La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/03/1999 | FRANCE | N°97-12577

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 02 mars 1999, 97-12577


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Clergeau, devenue la société FMT Productions (société FMT), ayant vendu à destination des Forces armées marocaines de la viande bovine, a, en qualité de chargeur, confié à la société Sea Land Services Inc. (le transporteur maritime) le transport de cette marchandise par conteneurs réfrigérés du port de Rotterdam (Pays-Bas) à ceux d'Agadir et Casablanca (Maroc) ; que 223 conteneurs ont été expédiés, dont 6, refusés par le destinataire en raison de leur température trop élevée, ont été retournés à Rotterdam ; que le tr

ansporteur maritime a assigné la société FMT en paiement d'une certaine somme ...

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Clergeau, devenue la société FMT Productions (société FMT), ayant vendu à destination des Forces armées marocaines de la viande bovine, a, en qualité de chargeur, confié à la société Sea Land Services Inc. (le transporteur maritime) le transport de cette marchandise par conteneurs réfrigérés du port de Rotterdam (Pays-Bas) à ceux d'Agadir et Casablanca (Maroc) ; que 223 conteneurs ont été expédiés, dont 6, refusés par le destinataire en raison de leur température trop élevée, ont été retournés à Rotterdam ; que le transporteur maritime a assigné la société FMT en paiement d'une certaine somme pour divers frais supplémentaires exposés dans les ports marocains et dans celui de Rotterdam ; que la société FMT s'est opposée à cette demande et a réclamé à titre reconventionnel paiement au transporteur maritime de la valeur de la viande réexpédiée à Rotterdam ainsi que du montant des restitutions à l'exportation et pénalités qu'elle a dû supporter pour la remise de cette marchandise sur le marché communautaire européen, suivie de sa revente par le transporteur ;

Sur le premier moyen, pris en ses six branches : (sans intérêt) ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que le transporteur maritime reproche encore à l'arrêt d'avoir déclaré recevable, comme non prescrite, la demande reconventionnelle de la société FMT, alors, selon le pourvoi, qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la demande litigieuse n'a été présentée que plus d'un an à partir de la date à laquelle les marchandises eussent dû être livrées à Rotterdam ; que le refus par le transporteur de livrer la marchandise constitue une perte de cette marchandise, au sens de l'article 3, paragraphe 6, de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 ; qu'en le niant, et en déniant au transporteur maritime le bénéfice de la prescription invoquée, la cour d'appel a violé cette disposition de la Convention dont elle a admis l'applicabilité à la cause ;

Mais attendu que le refus du transporteur maritime, invoquant un droit de rétention, de livrer la marchandise à son ayant droit ne peut être assimilé à la perte totale de celle-ci ; qu'il en résulte que, dans ce cas, la prescription par un an de toute action en responsabilité relative aux marchandises à l'encontre du transporteur maritime, et dont l'article 3, paragraphe 6, alinéa 4, de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement fixe le point de départ soit à la délivrance des marchandises, soit à la date à laquelle elles eussent dû être délivrées, ne court pas en faveur du transporteur ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que le transporteur maritime reproche en outre à l'arrêt d'avoir, par application du droit français, accueilli la demande reconventionnelle de la société FMT et d'avoir rejeté sa propre demande tendant au remboursement des frais supplémentaires exposés à Rotterdam, alors, selon le pourvoi, d'une part, que n'apportant aucun élément de réponse au moyen tiré de ce que le transporteur était bien fondé, en application du droit hollandais, à exercer sur la marchandise un droit de rétention, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, d'autre part, qu'en ne tranchant pas le litige par la mise en oeuvre du droit étranger invoqué, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 3 du Code civil ;

Mais attendu que le droit de rétention du transporteur maritime sur les marchandises transportées n'est pas régi par la convention de Bruxelles du 25 août 1924 et est un droit disponible, dès lors que le transporteur peut y renoncer, même par anticipation ; qu'il en résulte qu'il incombait au transporteur de rapporter la preuve que la rétention des 6 conteneurs retournés à Rotterdam était légitime au regard du droit des Pays-Bas qu'il invoquait et dont il avait, de ce fait, la charge d'établir la teneur ; que la cour d'appel, sans être tenue de répondre aux conclusions inopérantes dont fait état le moyen, n'était pas tenue, non plus, de rechercher elle-même le contenu de ce droit ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le quatrième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches : (sans intérêt) ;

Mais sur ce même moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu qu'en ne répondant pas aux conclusions du transporteur maritime lui demandant, à titre subsidiaire, de tenir compte des plafonds d'indemnisation fixés à l'article 4, paragraphe 5 a, de la convention de Bruxelles du 25 août 1924, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et attendu que la cassation du chef d'un arrêt prononçant la condamnation in solidum du demandeur au pourvoi profite à tous les condamnés in solidum ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné in solidum la société Agetram et la société Sea Land Services Inc. à payer à la société FMT productions, la somme de 2 338 055,59 francs (deux millions trois cent trente-huit mille cinquante-cinq francs et cinquante-neuf centimes), sans tenir compte de l'un ou l'autre des plafonds d'indemnisation fixés à l'article 4, paragraphe 5, de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement, tel que modifié par le protocole du 21 décembre 1979, l'arrêt rendu le 17 décembre 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 97-12577
Date de la décision : 02/03/1999
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° TRANSPORTS MARITIMES - Marchandises - Transport international - Convention de Bruxelles du 25 août 1924 - Responsabilité du transporteur - Action en responsabilité - Prescription - Délai - Point de départ - Transporteur invoquant un droit de rétention - Portée.

1° CONVENTIONS INTERNATIONALES - Accords et conventions divers - Convention de Bruxelles du 25 août 1924 - Transports maritimes - Marchandises - Responsabilité du transporteur - Action en responsabilité - Prescription - Délai - Point de départ - Transporteur invoquant un droit de rétention - Portée.

1° La prescription par un an de toute action en responsabilité relative aux marchandises à l'encontre du transporteur maritime, dont l'article 3, paragraphe 6, alinéa 4, de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement fixe le point de départ soit à la délivrance des marchandises, soit à la date à laquelle elles eussent dû être délivrées, ne court pas en faveur du transporteur qui refuse la livraison en invoquant un droit de rétention.

2° CONFLIT DE LOIS - Application de la loi étrangère - Preuve de sa teneur - Charge - Droit disponible - Partie qui l'invoque.

2° TRANSPORTS MARITIMES - Marchandises - Rétention - Fondement - Loi étrangère - Teneur - Preuve - Charge 2° TRANSPORTS MARITIMES - Marchandises - Rétention - Fondement - Convention de Bruxelles du 25 août 1924(non) 2° DROIT DE RETENTION - Nature - Droit disponible - Preuve de sa teneur - Charge.

2° Le droit de rétention du transporteur maritime n'est pas régi par la convention de Bruxelles du 25 août 1924 et est un droit disponible. Il en résulte qu'il incombe au transporteur de rapporter la preuve que la rétention des marchandises est légitime au regard du droit étranger qu'il invoque et dont il a, de ce fait, la charge d'établir la teneur.


Références :

1° :
Convention de Bruxelles du 25 août 1924 art. 3 paragraphe 6, al. 4

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 17 décembre 1996

A RAPPROCHER : (1°). Chambre commerciale, 1989-10-24, Bulletin 1989, IV, n° 258 (1), p. 173 (rejet). A RAPPROCHER : (2°). Chambre civile 1, 1996-06-11, Bulletin 1996, I, n° 243, p. 171 (rejet)

arrêt cité ; Chambre civile 1, 1997-07-01, Bulletin 1997, I, n° 222, p. 148 (cassation), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 02 mar. 1999, pourvoi n°97-12577, Bull. civ. 1999 IV N° 52 p. 43
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1999 IV N° 52 p. 43

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : Mme Piniot.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Rémery.
Avocat(s) : Avocats : MM. Le Prado, Vuitton.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:97.12577
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award