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17/11/1998 | FRANCE | N°96-17878

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 novembre 1998, 96-17878


Sur le moyen unique :

Vu l'article 809, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que les sociétés civiles professionnelles de directeurs de laboratoire d'analyses médicales et du laboratoire Parvis Saint-Michel (les SCP), dont les sièges sont au Havre, ont assigné devant le président du tribunal de grande instance statuant en référé M. X..., divers responsables de laboratoires ainsi que la société d'exercice libéral à forme anonyme Biocéane (Selafa Biocéane) afin de leur interdire d'installer

un laboratoire d'analyses médicales dans le centre du Havre ; qu'ils rappelaient...

Sur le moyen unique :

Vu l'article 809, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que les sociétés civiles professionnelles de directeurs de laboratoire d'analyses médicales et du laboratoire Parvis Saint-Michel (les SCP), dont les sièges sont au Havre, ont assigné devant le président du tribunal de grande instance statuant en référé M. X..., divers responsables de laboratoires ainsi que la société d'exercice libéral à forme anonyme Biocéane (Selafa Biocéane) afin de leur interdire d'installer un laboratoire d'analyses médicales dans le centre du Havre ; qu'ils rappelaient qu'en 1968, six des douze laboratoires du Havre et de sa région avaient créé une société civile professionnelle (SCP), chacun conservant ses locaux et son implantation géographique propres ; que, pour se mettre en conformité avec la loi du 11 juillet 1976, qui prohibait l'exploitation de laboratoires sur des lieux géographiques multiples, le groupement s'est scindé en 1980 en cinq établissements autonomes ; qu'aux termes de ce contrat, les membres de la SCP qui se retiraient de la société s'interdisaient, pour eux-mêmes et leurs successeurs, d'exploiter pendant un délai de vingt années à compter du 1er mai 1980 un laboratoire médical situé dans un rayon de 50 kilomètres du centre du Havre, mais seulement dans le département de la Seine-Maritime ; qu'à l'appui de leur instance en référé, les SCP ont allégué que les travaux entrepris par les consorts X... dans le centre du Havre l'étaient en violation de la clause de non-concurrence souscrite en 1980 ;

Attendu que, pour interdire la poursuite des travaux entrepris, l'arrêt rappelle que, pour s'affranchir de la clause litigieuse, les consorts X... et la Selafa Biocéane allèguent que leur engagement de non-concurrence, dès lors que les matériels transmis par le partage sont aujourd'hui tous amortis, excède dans sa durée le champ des mesures nécessaires à la cession de la clientèle ; qu'en cela, cette stipulation tombe sous le coup de la nullité édictée par l'article 9 de l'ordonnance susvisée du 1er décembre 1986 dont l'article 7 prohibe les ententes ayant pour effet possible d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence ; qu'en réponse à cette argumentation, l'arrêt énonce que le rapport de la clause de non-concurrence avec la fonction qu'elle remplit constitue une question de fond qui, même si elle donne naissance à une contestation sérieuse, n'est pas de nature à faire obstacle aux pouvoirs des juges des référés tirés de l'article 809 du nouveau Code de procédure civile ; qu'il apparaît en revanche que la clause de non-concurrence est opposable aux parties et que son sens est dépouvu d'obscurité et d'équivoque ; que sa rupture prématurée octroie aux consorts X... et à la société Selafa Biocéane une priorité injustifiée à l'extension de leur zone d'influence et que les pertes d'exploitation qui s'en suivront pour les laboratoires concurrents représentent un dommage imminent qu'il importe de prévenir ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que si l'existence d'une contestation sérieuse n'interdit pas au juge des référés de prendre les mesures prévues par l'article 809, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile, le juge doit apprécier le caractère manifestement illicite du trouble causé ; qu'en se bornant à se référer à l'existence de la clause de non-concurrence souscrite par les parties fût-elle non ambiguë et aux pertes d'exploitation des SCP, sans vérifier si cette clause était licite et de nature à justifier l'interdiction des travaux envisagés, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 mai 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 96-17878
Date de la décision : 17/11/1998
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

REFERE - Mesures conservatoires ou de remise en état - Trouble manifestement illicite - Constatations nécessaires .

REFERE - Mesures conservatoires ou de remise en état - Trouble manifestement illicite - Applications diverses - Concurrence déloyale ou illicite - Clause de non-concurrence

Si l'existence d'une contestation sérieuse n'interdit pas au juge des référés de prendre les mesures prévues par l'article 809, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile, le juge doit apprécier le caractère manifestement illicite du trouble causé. Viole dès lors ce texte la cour d'appel, qui pour interdire l'installation d'un laboratoire d'analyses médicales, se borne à se référer à l'existence d'une clause de non-concurrence, fût-elle non ambiguë, sans vérifier si cette clause était licite et de nature à justifier l'interdiction demandée.


Références :

Nouveau Code de procédure civile 809 al. 1

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 22 mai 1996

A RAPPROCHER : Chambre civile 2, 1986-07-21, Bulletin 1986, II, n° 119 (2), p. 83 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 nov. 1998, pourvoi n°96-17878, Bull. civ. 1998 IV N° 275 p. 231
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1998 IV N° 275 p. 231

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : Mme Piniot.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Léonnet.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Peignot et Garreau, la SCP Ghestin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.17878
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