Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que, suivant un acte passé le 16 avril 1983 en l'étude de X..., notaire décédé au cours de la procédure et aux droits de qui viennent les consorts X... la société en nom collectif Beaufils et fils et compagnie (la SNC) a vendu à la Société de construction vente La Roca del Sol (la SCI) un certain nombre de parcelles de terrains à bâtir pour un prix de 2 500 000 francs payable par fractions ; que, le prix n'ayant pas été payé, la SNC a demandé réparation de son préjudice au notaire, lui reprochant d'avoir manqué à son devoir de conseil pour ne l'avoir pas informée de la portée de la mention de l'acte selon laquelle le vendeur dispensait l'officier public de procéder à l'inscription de son privilège, lequel ne fut inscrit que tardivement ;
Attendu que, pour écarter la responsabilité du notaire, après avoir énoncé que le manquement du notaire à son devoir de conseil doit s'apprécier eu égard aux circonstances et à la personnalité des parties, l'arrêt relève, d'abord, qu'en l'espèce, le vendeur n'était pas M. Beaufils mais une société en nom collectif composée, outre cette personne, d'un gérant de sociétés, qualifié dans les autres actes de promoteur immobilier, voire de conseiller fiscal, et de M. Y... qui avait servi de prête-nom à son fils, notaire, et, ensuite, que la SNC, qui avait pour objet social l'achat en vue de la revente d'immeubles, fonds de commerce, actions ou parts de sociétés avait, moins d'un mois après la vente des terrains, acquis de la SCI pour le prix de 2 530 000 francs, 6 appartements et des parkings ; qu'au terme de ces différentes constatations, il décide qu'il ne pouvait être fait grief au notaire de ne pas avoir éclairé une société qui était plus à même que quiconque de comprendre l'intérêt que présentait pour son futur cocontractant la dispense figurant dans l'acte de vente du terrain ;
Attendu, cependant, que le notaire n'est pas dispensé de son devoir de conseil par les compétences personnelles de son client, en considération desquelles il est seulement possible, le cas échéant, d'estimer que celui-ci a commis une faute ayant contribué à la production de son préjudice ; qu'en se prononçant comme elle a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 octobre 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes.