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30/11/1999 | FRANCE | N°99-81885

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 30 novembre 1999, 99-81885


REJET du pourvoi formé par :
- X... Jean-François,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, chambre correctionnelle, en date du 25 février 1999, qui, pour entrave à l'exercice régulier des fonctions de conseiller prud'homme, l'a condamné à 3 000 francs d'amende avec sursis et a prononcé sur l'action civile.
LA COUR,
Vu les mémoires et les observations complémentaires produits en demande et le mémoire en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 514-1, L. 514-2 et L. 531-1 du Code du travail, 9-1 du Code civil, 6.2 de la Con

vention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fond...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Jean-François,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, chambre correctionnelle, en date du 25 février 1999, qui, pour entrave à l'exercice régulier des fonctions de conseiller prud'homme, l'a condamné à 3 000 francs d'amende avec sursis et a prononcé sur l'action civile.
LA COUR,
Vu les mémoires et les observations complémentaires produits en demande et le mémoire en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 514-1, L. 514-2 et L. 531-1 du Code du travail, 9-1 du Code civil, 6.2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 2, 427, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Jean-François X... coupable d'entrave aux fonctions de conseiller prud'homme et, en répression, l'a condamné à 3 000 francs d'amende avec sursis ;
" aux motifs qu'il est acquis en l'espèce que Laurent Y... est conseiller prud'homal et que son licenciement est intervenu sans le respect des formes et autorisations imposées pour la rupture du contrat de travail d'un conseiller prud'homal ; que seul est en discussion l'élément moral de l'infraction (et non l'élément matériel comme indiqué par erreur dans l'arrêt) ; qu'en l'espèce, aucune forme particulière n'est imposée au salarié pour informer l'employeur de ce qu'il a acquis le statut de salarié protégé du fait d'un mandat de conseiller prud'homal ; mais il doit être considéré que cette information résulte suffisamment de la publicité des élections prud'homales, tant dans leur préparation avec la connaissance donnée au public des candidatures, que dans le scrutin lui-même et dans son résultat ; qu'en l'état d'une telle publicité, la connaissance, par l'employeur, des fonctions de conseiller prud'homal acquises par un de ses salariés résulte suffisamment de la seule existence de l'élection ; que l'employeur est donc réputé connaître le statut protecteur de son salarié dès lors qu'il est élu ; qu'en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur, et plus particulièrement en cas de rachat et de transfert d'entreprise, le salarié protégé au titre d'un mandat prud'homal n'est nullement tenu de porter à la connaissance du nouvel employeur l'existence de son statut ; il est inhérent à son contrat de travail et modifie depuis l'élection les rapports entre l'employeur et le salarié en particulier pour tout ce qui touche à la protection du conseiller prud'homal, ces particularités d'exécution du contrat de travail se transmettent avec le contrat de travail de l'ancien au nouvel employeur ; dans le cas d'espèce, Laurent Y... n'avait donc pas, de son initiative, à porter à la connaissance de Jean-François X... l'existence de son mandat syndical ; il revenait à ce dernier de prendre connaissance de l'ensemble des situations particulières des salariés, y compris de ceux de la direction, pour en tirer les conséquences quant aux conditions de continuation des contrats de travail ; le mandat de conseiller prud'homal de Laurent Y... était connu de l'ancien employeur qui avait encouragé son salarié à le rechercher, et qui ne pouvait manquer, par ailleurs, de constater les absences de Laurent Y... et les contraintes de son mandat ; dans ces conditions, le mandat (et non l'employeur comme indiqué par erreur dans l'arrêt) était suffisamment connu de l'employeur dès son origine et lui a été rappelé dans le cours de l'exécution du contrat de travail, de sorte que Jean-François X..., repreneur et continuateur vis-à-vis du salarié des obligations de son prédécesseur, doit être réputé avoir eu connaissance du mandat protecteur ; dans ces conditions, le jugement dont appel doit être reformé et Jean-François X... doit être déclaré coupable de l'infraction poursuivie ; eu égard aux circonstances particulières du litige et à l'incertitude qui règne sur l'attitude de Laurent Y... lui-même, dont la loyauté dans l'information donnée à l'employeur n'a pas laissé de trace matérielle, la peine à infliger à Jean-François X... doit être fixée à 3 000 francs, et il doit lui être accordé le bénéfice du sursis (arrêt, pages 5 et 6) ;
" 1° alors que seule la volonté positive et concrète de violer la loi pénale caractérise l'élément intentionnel de l'infraction ; qu'ainsi, faute d'être accompagnée d'une notification expresse, la publication en préfecture des listes des conseillers élus, qui a pour seul effet de rendre opposables à tous les résultats des élections aux conseils de prud'hommes, ne suffit pas à établir la connaissance concrète, par l'employeur, du statut protecteur d'un salarié ni, partant, à caractériser l'élément intentionnel du délit d'entrave aux fonctions de conseiller prud'homme ; que, dès lors, en estimant au contraire que les résultats des élections étaient, par l'effet de cette mesure de publicité, connus de l'ancien employeur de Laurent Y..., pour en déduire qu'en sa qualité de repreneur, le demandeur devait également être réputé avoir eu connaissance du mandat protecteur, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" 2° alors qu'en énonçant qu'en sa qualité de repreneur, Jean-François X... était réputé avoir eu connaissance du mandat du salarié, tout en relevant qu'il appartenait au demandeur de prendre connaissance de l'ensemble des situations particulières des salariés, et notamment de l'existence du mandat de Laurent Y..., la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé, par fausse application, les textes susvisés ;
" 3° alors que seule la violation, en connaissance de cause, d'une prescription légale est de nature à caractériser l'élément intentionnel de l'infraction ; qu'ainsi, en énonçant que par le seul effet du transfert d'entreprise, le demandeur était réputé avoir eu connaissance du mandat de Laurent Y..., sans répondre aux conclusions du prévenu qui faisait valoir qu'il pouvait valablement ignorer les résultats des élections qui, antérieurs au transfert d'entreprise, n'ont été notifiés ni à l'employeur initial, ni au repreneur, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" 4° alors que l'élément intentionnel de l'infraction, qui implique une volonté frauduleuse positive et concrète, caractérisée par la violation, en connaissance de cause, d'une prescription légale, doit être écarté lorsque le comportement de l'agent procède d'une erreur de fait, serait-elle imputable à une faute de négligence ; qu'ainsi, en déduisant l'élément intentionnel du délit d'entrave à l'exercice régulier des fonctions de conseiller prud'homme de la circonstance que l'employeur aurait omis de procéder aux recherches permettant de prendre connaissance des situations particulières des salariés, sans d'ailleurs préciser la nature de ces recherches ni indiquer en quoi celles-ci incombaient nécessairement au repreneur, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Laurent Y..., directeur salarié de la société Clinique Notre-Dame, exerçant par ailleurs les fonctions de conseiller prud'homme, a été licencié pour faute grave sans qu'ait été suivie la procédure prévue par l'article L. 412-18 du Code du travail ; qu'à la suite de ces faits, le président de la société, Jean-François X..., a été renvoyé devant le tribunal correctionnel sur le fondement des articles L. 514-2 et L. 531-1 du Code du travail pour entrave à l'exercice régulier des fonctions de conseiller prud'homme ;
Attendu que, pour écarter l'argumentation du prévenu qui, ayant pris ses fonctions peu avant le licenciement, soutenait ignorer que le salarié licencié était investi d'un mandat prud'homal, la cour d'appel se prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, d'où il résulte que le prévenu a volontairement omis de vérifier la situation du salarié licencié, les juges ont justifié leur décision dès lors que, la liste des conseillers prud'hommes élus pouvant être consultée en préfecture et étant publiée au recueil des actes administratifs du département en application de l'article R. 513-107-1 du Code du travail, l'employeur, auquel il appartenait, afin d'assurer le respect des prescriptions de l'article L. 412-18 de ce Code, de procéder à toutes les vérifications nécessaires relatives à la situation du salarié qu'il entendait licencier, ne pouvait invoquer son abstention fautive pour échapper aux conséquences de la violation de ce texte ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-81885
Date de la décision : 30/11/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

TRAVAIL - Conseil de prud'hommes - Conseiller prud'homme - Entrave à l'exercice des fonctions - Eléments constitutifs - Elément intentionnel.

Caractérise l'élément intentionnel du délit d'entrave aux fonctions de conseiller prud'homme, la cour d'appel qui retient que, la liste des conseillers prud'hommes élus pouvant être consultée en préfecture et étant publiée au recueil des actes administratifs du département en application de l'article R. 513-107-1 du Code du travail, l'employeur, auquel il appartenait, afin d'assurer le respect des prescriptions de l'article L. 412-8 du Code précité, de procéder à toutes les vérifications nécessaires relatives à la situation du salarié qu'il entendait licencier, ne pouvait invoquer son abstention fautive pour justifier la violation de ce texte. (1).


Références :

Code du travail R513-107-1, L412-8

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes (chambre correctionnelle), 25 février 1999

CONFER : (1°). (1) A comparer: Chambre sociale, 1998-06-09, Bulletin 1998, V, n° 314, p. 239 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 30 nov. 1999, pourvoi n°99-81885, Bull. crim. criminel 1999 N° 284 p. 880
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1999 N° 284 p. 880

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : Mme Commaret.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Desportes.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Delaporte et Briard, la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:99.81885
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