judiciaire, a le devoir de notifier les droits attachés au placement en garde à vue dès que la personne concernée se trouve en état d'en être informée. Justifie, par suite, sa décision la chambre d'accusation, qui, pour rejeter une requête en annulation de pièces de la procédure présentée par un individu qui se trouvait en état d'ébriété lors de son interpellation retient que l'officier de police judiciaire a constaté, lors de la notification des droits, concomitante au placement en garde à vue, que l'intéressé était manifestement en état de répondre aux questions qui lui étaient posées, ce que l'individu a confirmé lors de son audition. (1).


Références :

Code de procédure pénale 63-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier (chambre d'accusation), 04 janvier 2000

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1996-01-04, Bulletin criminel 1996, n° 5, p. 8 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 mai. 2000, pourvoi n°00-80865, Bull. crim. criminel 2000 N° 181 p. 528
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 181 p. 528

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : Mme Fromont.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Le Corroller.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Tiffreau.

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:00.80865
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