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15/12/1999 | FRANCE | N°99-81431;99-81432

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 15 décembre 1999, 99-81431 et suivant


IRRECEVABILITE et REJET des pourvois formés par :
- X... Younès,
- X... Atika, veuve Y...,
contre l'arrêt de la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, en date du 15 janvier 1999, qui les a condamnés, le premier, pour assassinat, à 18 ans de réclusion criminelle, la seconde, pour complicité de meurtre, à 15 ans de la même peine, ainsi que, en ce qui concerne la seconde, contre l'arrêt incident du 12 janvier 1999 ayant rejeté sa demande de mise en liberté et, en ce qui concerne le premier, contre les arrêts n° 13, n° 14 et n° 15, en date du 15 janvier 1999, par lesquels

la Cour a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourv...

IRRECEVABILITE et REJET des pourvois formés par :
- X... Younès,
- X... Atika, veuve Y...,
contre l'arrêt de la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, en date du 15 janvier 1999, qui les a condamnés, le premier, pour assassinat, à 18 ans de réclusion criminelle, la seconde, pour complicité de meurtre, à 15 ans de la même peine, ainsi que, en ce qui concerne la seconde, contre l'arrêt incident du 12 janvier 1999 ayant rejeté sa demande de mise en liberté et, en ce qui concerne le premier, contre les arrêts n° 13, n° 14 et n° 15, en date du 15 janvier 1999, par lesquels la Cour a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
Sur la recevabilité du pourvoi de Younès X... contre les arrêts civils :
Attendu que le pourvoi, formé le 5 mars 1999, plus de 5 jours francs après que les arrêts avaient été prononcés contradictoirement le 15 janvier 1999, est irrecevable, comme tardif, en application de l'article 568 du Code de procédure pénale :
Sur le premier moyen de cassation, proposé pour Atika X... et pris de la violation des articles 5, 6, 13 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, 148 et suivants, 215, 328, 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que, par arrêt incident du 12 janvier 1999, la Cour a rejeté la demande de mise en liberté formulée par l'accusée ;
" aux motifs que la détention d'un accusé, pendant la durée de son procès devant la cour d'assises, obéit, en vertu des effets de l'ordonnance de prise de corps, à des impératifs autres que ceux énoncés par l'article 144 du Code de procédure pénale pour la détention provisoire ; qu'en effet, la détention d'un accusé pendant la durée de son procès relève des dispositions de l'article 215 du Code de procédure pénale puisqu'une ordonnance de prise de corps doit être délivrée à l'encontre de tout accusé majeur sans aucune motivation ; que cette délivrance n'est facultative que pour les mineurs en application de l'article 9, dernier alinéa, de l'ordonnance du 2 février 1945 ; qu'il s'ensuit que la détention d'Atika X..., veuve Y..., durant le procès criminel s'impose afin d'assurer, d'une part, la bonne marche du procès jusqu'à son terme, et, d'autre part, en cas de condamnation, la mise à exécution immédiate de la peine, la cour d'assises n'ayant pas le pouvoir, dans cette éventualité, de délivrer mandat de dépôt ; que, de plus, à défaut de justification de l'existence de motif exceptionnel, tel qu'un état de santé déficient, il convient d'assurer, pendant le procès pénal, une égalité entre tous les accusés, notamment lorsque, comme en l'espèce, ils sont de nationalité étrangère et renvoyés devant cette Cour des chefs d'assassinat et de complicité ; qu'il y a lieu, dès lors, en l'état de la législation actuelle, de rejeter la demande de mise en liberté d'Atika X..., veuve Y..., et de maintenir les effets de l'ordonnance de prise de corps prononcée le 12 juin 1998 par la chambre d'accusation (PV débats pages 7 et 8) ;
" 1° alors que, d'une part, doit être spécialement motivée en fait comme en droit toute décision portant refus de mise en liberté d'un accusé ;
" 2° alors que, d'autre part, viole la présomption d'innocence, ensemble le principe d'impartialité, la Cour qui prend en considération les modalités à venir d'exécution immédiate de la condamnation pour refuser la liberté sollicitée par l'accusé à la première audience utile devant la cour d'assises " ;
Attendu que, pour rejeter la demande de mise en liberté présentée par Atika X..., la cour d'assises se prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi les juges ont fait l'exacte application de la loi ;
Qu'en effet si, pendant la durée du procès criminel, la détention de l'accusé est de droit en exécution de l'ordonnance de prise de corps, l'article 148-1 du Code de procédure pénale lui permet, au cours des débats, de solliciter sa mise en liberté ; que, toutefois, la cour d'assises, pour apprécier la possibilité d'y faire droit, ne se prononce pas au regard des critères fixés par l'article 144 dudit Code mais doit notamment rechercher si, en fonction des éléments de l'espèce, souverainement appréciés par elle, une telle mesure n'est pas de nature à nuire au bon déroulement du procès, à la manifestation de la vérité ou à la mise à exécution, en cas de condamnation, de la sanction prononcée ;
Que, dès lors, le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen de cassation, proposé pour Younès X... et pris de la violation des articles 378 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que le procès-verbal des débats a été rédigé et signé le 19 janvier 1999, soit postérieurement à l'expiration d'un délai de 3 jours à compter du prononcé de la décision ;
" alors que le procès-verbal des débats doit être dressé et signé dans les 3 jours de la décision ; que, l'arrêt ayant été rendu le 15 janvier 1999, le procès-verbal des débats devait être signé au plus tard le 18 janvier 1999 ; que, dès lors, la procédure et l'arrêt de condamnation doivent être annulés, dès lors qu'il a ainsi nécessairement été porté atteinte aux droits de la défense " ;
Attendu que, si le procès-verbal, qui constate que les débats ont pris fin le 15 janvier, à 21 heures, n'a été signé, par le président et le greffier, que le 19 janvier, aucune nullité n'est cependant encourue, dès lors qu'il n'est pas établi que l'inobservation des prescriptions de l'article 378 du Code de procédure pénale ait porté atteinte aux intérêts de l'accusé, notamment en ce qui concerne l'exercice d'un pourvoi en cassation ;
D'où il suit qu'en application de l'article 802 du Code de procédure pénale le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, proposé pour Atika X... et pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 121-7 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que la Cour et le jury, ayant répondu négativement aux questions portant sur la complicité par aide ou assistance (n° 7) et par instructions (n° 9), ont répondu par l'affirmative à la question n° 8 relative à la provocation au meurtre ci-dessus spécifié par don, promesse, menace, ordre, abus d'autorité ou de pouvoir ;
" 1° alors, d'une part, que, si la complicité par instructions peut être exclusive de toute provocation, il n'est en revanche aucune provocation possible sans instructions préalables ; que les réponses apportées par la Cour et le jury aux questions nos 8 et 9 précitées sont donc contradictoires entre elles ;
" 2° alors, d'autre part, que la motivation d'une déclaration de culpabilité figurant dans le libellé des questions posées à la Cour et le jury, l'interrogation de ces derniers sur l'existence d'une provocation posée dans les termes de la loi sans autre détermination précise au regard des circonstances de l'espèce, est caractéristique d'un défaut de motifs " ;
Attendu qu'après avoir répondu affirmativement à la question n° 8 les interrogeant sur la culpabilité d'Atika X... pour avoir, les 11 et 12 juillet 1993, provoqué au meurtre, précédemment spécifié, par don, promesse, menace, ordre, abus d'autorité ou de pouvoir, la Cour et le jury ont répondu par la négative à la question n° 9 leur demandant si la même accusée était coupable d'avoir sciemment donné des instructions en vue de commettre ledit meurtre ;
Attendu qu'en cet état les griefs allégués ne sont pas encourus ;
Qu'en effet il résulte de l'article 60 ancien comme de l'article 121-7 nouveau du Code pénal que peut être déclarée complice par provocation la personne qui n'a pas donné d'instructions pour commettre l'infraction mais qui a employé un ou plusieurs des procédés prévus par la loi ;
D'où il suit que le moyen, non fondé pour le surplus, dès lors que la question critiquée se réfère au fait principal et se trouve posée dans les termes de la loi, ne saurait être admis ;
Sur le second moyen de cassation, proposé pour Younès X... et pris de la violation des articles 59, 60, 295, 296 et 297 du Code pénal abrogé, 121-6, 121-7, 221-1 et 221-3 du Code pénal, 366, 349, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt sur l'action publique énonce qu'il résulte de la déclaration de la Cour et du jury que Z... et Agnès X... sont coupables d'avoir, à Chateauneuf-les-Martigues, le 12 juillet 1993, volontairement donné la mort à Lhoussine Y..., avec préméditation, et que Atika X..., veuve Y..., est coupable d'avoir, à Chateauneuf-les-Martigues, les 11 et 12 juillet 1993, provoqué au meurtre commis le 12 juillet 1993 à Chateauneuf-les-Martigues, au préjudice de Lhoussine Y..., par don, promesse, menace, ordre, abus d'autorité ou de pouvoir ;
" alors que les mentions de la feuille des questions et les énonciations de l'arrêt de condamnation doivent, à peine de nullité, être en concordance ; que tel n'est pas le cas en l'espèce puisqu'il ressort de la feuille des questions que la Cour et le jury ont répondu par l'affirmative à la question de savoir si l'accusée Atika X..., veuve Y..., était coupable d'avoir, à Chateauneuf-les-Martigues, les 11 et 12 juillet 1993, provoqué par don, promesse, menace, ordre, abus d'autorité ou de pouvoir au meurtre " ci-dessus spécifié " aux questions nos 1, 2 et 3, c'est-à-dire le meurtre commis par le seul accusé Z... sur la personne de Lhoussine Y... ; que, dès lors, cette discordance prive la décision attaquée de toute base légale " ;
Attendu que la Cour et le jury ont répondu affirmativement à la question n° 1 posée en ces termes : " Est-il constant qu'à Chateauneuf-les-Martigues, le 12 juillet 1993, il a été donné volontairement la mort à Lhoussine Y... ? " ; qu'ils ont ensuite fourni une réponse affirmative à la question n° 8 ainsi libellée :
" L'accusée Atika X..., veuve Y..., est-elle coupable d'avoir, à Chateauneuf-les-Martigues, les 11 et 12 juillet 1993, provoqué au meurtre ci-dessus spécifié, par don, promesse, menace, ordre, abus d'autorité ou de pouvoir ? " ;
Attendu que l'arrêt de condamnation énonce qu'Atika X..., veuve Y..., est coupable " d'avoir à Chateauneuf-les-Martigues, les 11 et 12 juillet 1993, provoqué au meurtre commis, le 12 juillet 1993, à Chateauneuf-les-Martigues, au préjudice de Lhoussine Y..., par don, promesse, menace, ordre, abus d'autorité ou de pouvoir " ;
Attendu qu'en cet état les énonciations de la feuille de questions et celles de l'arrêt de condamnation sont en concordance ;
Que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
Par ces motifs,
Sur le pourvoi contre les arrêts civils :
Le DÉCLARE IRRECEVABLE ;
Sur les autres pourvois :
Les REJETTE.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-81431;99-81432
Date de la décision : 15/12/1999
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité et rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° COUR D'ASSISES - Détention provisoire - Demande de mise en liberté - Demande présentée au cours du procès - Rejet - Critères.

1° DETENTION PROVISOIRE - Demande de mise en liberté - Cour d'assises - Demande présentée au cours du procès - Rejet - Critères.

1° Pour apprécier la possibilité de faire droit à une demande de mise en liberté présentée par un accusé au cours des débats, la cour d'assises n'est pas tenue de se prononcer en considération des critères fixés par l'article 144 du Code de procédure pénale mais doit, notamment, rechercher si, en fonction des éléments de l'espèce, une telle mesure n'est pas de nature à nuire au bon déroulement du procès, à la manifestation de la vérité ou à la mise à exécution, en cas de condamnation, de la santion prononcée(1).

2° COUR D'ASSISES - Débats - Procès-verbal - Etablissement - Délai - Inobservation - Effet.

2° Si, selon l'article 378 du Code de procédure pénale, le procès-verbal des débats est dressé et signé dans le délai de 3 jours au plus tard du prononcé de l'arrêt, cette disposition n'est pas prescrite à peine de nullité. Le retard apporté à l'établissement du procès-verbal des débats ne donne ouverture à cassation que lorsqu'il est démontré qu'il a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de l'accusé, notamment en ce qui concerne l'exercice d'un pourvoi en cassation(2).

3° COUR D'ASSISES - Questions - Réponse - Contradiction - Complicité - Provocation - Instructions données - Réponses affirmative et négative (non).

3° COMPLICITE - Cour d'assises - Questions - Réponse - Contradiction - Provocation - Instructions données - Réponses affirmative et négative (non).

3° Il résulte de l'article 60 ancien comme de l'article 121-7 nouveau du Code pénal que peut être déclarée complice par provocation la personne qui n'a pas donné d'instructions pour commettre l'infraction mais qui a employé un ou plusieurs des procédés prévus par la loi(3).


Références :

1° :
2° :
3° :
Code de procédure pénale 144
Code de procédure pénale 378
Code pénal 121-7
Code pénal 60 Nouveau

Décision attaquée : Cour d'assises des Bouches-du-Rhône, 12 janvier et, 15 janvier 1999

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1998-09-24, Bulletin criminel 1998, n° 234 (1°), p. 672 (rejet). CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1996-11-13, Bulletin criminel 1996, n° 403 (4°), p. 1174 (rejet), et les arrêts cités. CONFER : (3°). (3) Cf. Chambre criminelle, 1999-12-15, Bulletin criminel 1999, n° 309 (4°), p. 956 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 15 déc. 1999, pourvoi n°99-81431;99-81432, Bull. crim. criminel 1999 N° 310 p. 960
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1999 N° 310 p. 960

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. de Gouttes.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Farge.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Waquet, Farge et Hazan, M. Bouthors.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:99.81431
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