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18/11/1998 | FRANCE | N°97-11023

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 18 novembre 1998, 97-11023


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 novembre 1996), que la société Eurobail a consenti, à la société Au Vieux Chêne Camille Picard et fils (société Au Vieux Chêne), dix contrats de crédit-bail immobilier, huit par actes authentiques signés en novembre 1986 et novembre 1988, deux, par actes sous seings privés du 9 novembre 1988 ; que M. X... s'est porté caution solidaire de la société Au Vieux Chêne ; que le 4 mars 1994, la société Eurobail a délivré une sommation de payer rappelant la clause résolutoire insérée dans les conventions ; q

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Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 novembre 1996), que la société Eurobail a consenti, à la société Au Vieux Chêne Camille Picard et fils (société Au Vieux Chêne), dix contrats de crédit-bail immobilier, huit par actes authentiques signés en novembre 1986 et novembre 1988, deux, par actes sous seings privés du 9 novembre 1988 ; que M. X... s'est porté caution solidaire de la société Au Vieux Chêne ; que le 4 mars 1994, la société Eurobail a délivré une sommation de payer rappelant la clause résolutoire insérée dans les conventions ; que la société Au Vieux Chêne a été mise en redressement judiciaire ; que la société Eurobail a assigné la société Au Vieux Chêne, M. Z... es qualités d'administrateur au redressement judiciaire, M. Y..., es qualités de représentant des créanciers et M. X..., es qualités de caution, en constatation de la résiliation des conventions et paiement de sommes ; que les défendeurs ont invoqué la nullité des conventions ;

Attendu que M. X..., la société Au Vieux Chêne et M. Z..., es qualités, font grief à l'arrêt d'accueillir les demandes de la société Eurobail, alors, selon le moyen, 1° que l'article 1er-2 de la loi du 2 juillet 1966, modifié par l'ordonnance du 28 septembre 1967, impose dans les contrats de crédit-bail immobilier, à peine de nullité, une clause de résiliation à la demande du preneur, ce qui exclut que les conditions posées le soient dans le seul intérêt du crédit-bailleur ; qu'en subordonnant, dans son seul intérêt, la faculté de résiliation à l'expiration de la dixième année du crédit-bail, avec des modalités liant le crédit-preneur au minimum pour 11 ans et 10 mois de loyers, Eurobail a privé le crédit-preneur du droit, d'ordre public, ouvert par le texte précité, de se dégager sans compromettre l'équilibre même de la convention, la durée neutralisée excédant les deux tiers de celle convenue et imposant au crédit-preneur l'abandon de l'immeuble après paiement de la quasi-intégralité des loyers ; qu'en décidant le contraire, par une référence inopérante au seul intérêt du crédit-bailleur, l'arrêt attaqué, omettant de prendre en compte la situation du crédit-preneur, objet de la protection légale, a violé par refus d'application l'article 1er-2, alinéa 2, de la loi du 2 juillet 1966, modifié par l'ordonnance du 28 septembre 1967 ; 2° que le droit de résilier conféré au crédit-preneur par l'article 1er-2 de la loi du 2 juillet 1966, alinéa 2, interdit au crédit-bailleur d'assortir la clause de sortie, exprimée dans l'article 16 susvisé, d'une clause pénale, laquelle suppose une inexécution du contrat ; qu'au surplus, le même article 16, en imposant au crédit-preneur d'effectuer des diligences, dans le seul intérêt d'Eurobail, pour éviter de supporter la charge des loyers et accessoires, majorés, jusqu'au terme initialement convenu de la convention, qui est sans cause du fait même de l'exercice du droit de résiliation, enfreint la règle de l'option, pour le créancier, entre l'exécution et la résolution du contrat ; qu'ainsi l'arrêt attaqué, en refusant de constater la nullité, réclamée, des contrats, a violé les articles 1er-2, alinéa 2, de la loi du 2 juillet 1966, modifiée par l'ordonnance du 28 septembre 1967, ensemble 1134, régissant la loi des contrats, et 1152 du Code civil ; 3° que la simple référence à des projets d'actes authentiques, non régularisés par les parties pour les deux opérations ayant donné lieu aux actes sous seings privés du 9 novembre 1988, ne saurait suppléer, peu important leurs relations d'affaires, à l'absence de toute clause, dûment acceptée, propre au droit de résiliation ouvert au crédit-preneur ; qu'ainsi l'arrêt attaqué n'a validé ces deux actes qu'en violation des dispositions d'ordre public de l'article 1er-2, alinéa 2, de la loi du 2 juillet 1966, auxquelles ils ne satisfaisaient ni directement ni par référence inopérante, ensemble des articles 1101 et 1134 du Code civil ; 4° que, faute d'obligation valable, la condamnation de M. X..., comme caution solidaire, procède d'une violation de l'article 2012 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant exactement retenu que la clause comportant l'interdiction pour le preneur de résilier le contrat conclu pour une durée de quinze ans pendant les dix premières années étant justifiée par la nécessité de maintenir l'équilibre économique du contrat, n'était pas contraire aux dispositions de la loi faisant obligation aux parties d'organiser les conditions de la résiliation et retenu, abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant, que la clause ne mettait pas à la charge du preneur des obligations équivalentes à celles de l'exécution du contrat jusqu'au terme normal dès lors que s'il était prévu que le preneur continuait à supporter les loyers et charges pendant toute la période pendant laquelle l'immeuble n'aurait pu être reloué ou vendu, il lui suffisait, conformément aux dispositions de la rubrique " dispositions générales " des contrats, de faire preuve de diligences normales pour proposer la relocation ou la vente du bien, auxquelles le crédit-bailleur ne pouvait s'opposer que pour des motifs légitimes, pour ne pas être tenu de les acquitter, la cour d'appel a pu en déduire que les huit contrats conclus par actes authentiques n'étaient pas nuls ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que si les deux actes sous seings privés ne comportaient aucune clause de résiliation, les projets d'actes authentiques étaient effectivement annexés à ces actes, la cour d'appel, qui a constaté que le projet d'acte authentique, qui faisait partie intégrante de chacun de ces contrats, comportait un article 16 rédigé dans des termes exactement identiques à ceux figurant dans les huit actes authentiques, a pu en déduire que ces conventions sous seings privés étaient valables et qu'ainsi, la validité des dix conventions principales étant reconnue, M. X... devait être condamné à respecter son engagement ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 97-11023
Date de la décision : 18/11/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

CREDIT-BAIL - Crédit-bail immobilier - Nullité - Cause - Clause de résiliation anticipée - Clause prévoyant que le crédit-preneur supportera les loyers et charges tant que l'immeuble ne sera pas reloué ou vendu - Clause dans le seul intérêt du crédit-bailleur (non) .

La cour d'appel qui retient exactement que la clause comportant l'interdiction pour le preneur de résilier pendant les dix premières années le contrat conclu pour une durée de 15 ans étant justifiée par la nécessité de maintenir l'équilibre économique du contrat, n'était pas contraire aux dispositions de la loi faisant obligation aux parties d'organiser les conditions de la résiliation et qui relève que la clause ne mettait pas à la charge du preneur des obligations équivalentes à celles de l'exécution du contrat jusqu'au terme normal dès lors que s'il était prévu que le preneur continuait à supporter les loyers et charges pendant toute la période pendant laquelle l'immeuble n'aurait pu être reloué ou vendu, il lui suffisait, conformément aux dispositions de la rubrique " dispositions générales " des contrats, de faire preuve de diligences normales pour proposer la relocation ou la vente du bien, auxquelles le crédit-bailleur ne pouvait s'opposer que pour des motifs légitimes, pour ne pas être tenu de les acquitter, peut en déduire que les huits contrats conclus par actes authentiques n'étaient pas nuls.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 novembre 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 18 nov. 1998, pourvoi n°97-11023, Bull. civ. 1998 III N° 219 p. 146
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1998 III N° 219 p. 146

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Beauvois .
Avocat général : Avocat général : M. Weber.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Pronier.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Le Bret et Laugier, la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:97.11023
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