Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Bourges, 3 février 1998), que, victime à plusieurs reprises de dégâts causés à ses cultures de maïs par des sangliers, le groupement agricole d'exploitation en commun Deloche (le GAEC) a saisi la Commission départementale d'indemnisation en vue d'obtenir la réparation de son dommage par l'Office national de la chasse (l'ONC) ; que cette Commission a offert à la victime en 1993, 1994 et 1995 des indemnités fixées après abattement supérieur au taux réglementaire de 5 %, en retenant que le GAEC avait refusé de protéger ses plantations malgré la proposition de fourniture d'une clôture gratuite par la fédération départementale des chasseurs ; que sur les recours du GAEC, la Commission nationale a confirmé les décisions entreprises et a informé ce dernier que son seul recours sera de porter le litige devant le tribunal d'instance compétent ; que le 31 août 1995, le GAEC a assigné l'ONC en réparation de son dommage ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'ONC fait grief à l'arrêt qui a déclaré l'action du GAEC Deloche recevable, d'avoir constaté que l'abattement supplémentaire pratiqué par l'ONC sur les demandes d'indemnisation n'est nullement justifié au regard des dispositions de l'article L. 226-3 du Code rural et d'avoir en conséquence, condamné l'ONC à verser au GAEC une certaine somme, alors, selon le moyen, d'une part, 1° que si l'ONC, établissement public administratif auquel est confié la gestion du fonds d'indemnisation des dégâts de grands gibiers, est aussi chargé d'assurer le secrétariat de la Commission nationale d'appel, et partant d'informer à ce titre les plaignants des dispositions légales relatives à l'indemnisation des dégâts de gibiers, il n'en demeure pas moins un organe distinct de la Commission départementale et de la Commission nationale d'indemnisation, celles-ci ne statuant qu'en cas de désaccord du plaignant sur l'indemnité proposée par l'ONC ou lorsque l'indemnité évaluée par l'estimateur est supérieure à une somme déterminée par arrêté ; que les lettres adressées par la Commission nationale d'indemnisation aux plaignants, même si elles sont signées par son secrétariat lui-même assuré par l'ONC, n'engagent donc pas pour autant l'ONC en sa qualité distincte de gestionnaire du fonds d'indemnisation ; qu'ainsi, en déduisant des lettres de la Commission nationale d'indemnisation invitant le GAEC à saisir le tribunal d'instance en cas de désaccord, l'existence d'une renonciation de l'ONC à se prévaloir de la prescription, la cour d'appel a violé ensemble les articles R. 226-6, R. 226-7, R. 226-14, R. 221-8 et R. 226-1 du Code rural ; 2° qu'en statuant de la sorte, sans préciser les circonstances de fait ou de droit qui lui permettaient de dire que l'ONC, dont le GAEC faisait valoir qu'il avait refusé de régler la moindre indemnité, aurait néanmoins reconnu le droit à indemnisation du plaignant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2248 du Code civil ; 3° que le litige, dont l'objet est de déterminer si l'ONC peut procéder à un abattement sur le montant de l'indemnité réclamée par la victime de dégâts de grands gibiers, constitue un litige relatif à la réparation du dommage causé aux récoltes par le grand gibier, et partant est soumis à la prescription de l'article L. 226-6 du Code rural, peu important que le principe du droit à indemnité ne soit pas discuté ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 226-6 susvisé ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le litige avait pour seul objet le taux d'abattement à appliquer à l'indemnisation et que le GAEC avait été invité par lettre du secrétariat de la Commission nationale à saisir, faute d'accord, le tribunal d'instance compétent, la cour d'appel a pu décider que cette démarche emportait renonciation de l'ONC, qui ne contestait pas le droit à indemnisation, à se prévaloir de la prescription ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'ONC reproche à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait, alors, selon le moyen, 1° que l'abattement de l'article L. 226-3, alinéa 3, du Code rural s'applique chaque fois que la victime des dégâts a, par un procédé quelconque, favorisé l'arrivée du gibier sur son fonds ; que constitue un procédé visé par cet article le fait, pour la victime de dégâts causés à des récoltes de maïs dont les grands gibiers sont particulièrement friands, d'avoir refusé l'installation pourtant gratuite d'une clôture qui lui était proposée par la Fédération départementale des chasseurs de l'Indre ; qu'ainsi, en estimant que ce comportement de la victime ne pourrait, s'agissant d'une abstention, donner lieu à abattement, la cour d'appel a violé l'article L. 226-3 susvisé ; 2° que le choix de pratiquer en connaissance de cause, dans une région dans laquelle les sangliers abondent, une culture dont ces animaux sont friands, peut à lui seul, même s'il n'y a pas volonté malicieuse d'attirer le grand gibier au moyen d'une culture inhabituelle dans la région, justifier l'application de l'abattement de l'article L. 226-3 du Code rural ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 226-3 précité ;
Mais attendu que l'arrêt énonce exactement que l'article L. 226-3 du Code rural exige pour que l'abattement supplémentaire soit pratiqué un acte positif de l'exploitant du fonds et non une simple abstention ; qu'il ajoute qu'il n'apparaît pas davantage que la culture du maïs reprochée à ce dernier ne soit pas une culture habituellement pratiquée par les autres exploitants dans la région considérée alors qu'il est par ailleurs constant que les sangliers se trouvent en nombre important dans cette région sans qu'il soit pour autant prouvé qu'ils soient en permanence sur le territoire du GAEC qui s'ingénierait malicieusement à les attirer ;
Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, c'est à juste titre que la cour d'appel, sans encourir les griefs du pourvoi, a estimé que l'abattement supplémentaire était injustifié ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.