Sur le second moyen :
Vu l'article L. 321-1-1 du Code du travail ;
Attendu que M. Y..., engagé, le 11 mars 1974, par la société Successeurs de Fritz X... a été licencié le 16 mars 1995, après avoir refusé la modification de son contrat de travail ;
Attendu que, pour débouter M. Y... de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour méconnaissance de l'article L. 321-1-1 du Code du travail concernant les critères de licenciement, la cour d'appel retient que la mutation imposée à M. Y... est assortie d'un motif économique réel et sérieux, que l'alinéa 3 de l'article L. 321-1-1 du Code du travail introduit par la loi du 2 août 1989 a généralisé aux licenciements individuels pour motif économique l'obligation pour l'employeur de définir après consultation du comité d'entreprise ou à défaut des délégués du personnel les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements, que l'obligation de définir ces critères n'implique pas pour l'employeur l'obligation de déterminer, dans les mêmes conditions, soit après consultation des organes représentatifs du personnel, l'ordre des licenciements c'est-à-dire le classement des salariés obtenu en appliquant les critères retenus, que l'obligation de définir les critères de licenciement n'est légalement sanctionnée qu'au moyen des dispositions des articles L. 122-14-2, alinéa 2, et R. 122-3 du Code du travail fixant les conditions dans lesquelles le salarié peut demander la communication des critères adoptés par l'employeur, qu'à défaut de demande du salarié conforme à l'article R. 122-3 l'employeur ne peut être tenu de justifier qu'il a défini après consultation des organes représentatifs les " critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements " et encore moins qu'il a établi un ordre des licenciements, qu'en l'espèce M. Y... s'est abstenu de demander l'indication des critères de choix dans le délai de 10 jours suivant son départ effectif, qu'il n'est donc pas recevable à contester l'existence ou l'application de ces critères ;
Attendu, cependant, d'une part, que si l'inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements pour motif économique prévues à l'article L. 321-1-1 du Code du travail ne prive pas le licenciement de cause réelle et sérieuse et n'est pas soumise aux sanctions de l'article L. 122-14-4 du Code du travail, elle constitue pour le salarié une illégalité qui entraîne pour celui-ci un préjudice pouvant aller jusqu'à la perte injustifiée de son emploi et qui doit être intégralement réparé selon son étendue par les juges du fond ; d'autre part, que le fait pour un salarié de ne pas user de la faculté qui lui est ouverte par le deuxième alinéa de l'article L. 122-14-2 du Code du travail de demander à l'employeur les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements ne le prive pas de la possibilité de se prévaloir de l'inobservation de ces critères et de demander réparation du préjudice qui en est résulté ;
D'où il suit, qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions rejetant la demande de dommages-intérêts du salarié en ce qu'elle était fondée sur l'inobservation de l'ordre des licenciements, l'arrêt rendu le 25 novembre 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz.