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28/03/2000 | FRANCE | N°00-80586;99-83967

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 mars 2000, 00-80586 et suivant


REJET des pourvois formés par :
- X...,
contre les arrêts de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris ;
I. Le premier, en date du 19 mai 1999, qui, dans l'information suivie contre lui pour complicité d'assassinat, a rejeté sa demande en annulation de pièces de la procédure ;
II. Le second, en date du 10 janvier 2000, qui, l'a renvoyé devant la cour d'assises de Paris sous l'accusation de meurtre.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation dirigé contre l'arrêt en date du 19

mai 1999, pris de la violation des articles 63 à 63-4, 173, 206, 570, 571, 591 et...

REJET des pourvois formés par :
- X...,
contre les arrêts de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris ;
I. Le premier, en date du 19 mai 1999, qui, dans l'information suivie contre lui pour complicité d'assassinat, a rejeté sa demande en annulation de pièces de la procédure ;
II. Le second, en date du 10 janvier 2000, qui, l'a renvoyé devant la cour d'assises de Paris sous l'accusation de meurtre.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation dirigé contre l'arrêt en date du 19 mai 1999, pris de la violation des articles 63 à 63-4, 173, 206, 570, 571, 591 et 593 du code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué (Ch. d'Acc. CA Paris, 19 mai 1999) a dit n'y avoir lieu à annuler un acte ou une pièce de la procédure pénale ;
" aux motifs que X... a été pris en charge à sa demande par les fonctionnaires de police le 14 avril 1998 à 6 h 30 ; qu'étant ivre, les fonctionnaires, n'ayant pu le faire hospitaliser, ont attendu qu'il soit dégrisé ; qu'à 9 h 30, à sa demande, l'intéressé a été entendu et a relaté les faits pour lesquels il est mis en examen ; qu'à l'issue de son audition et au regard de ses déclarations, il a été sans délai remis aux fonctionnaires de la 5e division de police judiciaire qui ont pris la précaution de le soumettre à une mesure de contrôle d'alcoolémie, l'ont placé en garde à vue et lui ont notifié ses droits à 13 h 50, avant de l'entendre, après qu'il eût été laissé au repos à partir de 10 h 05 que la mesure de garde à vue a rétroagi à 6 h 30, heure de son interpellation ; qu'en cet état, aucune méconnaissance des obligations légales, internes ou conventionnelles ne peut être reprochée aux fonctionnaires de police, lesquels au cours d'une enquête préliminaire, comme en l'espèce, n'ont pas à placer en garde à vue un individu souhaitant leur faire des déclarations par procès-verbal, avant même que ces déclarations ne soient faites, et ce nonobstant les suites qui pourraient être données auxdites déclarations ; que X... a été placé en garde à vue dès que des indices suffisants du sérieux de ses déclarations ont été révélés ; que la notification des droits n'est donc pas tardive ;
" alors que toute personne qu'un officier de police judiciaire garde à sa disposition doit être immédiatement informée des droits attachés à son placement en garde à vue ; qu'en l'espèce, il ressort du procès-verbal établi le 14 avril 1998 à 9 h 30 (D. 204) que X... était complètement dégrisé dès 9 h 30 et qu'il a pu, dès ce moment-là, subir un interrogatoire au cours duquel il a effectué, sur interventions de l'officier de police judiciaire, des déclarations qui ont entraîné sa mise en examen puis sa mise en accusation ; que, dès son interpellation à 6 h 30, X... a été placé en garde à vue puisqu'il avait été dès ce moment-là "menotté et palpé" (D. 200) puis transféré pour être remis aux policiers d'un autre service (D. 205) ; que dès lors la notification de la garde à vue et des droits attachés à cette mesure, intervenue à 13 h 50 (D. 208) seulement, était tardive et a nécessairement porté préjudice aux intérêts de X... " ;
Attendu que X..., mis en examen du chef de complicité d'assassinat, a régulièrement présenté à la chambre d'accusation une requête en annulation de pièces de la procédure, en raison d'un retard injustifié dans la notification des droits afférents à sa garde à vue en exposant qu'il s'était trouvé " de fait " en garde à vue dès le 14 avril 1998 à 6 h 30, heure de son arrivée au commissariat, et qu'il aurait dû se voir notifier lesdits droits au plus tard à 9 h 30, dès le début de son audition, alors qu'ils ne lui ont été notifiés qu'à 13 h 50 ;
Attendu que, pour rejeter cette requête, l'arrêt attaqué prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que la notification des droits a eu lieu au moment même où l'officier de police judiciaire a décidé le placement en garde à vue, la chambre d'accusation a justifié sa décision ;
Que dès lors, le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen, dirigé contre l'arrêt en date du 10 janvier 2000, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 221-1, 311-1 et 311-10 du Code pénal, 202, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de base légale et violation des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt attaqué (Ch. d'Acc. CA Paris, 10 janvier 2000) a prononcé la mise en accusation de X... du chef d'homicide volontaire ;
" aux motifs qu'il résulte du dossier que la mort a été donnée à la victime par un seul coup de poignard porté dans une partie vitale du corps à l'aide d'une arme blanche dite "de commando" ; que selon le mis en examen, le coup a été porté par un individu se tenant en arrière de la victime et passant ses deux bras par-dessus la tête de celle-ci qui, surprise par ce geste, ne présentait qu'une lésion de défense à la main gauche ; qu'il s'ensuit qu'existent des charges suffisantes caractérisant l'intention homicide ; que, malgré la constance des déclarations de X..., n'existe aucun élément objectif corroborant la présence d'un autre personnage ; que la seule arme retrouvée est celle qui a tué et qui appartenait au mis en examen ; que rien ne permet de conclure à l'existence d'une autre arme ; qu'en cet état, alors même que, selon son propre aveu, X... se trouvait assis derrière la victime, existent à son encontre des charges suffisantes caractérisant le crime d'homicide volontaire ; qu'il convient de requalifier les faits en ce sens ;
" alors qu'il résulte de l'article 202, alinéa 1er, du Code de procédure pénale que la chambre d'accusation est investie du droit de faire informer, à l'égard des personnes mises en examen renvoyées devant elle, sur tous les chefs de poursuite résultant du dossier de la procédure, qui n'auraient pas été visés par l'ordonnance du juge d'instruction ; que, selon l'alinéa 2 du même article, elle ne peut statuer sans ordonner un complément d'information que si les chefs de poursuite visés à l'alinéa précédent ont été compris dans la mise en examen faite par le juge d'instruction ; qu'il ressort de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 14 avril 1998, X... a déclaré avoir participé 15 ans plus tôt, le 8 octobre 1983, à une tentative de vol d'un chauffeur de taxi, au cours de laquelle son complice avait porté à la victime un coup de couteau ayant entraîné la mort ; qu'à la suite d'un nouveau réquisitoire de réouverture de l'information sur charges nouvelles, X... a été mis en examen le 15 avril 1998 du chef de complicité d'assassinat (D. 238-D. 242) ; que l'intéressé ayant toujours maintenu ses déclarations, le 1er septembre 1999 les faits ont été requalifiés et le juge d'instruction a notifié à X... sa mise en examen pour tentative de vol précédée, accompagnée ou suivie de violences ayant entraîné la mort (D. 438) ; que le juge d'instruction a, sur réquisitions conformes du Parquet, retenu ce chef de poursuite et ordonné la transmission des pièces (D. 451-D. 453) au procureur général qui a requis le renvoi devant la Cour d'Assises sous la même qualification ; qu'en renvoyant X... du chef d'homicide volontaire sans ordonner un complément d'information et sans lui permettre de s'expliquer et de se défendre sur ce nouveau chef d'accusation, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés " ;
Attendu que les motifs de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la chambre d'accusation, après avoir exposé les faits et répondu comme elle le devait aux articulations essentielles du mémoire dont elle était saisie, a relevé l'existence de charges qu'elle a estimé suffisantes contre X... initialement mis en examen pour complicité d'assassinat, pour ordonner, après requalification, son renvoi devant la cour d'assises sous l'accusation de meurtre ;
Qu'en effet, les chambres d'accusation apprécient souverainement si les faits retenus à la charge de la personne mise en examen sont constitutifs d'une infraction, la Cour de Cassation n'ayant d'autre pouvoir que de vérifier si, à supposer ces faits établis, la qualification justifie la saisine de la juridiction de jugement ;
Que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que la chambre d'accusation était compétente, qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle l'accusé a été renvoyé, que la procédure est régulière et que les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 00-80586;99-83967
Date de la décision : 28/03/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° GARDE A VUE - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Moment - Audition au cours d'une enquête préliminaire - Garde à vue succédant à une audition - Délai - Point de départ.

1° ENQUETE PRELIMINAIRE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Moment - Audition - Garde à vue succédant à une audition - Délai - Point de départ 1° DROITS DE LA DEFENSE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Moment - Audition au cours d'une enquête préliminaire - Garde à vue succédant à une audition - Délai - Point de départ 1° ENQUETE PRELIMINAIRE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Retard - Circonstance insurmontable 1° DROITS DE LA DEFENSE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Retard - Circonstance insurmontable - Etat d'ébriété 1° GARDE A VUE - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Moment - Garde à vue succédant à des opérations effectuées sans contrainte - Délai - Point de départ 1° DROITS DE LA DEFENSE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Moment - Garde à vue succédant à des opérations effectuées sans contrainte - Délai - Point de départ.

1° Conformément aux dispositions des articles 77 et 78 du Code de procédure pénale, une personne en état d'ivresse, qui a accepté de suivre sans contrainte les policiers jusqu'au commissariat, pour y être entendue en enquête préliminaire, peut, après complet dégrisement, faire l'objet d'une audition avant d'être placée en garde à vue. Cette audition n'est pas irrégulière dès lors que la notification des droits prévue par l'article 63-1 du Code de procédure pénale est effectuée dès le placement effectif en garde à vue, quand bien même, dans l'intérêt de la personne concernée, le délai de cette mesure a été calculée à compter de l'heure à laquelle elle a été prise en charge par les services de police(1).

2° CHAMBRE D'ACCUSATION - Pouvoirs - Qualification - Qualification donnée aux faits par le ministère public ou le juge d'instruction - Modification.

2° Les chambres d'accusation peuvent, en application de l'article 202, alinéa 2, du Code de procédure pénale, modifier et compléter les qualifications données aux faits par le ministère public ou le juge d'instruction sans ordonner une nouvelle information si les chefs de poursuite qu'elles retiennent ont été compris dans les faits pour lesquels la personne a été mise en examen par le juge d'instruction. N'encourt pas la censure l'arrêt d'une chambre d'accusation qui renvoie devant le cour d'assises sous l'accusation de meurtre une personne initialement mise en examen pour complicité d'assassinat(2).


Références :

1° :
2° :
Code de procédure pénale 202, al. 2
Code de procédure pénale 63-1, 77, 78

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (chambre d'accusation), 1999-05-19 et (cour d'assises), 2000-01-10

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1995-04-03, Bulletin criminel 1995, n° 140, p. 394 (rejet), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1998-03-04, Bulletin criminel 1998, n° 84, p. 231 (cassation) ;

Chambre criminelle, 1998-10-14, Bulletin criminel 1998, n° 260 (1°), p. 751 (rejet), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 2000-01-19, Bulletin criminel 2000, n° 33 (1°), p. 82 (rejet). A rapprocher : Chambre criminelle, 2000-02-16, Bulletin criminel 2000, n° 72 (3°), p. 201 (rejet). CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1997-03-19, Bulletin criminel 1997, n° 111, p. 369 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 mar. 2000, pourvoi n°00-80586;99-83967, Bull. crim. criminel 2000 N° 136 p. 401
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 136 p. 401

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : Mme Commaret.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Le Corroller.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:00.80586
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