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19/01/2000 | FRANCE | N°99-86090

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 janvier 2000, 99-86090


REJET du pourvoi formé par :
- X..., Y...,
contre l'arrêt n° 321-99 de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Colmar, en date du 17 juin 1999, qui, dans l'information suivie notamment contre eux des chefs de faux en écriture publique et complicité, complicité de trafic d'influence et de corruption, usage de faux, a rejeté leur requête en annulation d'actes de la procédure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle de la Cour de Cassation en date du 8 octobre 1999 prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu les mémoires ampliatif, complÃ

©mentaire et rectificatif produits, communs aux demandeurs ;
Attendu que X....

REJET du pourvoi formé par :
- X..., Y...,
contre l'arrêt n° 321-99 de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Colmar, en date du 17 juin 1999, qui, dans l'information suivie notamment contre eux des chefs de faux en écriture publique et complicité, complicité de trafic d'influence et de corruption, usage de faux, a rejeté leur requête en annulation d'actes de la procédure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle de la Cour de Cassation en date du 8 octobre 1999 prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu les mémoires ampliatif, complémentaire et rectificatif produits, communs aux demandeurs ;
Attendu que X... et Y..., notaires associés à Saverne, mis en examen des chefs précités, ont présenté le 4 janvier 1999, sur le fondement de l'article 173 du Code de procédure pénale, requête à la chambre d'accusation de la cour d'appel de Colmar aux fins d'annulation d'actes de la procédure ; que, par l'arrêt attaqué, leur requête a été rejetée ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 7 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, 66 de la Constitution du 4 octobre 1958, 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 63, 63-1 et suivants, 76, 81, 94, 154, 170, 171, 174, 570, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que, par l'arrêt attaqué, la chambre d'accusation a refusé d'annuler la garde à vue de Me Y... et la procédure subséquente ;
" aux motifs qu'il résulte des pièces du dossier qu'une perquisition a été opérée à l'étude de Me Y... et de M. X... à Saverne le 16 mars 1994 à partir de 10 heures 10 ; que Me Y..., arrivé à l'étude à 11 heures 10, a assisté à cette perquisition jusqu'à 13 heures 50, heure à laquelle, sur instruction du magistrat instructeur, l'officier de police judiciaire a accompagné Me Y... à son domicile aux fins de perquisition, celle-ci ayant commencé à 14 heures 15 et s'étant terminée à 15 heures 30 ; que c'est précisément à 15 heures 30 que l'officier de police judiciaire a notifié à Me Y... la mesure de garde à vue, précisant que celle-ci prenait effet à compter du 16 mars 1994 à 11 heures 10, heure à laquelle Me Y... s'était présenté à son étude alors que s'y déroulait une perquisition effectuée par le magistrat instructeur ; qu'il résulte cependant de l'examen des pièces de la procédure que c'est à tort que l'officier de police judiciaire a considéré qu'il convenait en l'espèce de faire remonter les effets de la garde à vue à l'heure précise à laquelle, librement, Me Y... s'était rendu à son étude de notaire où était effectuée une perquisition ; qu'à ce moment-là, soit à 11 heures 10, les conditions de la garde à vue n'étaient pas réunies, Me Y... n'étant alors soumis à aucune mesure particulière de surveillance et sa liberté d'aller et venir ne faisant alors l'objet d'aucune entrave ; que ce n'est qu'à partir de 15 heures 30, soit à la fin de la perquisition au domicile de Me Y... que les conditions de la garde à vue étaient réunies ; que c'est précisément à cette heure-là, qu'ont été notifiés à Me Y... les droits mentionnés aux articles 63-2, 63-3 et 63-4 ainsi que les dispositions relatives à la garde à vue prévues par l'article 63 ;
" alors que l'article 63-1 du Code de procédure pénale fait obligation à l'officier de police judiciaire de notifier immédiatement les droits attachés au placement en garde à vue ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces du dossier que Me Y..., qui s'est vu notifier à 15 heures 30 sa garde vue avec prise d'effet à 11 heures 10, soit à partir de son arrivée à son étude où se déroulait une perquisition, a été considéré comme placé en garde à vue dès ce moment-là ; qu'en particulier, le procès-verbal de notification de fin de garde à vue (D 737) récapitule le déroulement de celle-ci à partir de 11 heures 10 en y incluant notamment la perquisition effectuée à l'étude notariale jusqu'à 13 heures 50, heure à laquelle le magistrat instructeur a "prescrit" à l'officier de police judiciaire "d'accompagner Me Y... à son domicile aux fins d'y effectuer une perquisition", le transport au domicile de Me Y... de 13 heures 50 à 14 heures 15 et ladite perquisition de 14 heures 15 à 15 heures 30 ; qu'en conséquence l'officier de police judiciaire devait notifier ses droits à Me Y... dès 11 heures 10, moment à partir duquel, "accompagné" à son domicile aux fins de perquisition, celui-ci n'avait plus sa liberté d'aller et venir, tout retard injustifié dans la mise en oeuvre de cette obligation de notification ayant nécessairement porté atteinte à ses intérêts ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la chambre d'accusation a méconnu le sens et la portée de l'article 63-1 du Code de procédure pénale qu'elle a ainsi violé, ensemble les autres textes susvisés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le juge d'instruction a procédé le 16 mars 1994, de 10 heures 10 à 13 heures 50, à une perquisition dans l'étude des notaires associés X... et Y... ; qu'à l'issue de cette perquisition, ce dernier, qui était arrivé à l'étude à 11 heures 10, a rejoint son domicile, accompagné d'un officier de police judiciaire, lequel, à la demande du magistrat instructeur, y a procédé à une perquisition, en présence de l'intéressé, de 14 heures 15 à 15 heures 30 ; que Y... a alors été placé en garde à vue, avec prise d'effet à 11 heures 10 ; que ses droits lui ont été aussitôt notifiés ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que, d'une part, il n'importe que, dans l'intérêt du demandeur, la garde à vue ait été calculée à compter de son arrivée à l'étude et que, d'autre part, la notification des droits mentionnés à l'article 63-1 du Code de procédure pénale a été faite dès le placement effectif en garde à vue, qui pouvait intervenir à l'issue d'opérations effectuées sans contrainte, la chambre d'accusation a rejeté à bon droit la demande en annulation de la garde à vue ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 7 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, 66 de la Convention du 4 octobre 1958, 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 56, 57, 66, 81, 95, 96, 97, 151, 170, 171, 174, 429, 570, 591 et 593 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que, par l'arrêt attaqué, la chambre d'accusation a refusé d'annuler le procès-verbal de perquisition daté du 17 mars 1994 (D 731), ainsi que la procédure subséquente ;
" aux motifs qu'il résulte des pièces du dossier que les deux procès-verbaux litigieux (procès-verbal de transport aux fins de perquisition daté du 16 mars 1994 D 736 et procès-verbal de perquisition daté du 17 mars 1994 D 731) portent des dates différentes alors qu'à l'évidence ils ont été rédigés le même jour ; que la mention de la date du 17 mars 1994 sur le procès-verbal de perquisition et de saisie est nécessairement erronée, dès lors que les pièces du dossier relatant des actes contemporains du procès-verbal litigieux conduisent à constater que la date du procès-verbal de perquisition et de saisie ne peut être que le 16 mars 1994 ; qu'il ne s'agit là que d'une erreur matérielle qui ne peut avoir pour conséquence l'annulation d'actes de procédure ;
" alors que tout procès-verbal n'a de valeur probante que s'il est régulier en la forme ; qu'ayant constaté que le procès-verbal de perquisition et de saisie daté du 17 mars 1994 portait une date fausse, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés et les droits de la défense en refusant d'annuler cette pièce et la procédure subséquente " ;
Attendu que les demandeurs ne sauraient se faire un grief d'une pure erreur matérielle de date, les opérations de perquisition et de saisie à l'étude des notaires associés ayant manifestement été effectuées le 16 et non le 17 mars 1994 ;
Que le moyen doit être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 80, 81, 86, 151, 153, 170, 171, 174, 570, 591 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense et de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que, par l'arrêt attaqué, la chambre d'accusation a refusé d'annuler les actes d'instruction accomplis par le juge d'instruction au-delà de sa saisine et la procédure subséquente ;
" aux motifs qu'il est demandé à la chambre d'accusation de constater que le deuxième interrogatoire auquel a été soumis chacun des appelants est intervenu sans qu'il n'existe préalablement de réquisitoire supplétif ni a fortiori une mise en examen et par voie de conséquence, de prononcer la nullité du réquisitoire du 18 mars 1994 et de toute la procédure subséquente ; que la chambre d'accusation peut relever d'office toute nullité d'un acte de procédure ; mais qu'en l'espèce l'examen des pièces du dossier d'information ne révèle aucune irrégularité de la procédure de nature à entraîner la nullité d'un acte de l'information ;
" alors, d'une part, que les pouvoirs accordés au juge d'instruction par l'article 81, premier aliéna, du Code de procédure pénale et qui lui permettent de procéder, conformément à la loi, à tous les actes d'information qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité, sont limités aux seuls faits dont il est régulièrement saisi en application des articles 80 et 86 de ce Code ; que lorsqu'il acquiert la connaissance de faits nouveaux il ne peut, avant toute communication au procureur de la République et extension de sa saisine, qu'effectuer des vérifications sommaires pour en apprécier la vraisemblance, sans pouvoir se livrer sur eux à des actes d'instruction ayant un caractère coercitif ; qu'en l'espèce, bien que le réquisitoire supplétif du 4 mars 1994 ne l'invitât pas à étendre l'information à des agissements relatifs à l'existence prétendue d'un faux en écritures publiques, le juge d'instruction a, de sa propre initiative, procédé et fait procéder à diverses investigations (ordonnance de transport à l'étude notariale, perquisition à cette étude et au domicile de Me Y... ; garde à vue de ce dernier et audition consécutive), et ce n'est qu'après avoir effectué l'ensemble de ces actes qu'il a transmis la procédure au parquet selon ordonnance de soit-communiqué du 18 mars 1994 pour obtenir une extension de sa saisine qui a ainsi été sollicitée sur le fondement d'actes d'instruction coercitifs déjà réalisés et non en vue d'être autorisé à les accomplir ; que, dès lors, en refusant d'annuler ces actes accomplis par le juge d'instruction hors sa saisine et la procédure subséquente, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés ;
" alors, d'autre part, que les pouvoirs accordés au juge d'instruction par l'article 81, premier aliéna, du Code de procédure pénale et qui lui permettent de procéder, conformément à la loi, à tous les actes d'information qu'il juge utiles à la manifestation de la vérité, sont limités aux seuls faits dont il est régulièrement saisi en application des articles 80 et 86 de ce Code ; que lorsqu'il acquiert la connaissance de faits nouveaux il ne peut, avant toute communication au procureur de la République et extension de sa saisine, qu'effectuer des vérifications sommaires pour en apprécier la vraisemblance, sans pouvoir se livrer sur eux à des actes d'instruction ayant un caractère coercitif ; qu'en l'espèce, les seuls faits nouveaux ayant donné lieu au réquisitoire supplétif du 18 mars 1994 concernaient l'insertion après coup, au sein de l'acte notarié portant constitution de la SEML de Marmoutier, d'une convention de promesse de travaux de terrassement conclue le 23 avril 1991 avec l'entreprise Z... ; qu'en diligentant des actes d'instruction sur la prétendue apposition d'une fausse signature de A... sur l'acte constitutif de la SEML, notamment une expertise excédant le cadre de vérifications sommaires d'urgence et une garde à vue ayant un caractère coercitif, le juge d'instruction a derechef méconnu les limites de sa saisine ; que, dès lors, en refusant d'annuler ces actes et la procédure subséquente, la chambre d'accusation a de nouveau violé les textes susvisés ;
" alors, enfin, qu'en se bornant à l'affirmation péremptoire de la régularité de la procédure, ce à quoi se réduit la motivation de son arrêt en ce qui concerne les limites de la saisine du juge d'instruction, question sur laquelle elle a pourtant expressément déclaré vouloir se prononcer, la chambre d'accusation a en toute hypothèse entaché sa décision de défaut de motifs " ;
Sur le septième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 80, 116, 170, 171, 174, 485, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que, par l'arrêt attaqué, la chambre d'accusation a refusé d'annuler les deux procès-verbaux d'interrogatoire de première comparution de Me X... et de Me Y..., ainsi que la procédure subséquente ;
" aux motifs que Me X... et Me Y... demandent à la Cour de constater qu'ils ont fait l'objet chacun d'un interrogatoire de première comparution sans que leur aient été notifiés préalablement les faits reprochés, contrairement à l'article 116 du Code de procédure pénale et à l'exigence d'un procès équitable au sens de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ; que la chambre d'accusation peut relever d'office toute nullité d'un acte de procédure ; mais qu'en l'espèce l'examen des pièces du dossier d'information ne révèle aucune irrégularité de la procédure de nature à entraîner la nullité d'un acte de l'information ;
" alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 116 du Code de procédure pénale, le juge d'instruction, lors de la première comparution, fait connaître expressément à la personne mise en examen chacun des faits dont il est saisi et pour lesquels elle est mise en examen, ainsi que la qualification juridique de ces faits ; qu'en l'espèce, il ressort des procès-verbaux de première comparution de Me X... (D 765 à 763) et de Me Y... (D 762 à 760) que le juge d'instruction s'est abstenu de leur exposer concrètement les faits reprochés, se bornant à les évoquer incidemment et succinctement au soutien de la notification formelle des qualifications pénales fondant leurs mises en examen respectives ; que, dès lors, en se refusant à annuler les procès-verbaux litigieux et la procédure subséquente, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés, spécialement les articles 16 du Code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
" alors, d'une part, qu'en se bornant à l'infirmation péremptoire de la régularité de la procédure, ce à quoi se réduit la motivation de son arrêt en ce qui concerne la validité des procès-verbaux litigieux, question sur laquelle elle a pourtant expressément déclaré vouloir se prononcer, la chambre d'accusation a, en toute hypothèse, entaché sa décision d'un défaut de motifs " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que X... et Y... ont demandé à la chambre d'accusation, dans leur mémoire déposé devant elle et non dans leur requête à fin de nullité, qu'elle constate que les faits reprochés ne leur ont pas été notifiés lors de leur interrogatoire de première comparution et que " le deuxième interrogatoire auquel a été soumis chacun des appelants (sic) est intervenu sans qu'il existe préalablement de réquisitoire supplétif ni a fortiori une mise en examen " ;
Que la juridiction d'instruction du second degré, après avoir relevé que ces conclusions ne pouvaient être regardées comme une requête régulière en l'absence de respect des formalités prévues par l'article 173 du Code de procédure pénale, se prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu qu'en cet état les demandeurs, à qui, contrairement à leurs allégations, ont bien été notifiés les faits pour lesquels ils étaient mis en examen et leur qualification juridique, ne sauraient par ailleurs se faire un grief des motifs de l'arrêt, dès lors que les actes d'instruction critiqués ont été accomplis dans le cadre de la saisine du juge d'instruction, qui s'étendait à toutes personnes ayant participé comme auteurs ou complices aux faits poursuivis, que les demandeurs sont sans qualité pour se prévaloir de prétendues nullités concernant une autre personne mise en examen et que leur propre demande ne comportait pas de motifs particuliers ;
D'où il suit que les moyens, pour partie irrecevables comme formulant des griefs présentés pour la première fois devant la Cour de Cassation ou manquant en fait, ne sauraient, pour le surplus, être accueillis ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 81, 101 et suivants, 152, 170, 171, 174, 570, 591 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense et de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que, par l'arrêt attaqué, la chambre d'accusation a refusé d'annuler les pièces et annexes intégrées au dossier, d'une part, sous les cotes D 854-855, D 850 (folios 1 et 2), d'autre part, sous les cotes D 2557-2558, D 4027 à D 4030 et D 4141 à D 4144, ainsi que la procédure subséquente ;
" aux motifs que, pour les premières, il résulte des pièces du dossier que le magistrat instructeur a annexé à la procédure d'information des documents qui ont été remis par les témoins M... et R..., lors de leur audition par l'officier de police judiciaire qui a fait mention dans les procès-verbaux desdites auditions, de la remise de ces documents, ; que le fait qu'à la suite de la transmission au magistrat instructeur par l'officier de police judiciaire des auditions et documents annexés, lesdites pièces aient été cotées au dossier ne contrevient à aucune disposition du Code de procédure pénale ; et que, pour les secondes, les pièces litigieuses concernent des auditions de témoins et des copies de pièces remises par ceux-ci et mentionnées dans leurs auditions ; que si les mis en examen se plaignent de ce que les officiers de police judiciaire se sont bornés à indiquer dans les procès-verbaux que les témoins se référaient à des pièces, alors qu'ils auraient dû constater eux-mêmes la remise de ces pièces et authentifier leur annexion au dossier de la procédure, ces documents annexés ont été indiqués au dossier par le greffier qui les a cotés, cette façon de faire n'est pas contraire aux dispositions du Code de procédure pénale et ne peut méconnaître les droits de la défense dès lors que les conseils des mis en examen ont pu régulièrement en prendre connaissance et faire à leur sujet toutes observations utiles ;
" alors, qu'en l'absence d'authentification par l'officier de police judiciaire des pièces qui lui sont remises par un témoin lors de son audition, il n'existe aucune garantie que les pièces intégrées comme telles au dossier sont bien celles-là mêmes qui ont été remises par le témoin ; qu'en validant cette pratique la chambre d'accusation a violé les droits de la défense, ensemble les textes susvisés " ;
Attendu que, par les motifs énoncés dans l'arrêt et inexactement reproduits au moyen, la chambre d'accusation a justifié sa décision sans méconnaître aucun des textes invoqués ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être rejeté ;
Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 81, 101 et suivants, 170, 171, 174, 570, 591 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense et de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de réponse à une articulation essentielle du mémoire des mis en examen, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que, par l'arrêt attaqué, la chambre d'accusation a refusé d'annuler l'audition de l'expert B... en qualité de témoin et la procédure subséquente ;
" aux motifs qu'il ne résulte d'aucune disposition du Code de procédure pénale que le magistrat instructeur ne peut entendre comme témoin pour recueillir des informations techniques un expert qu'il a commis antérieurement ni lui remettre des pièces afin de connaître son avis sur celles-ci ;
" alors, d'une part, que dans leur mémoire, les mis en examen n'invoquaient pas comme cause de nullité le fait que le juge d'instruction ait remis une pièce au témoin pour connaître son avis sur elle, mais le fait qu'il la lui ait communiquée avant son audition ; qu'en éludant cette question par une considération d'ordre général sur la possibilité pour le magistrat instructeur de communiquer des pièces aux témoins pour recueillir les avis, la chambre d'accusation a entaché sa décision d'un défaut de réponse à une articulation essentielle dudit mémoire ;
" alors, d'une part, que l'obligation de neutralité du juge d'instruction lui interdit de communiquer des documents à une personne citée comme témoin, destinés à lui permettre de préparer sa déposition et donc susceptibles d'orienter celle-ci ; qu'en l'espèce le juge d'instruction, souhaitant entendre l'expert B... comme témoin sur la valeur du rapport de l'expert privé F..., lui avait communiqué au préalable le rapport de ce dernier ; qu'en refusant d'invalider cette pratique, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés, ensemble les droits de la défense " ;
Sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation des articles 11, 81, 166, 167, 170, 171, 174, 570, 591 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense et de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation du secret de l'instruction, défaut de réponse à une articulation essentielle du mémoire des mis en examen, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que, par l'arrêt attaqué, la chambre d'accusation a refusé d'annuler l'ensemble des actes de la procédure pour violation du secret de l'instruction, à tout le moins les notes techniques des experts B... et D... versées au dossier de la procédure sans autre formalité, respectivement le 27 mars 1998, sous cotes D 4964 à 4975 (pour l'expert B...) et le 30 mars 1998, sous cotes D 4983 à 4989 (pour l'expert D...), ainsi que la procédure subséquente ;
" aux motifs que, s'agissant de la note de M. B... (D 4964 à D 4975), il résulte des pièces du dossier que lors de son audition en qualité de témoin le 27 mars 1998, cet expert a lui-même remis de sa propre initiative au juge d'instruction (D 4679) cette note datée du 26 mars 1998 ; que le magistrat instructeur s'est borné à classer ladite note dans le dossier ; qu'en ce qui concerne la note litigieuse de M. D..., il résulte des pièces du dossier (D 4989) que cet expert n'a pu se rendre à la convocation du magistrat instructeur du 30 mars 1998, mais a fait parvenir à celui-ci la note litigieuse ; que, là aussi, le juge d'instruction s'est borné à classer au dossier cette note ;
" et que les experts en cause doivent être regardés comme des personnes qui concourent à la procédure d'instruction, tenus au secret professionnel au sens de l'article 11 du Code de procédure pénale ; qu'en l'espèce le magistrat instructeur n'a commis aucune violation du secret de l'instruction eu égard aux informations données aux deux experts ; qu'en tout état de cause la sanction d'une telle violation du secret de l'instruction relève des dispositions des articles 226-13 et 226-14 du Code pénal et n'est pas l'annulation des pièces de la procédure ;
" alors, d'une part, qu'en se déterminant de la sorte, sans rechercher, comme l'y invitait le mémoire des mis en examen, si les notes litigieuses ne constituaient pas en réalité des compléments d'expertise devant être soumis aux mêmes règles que les expertises elles-mêmes, la chambre d'accusation a entaché sa décision : d'un défaut de réponse à une articulation essentielle dudit mémoire, d'un manque de base légale au regard des textes et principes susvisés ;
" alors, d'autre part, qu'indépendamment des sanctions pénales dont elle est passible, une violation du secret de l'instruction, si elle est non pas postérieure, mais concomitante de l'accomplissement d'un acte de procédure, est de nature à en altérer la validité lorsqu'il en est résulté une atteinte aux droits des parties ; qu'en jugeant le contraire la chambre d'accusation a violé les textes et principes susvisés, spécialement l'article 11 du Code de procédure pénale ;
" alors, en outre, qu'ayant constaté que c'est en qualité de témoin que M. B... avait été entendu par le juge d'instruction le 27 mars 1998 et que c'est lors de son audition en cette qualité qu'il lui avait remis la note (D 4964 à 4975) portant étude de l'expertise privée de M. F... que le magistrat instructeur lui avait communiquée le 24 mars 1998, la chambre d'accusation ne pouvait, sans méconnaître les conséquences légales de ses propres constatations au regard des textes et principes susvisés, spécialement l'article 11 du Code de procédure pénale, affirmer que cette communication ne violait pas le secret de l'instruction dès lors qu'elle avait été faite à un expert ;
" alors, enfin, qu'en toute hypothèse, en ne recherchant pas, comme l'y invitait le mémoire des mis en examen, si les experts dont la mission avait pris fin pouvaient encore être regardés comme des parties concourant à la procédure d'instruction au sens de l'article 11 du Code de procédure pénale, la chambre d'accusation a entaché sa décision d'un défaut de réponse à une articulation essentielle dudit mémoire " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les demandeurs, après notification des rapports déposés par M. B..., commis en tant qu'expert en écritures par le juge d'instruction, et par MM. D... et G..., désignés en qualité de contre-experts, ont produit un rapport d'expertise privée, émanant de M. F..., que le juge d'instruction a communiqué pour observations à MM. B... et D... ; que lors de son audition en qualité de témoin, M. B... a remis spontanément une note qui a été immédiatement classée à la procédure ; que M. D..., empêché de se rendre à la convocation du magistrat instructeur, lui a adressé une fiche technique, qui a été également annexée au dossier ;
Attendu que, pour écarter les exceptions de nullité soulevées par les requérants, l'arrêt se prononce notamment par les motifs repris aux moyens ;
Qu'en cet état, et dès lors que, d'une part, aucun texte n'interdit au juge d'instruction de demander un avis technique aux experts précédemment commis par lui sur le mérite d'une expertise privée et que, d'autre part, les notes déposées par eux et jointes au dossier, qui n'ont pas la nature d'expertises, ont pu être consultées et discutées librement par la défense, la chambre d'accusation, qui n'avait pas à répondre mieux qu'elle ne l'a fait aux articulations essentielles du mémoire dont elle était saisie, a justifié sa décision ;
Qu'il s'ensuit que les moyens ne sont pas fondés ;
Sur le huitième moyen de cassation, pris de la violation des articles 157, 158, 170, 171, 174, 485, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que, par l'arrêt attaqué, la chambre d'accusation a refusé de prononcer l'annulation de l'ordonnance en date du 16 juillet 1997 commettant les contre-experts D... et G..., aux fins de se prononcer notamment sur les conclusions de l'expert privé K..., ainsi que l'annulation du rapport d'expertise dressé conformément aux termes de cette ordonnance par MM. D... et G... et celle de l'ensemble de la procédure subséquente ;
" aux motifs qu'il résulte des pièces du dossier (4734) que, dans son ordonnance de commission d'experts-contre-expertise confiée à MM. D... et G..., le magistrat instructeur a demandé à ces contre-experts "de faire toutes observations, constatations et déductions utiles à la manifestation de la vérité y compris sur le rapport de M. K..., joint en annexe à la demande de contre-expertise" ; qu'il y a lieu de constater que le magistrat instructeur n'a pas donné pour mission aux contre-experts de porter une appréciation sur les qualités et mérites des experts privés mais sur des travaux "d'expertise" privée ; qu'il n'y a là aucune irrégularité qui contreviendrait aux règles du Code de procédure pénale ; que si les experts en cause ont fait en l'espèce des commentaires et porté des appréciations sur les conclusions du rapport de M. K..., les experts sont fréquemment appelés à critiquer ou avaliser les travaux de leurs confrères sans qu'il y ait lieu à constater de nullité de procédure ou d'abus de pouvoir des experts, ou du magistrat instructeur qui les a commis ;
" alors, qu'en vertu de l'article 158 du Code de procédure pénale, la mission d'expertise ne peut avoir pour objet l'examen de questions d'ordre technique, le juge ne pouvant se décharger de son office en enjoignant à un expert de porter en ses lieu et place une appréciation qui lui incombe, notamment celle relative à la valeur de précédentes expertises ; que, dès lors, en jugeant que le fait de donner mission aux experts G... et D..., notamment de porter un jugement sur des travaux réalisés par l'expert privé K..., n'avait pas contrevenu aux règles du Code de procédure pénale, en la considération inopérante que les experts sont fréquemement appelés, hors tout abus de pouvoir de ceux-ci ou du magistrat les commettant, à critiquer ou avaliser les travaux de leurs confrères, la chambre d'accusation n'a pas légalement justifié sa décision, tout spécialement au regard du texte susvisé " ;
Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité de l'ordonnance de contre-expertise, l'arrêt se prononce par les motifs repris au moyen ;
Qu'en l'état de ces énonciations, la chambre d'accusation a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le neuvième moyen de cassation, pris de la violation des articles 14.3.g du Pacte international de New-York, relatif aux droits civils et politiques, 485, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que, par l'arrêt attaqué, la chambre d'accusation a refusé d'invalider la procédure diligentée contre Me Y... et Me X... sans que le droit garanti par l'article 14.3.g du Pacte international susvisé ait été notifié au premier lors de son placement en garde à vue et au second lors de son audition de première comparution ;
" aux motifs qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que le Pacte international de New York aurait été méconnu ; que les mis en examen ne démontrent pas qu'ils auraient été forcés à témoigner contre eux-mêmes ou de s'avouer coupables ; que l'absence de notification de ce texte aux mis en examen ne contrevient à aucune disposition du Code de procédure pénale ;
" alors qu'en vertu de l'article 14.3.g du Pacte international de New York relatif aux droits civils et politiques, qui est d'application directe en droit interne, toute personne accusée d'une infraction pénale a le droit à ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s'avouer coupable, le plein exercice de ce droit supposant qu'il soit expressément notifié à l'intéressé ; qu'en retenant, pour écarter le moyen de nullité tiré de la méconnaissance de ce texte, qu'il n'était pas démontré que les mis en examen auraient été forcés de témoigner contre eux-mêmes ou de s'avouer coupables, au lieu de tirer toutes conséquences du simple fait que ceux-ci avaient été entendus sans avoir été préalablement informés de la garantie que leur conférait ledit texte conventionnel, la chambre d'accusation a violé celui-ci " ;
Attendu que, contrairement aux allégations des demandeurs, ceux-ci n'ont pas été forcés de témoigner contre eux-mêmes ni de s'avouer coupables ;
Qu'il ne découle d'aucun texte que la garantie prévue par l'article 14.3.g du Pacte invoqué doive être notifiée à toute personne mise en examen préalablement à son interrogatoire, les dispositions de l'article 116, notamment dans son 3e alinéa, du Code de procédure pénale assurant en droit interne le respect des droits de la défense ;
Que le moyen manque en fait ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-86090
Date de la décision : 19/01/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° GARDE A VUE - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Moment - Garde à vue succédant à des opérations effectuées sans contrainte - Délai - Point de départ.

1° DROITS DE LA DEFENSE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Moment - Garde à vue succédant à des opérations effectuées sans contrainte - Délai - Point de départ.

1° Dès lors que la notification des droits mentionnés à l'article 63-1 du Code de procédure pénale a été faite dès le placement effectif en garde à vue, il n'importe que celle-ci, intervenue à l'issue d'opérations effectuées sans contrainte, ait été, dans l'intérêt de la personne gardée à vue, calculée à compter du début de ces opérations(1).

2° INSTRUCTION - Expertise - Expert - Avis technique demandé à un expert judiciaire sur une expertise privée - Droits de la défense.

2° INSTRUCTION - Droits de la défense - Expertise - Avis technique demandé à un expert judiciaire sur une expertise privée 2° EXPERTISE - Droits de la défense - Expert - Avis technique demandé à un expert judiciaire sur une expertise privée.

2° Aucun texte n'interdit au juge d'instruction de demander un avis technique à un expert, précédemment commis par lui, sur le mérite d'une expertise privée produite par une partie, dès lors que cet avis, qui n'a pas la nature d'expertise, est versé au dossier et peut être consulté et discuté librement par les parties.


Références :

1° :
2° :
Code de procédure pénale 11, 81, 166, 167, 170, 171, 174
Code de procédure pénale 63-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar (chambre d'accusation), 17 juin 1999

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1998-06-18, Bulletin criminel 1998, n° 200, p. 552 (rejet et cassation) ;

Chambre criminelle, 1998-10-14, Bulletin criminel 1998, n° 260 (1°), p. 751 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 jan. 2000, pourvoi n°99-86090, Bull. crim. criminel 2000 N° 33 p. 82
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 33 p. 82

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. Di Guardia.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Martin.
Avocat(s) : Avocat : M. Cossa.

Origine de la décision
Date de l'import : 31/08/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:99.86090
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