CASSATION sur le pourvoi formé par :
- l'agent comptable du Trésor public, partie civile intervenante,
contre un arrêt de la cour d'appel de Lyon, chambre correctionnelle, en date du 17 décembre 1998, qui, dans la procédure suivie contre Alain X..., condamné pour fraude fiscale, a constaté que la contrainte par corps ne pouvait être exercée en raison de la prescription.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 277 du Livre des procédures fiscales, 133-3 du Code pénal, 749 et suivants du Code de procédure pénale, 593 du Code de procédure pénale, défaut de base légale et défaut de réponse à conclusions :
" en ce que la cour d'appel a constaté que la contrainte par corps ne pouvait être exercée en raison de la prescription ;
" aux motifs que, " si aux termes de l'article 765-1 du Code de procédure pénale pour le recouvrement des amendes en matière criminelle, correctionnelle et de police, la prescription est interrompue par un commandement notifié au condamné... ", il convient d'observer que cette disposition nouvelle résulte de la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 et qu'avant l'entrée en vigueur de cette disposition nouvelle, la prescription ne pouvait être interrompue par la notification d'un commandement ; qu'en l'espèce, la prescription normalement acquise le 9 décembre 1992, n'a pu être interrompue par la notification en date du 16 novembre 1992 d'un commandement de payer ; que c'est à tort que le tribunal a estimé que ce commandement avait interrompu la prescription ; que, pour le surplus, il convient de relever que les réquisitions d'incarcération n'étant valables que jusqu'à expiration des délais de prescription de la peine (article 754, alinéa 4, du Code de procédure pénale), la contrainte par corps qui n'aura pas commencé à être exécutée lors de la prescription ne pourra plus être mise à exécution ; que tel est bien le cas en l'espèce où la peine est prescrite et a même disparu du casier judiciaire (Crim. 29 octobre 1998, Y...) ; qu'enfin, il n'est pas établi qu'Alain X... ait obtenu, ni même sollicité, le bénéfice du sursis de paiement ; qu'ainsi, conformément aux dispositions de l'article L. 277 du Livre des procédures fiscales et d'une jurisprudence solidement établie, les impositions contestées par le redevable n'ont jamais cessé d'être exigibles contrairement aux allégations du trésorier principal d'Ecully, soutenant que la simple saisine du tribunal administratif faisait obstacle aux poursuites du Trésor et suspendait l'exercice de la contrainte par corps " ;
" alors que, l'article L. 277 du Livre des procédures fiscales suspend l'exercice de la contrainte par corps le temps qu'une décision définitive soit prise par le tribunal saisi par le contribuable d'une réclamation relative aux impositions en litige ; qu'en estimant que le délai de prescription qui courait contre le comptable public pour la mise en oeuvre de la contrainte par corps, n'avait pas été interrompu par la saisine du tribunal administratif par Alain X..., motif pris de ce que ce dernier n'avait pas assorti son recours d'une demande de sursis de paiement, la cour d'appel, qui ajoute au texte une condition qui n'y figure pas, a violé les dispositions de ce texte " ;
Vu l'article 754 du Code de procédure pénale, ensemble les articles L. 272 et L. 277 du Livre des procédures fiscales ;
Attendu que le délai pendant lequel peut être exercée la contrainte par corps ordonnée par une décision de condamnation du chef de fraude fiscale, conformément à l'article L. 272 du Livre des procédures fiscales est suspendu, en cas de réclamation contentieuse, jusqu'à la décision du tribunal administratif saisi ;
Attendu que, par jugement du 8 octobre 1987, le tribunal correctionnel de Lyon a condamné Alain X..., pour fraude fiscale, à une peine d'amende, reçu en sa constitution le directeur général des impôts, partie civile intervenante, et " dit que la contrainte, s'il y a lieu de l'exercer pour le paiement des impôts en fraude, et pour celui des pénalités ayant sanctionné administrativement les fraudes commises en ce qui concerne ces impôts, s'exercera pour la durée prévue par l'article 750 du Code de procédure pénale " ;
Attendu que le tribunal administratif, saisi le 6 janvier 1986, a statué le 16 juin 1992 sur la quotité de l'impôt dû par Alain X... ; qu'en exécution d'une réquisition du 8 avril 1993, celui-ci a été incarcéré le 8 février 1994 ;
Que, saisi par requête, le président du tribunal de grande instance, statuant en référé, a prononcé, le 2 mars 1994, le sursis à exécution de la contrainte par corps et renvoyé la procédure devant la juridiction compétente pour statuer sur cet incident d'exécution, en application des dispositions des articles 710 et 711 du Code de procédure pénale ;
Attendu que, pour infirmer le jugement et dire que l'exercice de la contrainte par corps était atteint par la prescription, la cour d'appel a prononcé par les motifs repris au moyen ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe susénoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Lyon, en date du 17 décembre 1998 et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Chambéry.