Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 1382 du Code civil et 3, alinéa 7, du décret n° 78-262 du 8 mars 1978 ;
Attendu, selon le second de ces textes, qu'à défaut d'accord du débiteur et de tous les notaires participants, celui qui sollicite ou qui consent une réduction d'émoluments est tenu de saisir le conseil régional des notaires, seul habilité à décider du principe et du montant d'une telle réduction ;
Attendu que, le 20 mars 1991, M. Y..., notaire associé de la SCP Y...-Z...-A... (SCP Y...), a reçu avec la participation de M. B..., notaire, et de M. X..., notaire associé de la SCP X... et C..., devenue la SCP X..., un acte portant vente immobilière au prix de 203 000 000 francs ; que, selon l'état des frais établi par la SCP X..., il était dû à cette dernière la somme de 525 125,22 francs au titre de ses émoluments comme notaire en second ; que, le 19 avril suivant, la SCP Y... a écrit à M. X... pour lui indiquer que sa cliente était disposée à verser une somme de 600 000 francs, hors TVA au titre de la vente du 20 mars et lui demander en conséquence d'approuver le projet de facture joint selon lequel ses émoluments de notaire en second s'élèveraient à la somme de 144 000 francs H.T ; que ce projet n'a pas été accepté par M. X... ; que le 24 juin 1991, ce dernier a reçu, avec la participation de M. Y..., un acte au titre duquel il était dû à la SCP Y... des émoluments d'un montant de 360 901,99 francs ; que la SCP Y... s'est heurtée à un refus de paiement de cette somme, la SCP X... exigeant la consignation préalable de la somme de 525 125,22 francs ; que la SCP Y... a alors assigné la SCP X... en paiement, cette dernière sollicitant reconventionnellement le paiement de ses émoluments et de dommages-intérêts ; que le 2 avril 1992, la chambre interdépartementale des notaires de Paris, siégeant en conseil régional et saisie en application de l'article 3 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978 pour statuer sur le défaut d'accord concernant une réduction d'émoluments, s'est déclarée incompétente au motif que, saisie par la chambre des notaires de Seine-et-Marne, elle ne l'avait pas été dans les formes prévues par ce texte et qu'elle n'était pas habilitée à se saisir d'office ;
Attendu que pour débouter la SCP X... de sa demande, l'arrêt attaqué, après avoir relevé que la réduction des honoraires ne pouvait résulter que de l'accord des différents notaires intervenus et, à défaut, d'une décision du conseil régional, et qu'ainsi la SCP Y..., qui n'avait pas sollicité ni obtenu cet accord et qui n'avait pas saisi le conseil régional, avait commis des fautes professionnelles en accordant au client la réduction considérée et en acceptant le règlement fait par celui-ci, énonce que la SCP X..., qui avait la possibilité de saisir le conseil régional du litige l'opposant à la SCP Y... de sorte que, s'il l'avait fait, ladite chambre se serait prononcée sur le principe et, le cas échéant, le montant de la réduction, ne démontrait pas, à défaut d'avoir ainsi procédé, la réalité d'un préjudice, conséquence des fautes de M. Y... ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi, alors qu'en décidant de consentir seul une réduction d'émoluments, le notaire commet une faute qui est nécessairement en relation de causalité avec la perte d'émoluments subie par ses confrères, peu important que ceux-ci n'aient pas, eux-mêmes, saisi le conseil régional, ce qu'ils n'étaient pas tenus de faire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 juin 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.