CASSATION PARTIELLE par voie de retranchement sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, chambre correctionnelle, du 8 août 1996, qui, pour complicité de diffamation publique envers les Cours et tribunaux, a déclaré l'action publique éteinte par l'effet de l'amnistie et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Sur le deuxième moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 23, 29, 30, 46, 48 et 65 de la loi du 29 juillet 1881, 2 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable la constitution de partie civile du Garde des Sceaux et a condamné X... à lui verser 1 franc de dommages-intérêts ;
" alors, d'une part, que l'action civile exercée à raison d'un délit commis par la voie de la presse est soumise à la même prescription que l'action publique ; que la prescription de l'action publique entraînera la prescription de l'action civile ;
" alors, d'autre part, qu'il résulte de la procédure qu'aucune constitution de partie civile n'est intervenue avant l'audience du tribunal correctionnel le 8 septembre 1995 ; qu'ainsi, l'action civile était prescrite lorsqu'elle a été engagée ;
" alors, encore, que, s'agissant d'une diffamation à l'encontre d'un tribunal, l'action civile ne pouvait être exercée séparément de l'action publique ;
" alors, de surcroît, qu'il résulte du dossier que la seule constitution de partie civile existante émane de l'agent judiciaire du Trésor et non du Garde des Sceaux ; que, en allouant des dommages-intérêts à ce dernier, les juges du fond ont méconnu le cadre de leur saisine et excédé leurs pouvoirs ;
" alors, au surplus, que le Garde des Sceaux ne tient d'aucune disposition ni de la Constitution, ni de la loi, le pouvoir de représenter en justice tout ou partie du corps judiciaire ; qu'il a seulement le pouvoir de donner, s'il l'estime utile, en cas de diffamation du corps judiciaire, instruction au parquet de poursuivre l'action publique ; qu'ainsi, la constitution de partie civile du Garde des Sceaux, à la supposer exister, était irrecevable ;
" alors, enfin, que le Garde des Sceaux n'étant pas personnellement ni directement victime des infractions dénoncées, son action civile était irrecevable " ;
Vu l'article 2 du Code de procédure pénale ;
Attendu que, sauf dispositions légales contraires, l'action civile, en raison du préjudice résultant d'une infraction, appartient seulement à ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par ladite infraction ;
Attendu qu'après avoir déclaré éteinte par l'amnistie, l'action publique exercée contre X..., avocat, condamné par les premiers juges pour complicité de diffamation publique envers les Cours et tribunaux, la cour d'appel confirme la décision recevant la constitution de partie civile du Garde des Sceaux, ministre de la Justice, au motif qu'il incombe à ce dernier de défendre les intérêts des juridictions ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que le Garde des Sceaux, qui ne souffre pas personnellement du dommage causé par l'infraction, ne tient d'aucune disposition spéciale le pouvoir de se constituer partie civile pour obtenir réparation du préjudice causé à des magistrats et à la juridiction visés dans l'article en cause, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, en date du 8 août 1996, en ce qu'il a accueilli la constitution de partie civile du Garde des Sceaux et a octroyé 1 franc de dommages et intérêts ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.