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02/12/1998 | FRANCE | N°97-83671

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 décembre 1998, 97-83671


REJET du pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, en date du 4 décembre 1996, qui, pour abandon de famille, l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve pendant 18 mois et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 227-3 du nouveau Code pénal ainsi que 6, alinéa 1er, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale, ensembl

e violation de la règle non bis in idem :
" en ce que, l'arrêt attaqué a déclaré...

REJET du pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, en date du 4 décembre 1996, qui, pour abandon de famille, l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve pendant 18 mois et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 227-3 du nouveau Code pénal ainsi que 6, alinéa 1er, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale, ensemble violation de la règle non bis in idem :
" en ce que, l'arrêt attaqué a déclaré un prévenu (X..., le demandeur) coupable d'abandon de famille, le condamnant de ce chef à une peine d'emprisonnement de 3 mois avec sursis assortie d'une mise à l'épreuve de 18 mois, ainsi qu'au paiement de la somme de 3 000 francs en réparation du préjudice subi par la partie civile ;
" aux motifs que, par arrêt définitif du 2 mars 1992, X... avait été condamné à payer à son ex-épouse la somme de 60 000 francs à titre de prestation compensatoire ; que, n'ayant pas payé fût-ce un centime, il avait été définitivement condamné par un 1er jugement du 2 juin 1994 à 2 mois d'emprisonnement avec sursis pour les faits commis au cours de la période du 2 mars 1992 à courant février 1994 ; qu'après que ce jugement fut devenu définitif le 3 août 1994, Y... avait de nouveau saisi la juridiction répressive d'une citation directe de partie civile pour la période "depuis mars 1994", soit jusqu'à la citation du 20 décembre 1994 ; qu'au soutien de son appel, X... faisait essentiellement valoir que, s'agissant d'une prestation compensatoire exigible en un seul versement et non d'une rente ou d'une pension exigible périodiquement, l'infraction n'était pas successive mais unique ; que Y... et le ministère public objectaient les termes de la loi visant le défaut de paiement intégral de la prestation, la jurisprudence constante de la Cour de Cassation et le caractère définitif et exécutoire de la décision civile ; que ce qui était puni par la loi était le fait d'être resté plus de 2 mois sans avoir satisfait à son obligation de paiement intégral de l'exigible existant ; qu'il importait peu qu'il s'agît de sommes périodiques échues durant la période considérée ou de sommes arriérées exigibles depuis une date antérieure à la période de prévention retenue ; que loin d'avoir épuisé l'action publique contre X... à raison de cette situation de défaut de paiement intégral constituant l'élément matériel de l'infraction, la condamnation du 2 juin 1994 ne faisait que le constituer en état de récidive légale pour la période postérieure au moment où cette décision était devenue définitive ; que cet état, non visé par les textes répressifs fondant la poursuite, ne serait toutefois pas retenu à son encontre (arrêt attaqué, p. 2, alinéas 6 et suivants ; p. 3, alinéa 1) ;
" alors que, d'une part, le délit d'abandon de famille exige, pour être constitué, la méconnaissance d'une décision de justice légalement exécutoire définissant, dans son montant et sa périodicité, l'obligation de famille mise à la charge du prévenu ; qu'ainsi, en présence d'une condamnation à payer un capital en une seule fois, exclusive donc de toute périodicité, la cour d'appel ne pouvait retenir le demandeur dans les liens de la prévention ;
" alors que, d'autre part, nul ne peut faire l'objet d'une nouvelle condamnation pour des faits identiques dans leurs éléments légaux et matériels ; que la cour d'appel ne pouvait retenir que le délit d'abandon de famille constituait une infraction continue autorisant de nouvelles poursuites après une 1re condamnation pour la raison que l'élément matériel de l'infraction résidait dans le fait pour le prévenu d'être resté plus de 2 mois sans avoir satisfait à son obligation de paiement dès lors que, s'agissant du règlement d'une somme en capital payable en une seule fois et non de termes périodiques, l'infraction était instantanément consommée à l'expiration du délai de 2 mois courant à compter de la signification de la décision civile portant condamnation, en sorte que l'abstention qui s'était perpétuée n'avait pu avoir pour effet de renouveler l'infraction initiale " ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 227-3 du nouveau Code pénal, ainsi que 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que, l'arrêt attaqué a déclaré un prévenu (X..., le demandeur) coupable d'abandon de famille, le condamnant de ce chef à une peine d'emprisonnement de 3 mois avec sursis assortie d'une mise à l'épreuve de 18 mois, ainsi qu'au paiement de la somme de 3 000 francs en réparation du préjudice subi par la partie civile ;
" aux motifs que, pour le surplus, il convenait de rappeler que seul le dispositif exprimait la décision d'un jugement ou d'un arrêt en matière civile, la théorie des motifs décisoires étant abandonnée depuis le nouveau Code de procédure civile ; qu'enfin l'introduction d'une procédure en modification d'une prestation compensatoire n'était pas de nature à porter atteinte à son caractère exigible, tandis que le débiteur d'une obligation protégée par l'article 227-3 du Code pénal avait l'obligation de rapporter la preuve qui lui incombait de ce que son impécuniosité, à la supposer établie, relevait d'une cause indépendante de sa volonté, ce qui n'était ni proposé ni réalisé (arrêt attaqué, p. 3, alinéas 2 et 3) ;
" alors que, le juge doit caractériser l'élément intentionnel du délit d'abandon de famille retenu à la charge du prévenu ; que la juridiction du second degré ne pouvait le déclarer coupable de cette infraction pour la seule raison qu'un arrêt définitif du 2 mars 1992 l'avait condamné à payer à son ex-épouse une prestation compensatoire sous forme de capital de 60 000 francs et qu'il lui incombait de rapporter la preuve que son impécuniosité, à la supposer établie, relevait d'une cause indépendante de sa volonté, sans vérifier elle-même que le prévenu s'était abstenu volontairement d'exécuter son obligation ;
" alors que, en outre, les motifs participent de l'autorité de la chose jugée qui s'attache au dispositif toutes les fois qu'ils en constituent le soutien nécessaire, en sorte que rien interdit au juge d'interpréter une décision en éclairant par ses motifs la portée de son dispositif ; que la cour d'appel ne pouvait davantage affirmer que le raisonnement par lequel les juges civils avaient justifié tout à la fois le principe et le montant de la prestation compensatoire qu'ils avaient par un chef de dispositif distinct fixé à la somme de 60 000 francs ne constituait que des motifs décisoires, tandis que ces motifs permettaient d'éclairer la portée du dispositif sans qu'il fût question d'y voir une décision sur une partie du principal " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que X... a été condamné, par arrêt de la cour d'appel de Grenoble, en date du 2 mars 1992, à payer à son ex-épouse une prestation compensatoire de 60 000 francs en capital ;
Attendu que, n'ayant pas exécuté cette décision, il a été condamné, pour abandon de famille, par jugement du 2 juin 1994, devenu définitif le 2 août suivant ;
Que, n'ayant toujours pas rempli son obligation en décembre 1994, il a été cité à nouveau devant le tribunal correctionnel du chef d'abandon de famille ;
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable, une nouvelle fois, de ce délit, les juges du second degré retiennent qu'il est resté de nouveau plus de 2 mois sans avoir satisfait à son obligation de paiement de l'exigible existant et qu'il n'a pas proposé d'établir l'état d'impécuniosité dans lequel il prétend se trouver ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Qu'en effet, le délit d'abandon de famille, qui, selon l'article 227-3 du Code pénal, est constitué, notamment, par le défaut de paiement intégral, pendant plus de 2 mois, d'une prestation compensatoire définie et ordonnée par une décision judiciaire sous forme de capital ou de rente, se renouvelle chaque fois que son auteur démontre par son comportement sa volonté de persévérer dans son attitude ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 97-83671
Date de la décision : 02/12/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ABANDON DE FAMILLE - Eléments constitutifs - Elément intentionnel - Intention coupable - Défaut de paiement - Défaut de paiement intégral - Délai de deux mois - Réitération - Poursuites successives.

ABANDON DE FAMILLE - Inexécution de l'obligation - Délai de deux mois - Réitération - Intention coupable - Poursuites successives

ABANDON DE FAMILLE - Inexécution de l'obligation - Délai de deux mois - Réitération - Prestation compensatoire en capital - Poursuites successives

Le délit d'abandon de famille qui, selon l'article 227-3 du Code pénal, est constitué notamment par le défaut de paiement intégral, pendant plus de 2 mois, d'une prestation compensatoire, définie et ordonnée par une décision judiciaire sous forme de capital, se renouvelle chaque fois que son auteur démontre, par son comportement, sa volonté de persévérer dans son attitude. Par suite, le prévenu, qui a déjà été condamné pour ce délit, peut faire l'objet d'une nouvelle condamnation, à l'expiration d'un nouveau délai de 2 mois dès lors qu'il n'a pas satisfait à son obligation de l'exigible existant. (1).


Références :

Code pénal 227-3

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble (chambre correctionnelle), 04 décembre 1996

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1965-02-09, Pourvoi n° 93-761.64 (inédit).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 déc. 1998, pourvoi n°97-83671, Bull. crim. criminel 1998 N° 326 p. 944
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1998 N° 326 p. 944

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. Lucas.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Baillot.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, la SCP Nicolay et de Lanouvelle.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:97.83671
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