Sur le premier moyen :
Vu l'article 1722 du Code civil, ensemble l'article 20 du décret du 30 septembre 1953 ;
Attendu que, si pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité ou en partie par cas fortuit, le bail peut être résilié sans qu'il y ait lieu à aucun dédommagement ; que le locataire commerçant, qui peut prétendre à une indemnité d'éviction, a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 11 septembre 1997), que, le 10 octobre 1993, un incendie a détruit les locaux donnés en location à la société Nina Ricci et dans lesquels celle-ci se maintenait dans l'attente de la fixation judiciaire de l'indemnité d'éviction due par la société civile immobilière Jules Lefèvre (la SCI), à la suite d'un congé donné par la bailleresse ; que cette indemnité d'éviction a ensuite été fixée à une certaine somme ;
Attendu que, pour dire qu'une telle indemnité était due à la société Nina Ricci, l'arrêt retient que la disparition des locaux ne pouvait rétroactivement faire perdre à la locataire le bénéfice d'une indemnité dont le principe était acquis avant cette disparition ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la société Nina Ricci était maintenue dans les lieux aux clauses et conditions du bail expiré, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit qu'une indemnité d'éviction était due à la société Nina Ricci, en a fixé le montant à la somme de 1 417 000 francs et a ordonné la compensation avec les sommes dues à la SCI Jules Lefèvre, l'arrêt rendu le 11 septembre 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris.